GARM, Tadjikistan (AP) — Les autorités tadjikes ont entamé une opération de nettoyage dans une vallée proche de l'Afghanistan, après des semaines d'attaques terroristes menées par des islamistes, la dernière en date ayant fait 25 morts dans les rangs de l'armée. Cette embuscade du week-end dernier contre un convoi militaire dans la vallée de Rasht, région montagneuse et isolée dans l'Est du pays, a été revendiquée par la suite par le Mouvement islamique d'Ouzbékistan (MIO), principal mouvement islamiste d'Asie centrale ex-soviétique. Selon la radio en tadjik de Radio Free Europe, Radio Ozodi, un homme se présentant comme porte-parole du MIO, sous le nom d'Abdufattoh Ahmadi, a affirmé qu'il s'agissait d'une riposte à la politique anti-islamique du gouvernement. Il a menacé d'autres actions terroristes si Douchanbé ne met pas un terme à son soutien aux opérations militaires américaines et de l'Otan en Afghanistan. Les gouvernements locaux craignent une extension du conflit afghan vers le nord, où se replieraient les militants chassés d'Afghanistan et du Pakistan, où se multiplient les opérations contre eux. C'est dans ce cadre que se renforce le MIO, qui a vu le jour en 1998, affilié désormais à Al-Qaïda et aux talibans. Cherchant au départ à renverser les régimes autoritaires des ex-Républiques soviétiques d'Ouzbékistan et du Tadjikistan, il a ensuite, selon les experts, étendu son influence à la plupart des pays d'Asie centrale ex-soviétique et dispose de camps d'entraînement en Afghanistan et au Pakistan. L'arrivée de renforts militaires dans la vallée et les incessants survols d'hélicoptères sèment la crainte parmi la population de voir la région replonger dans la violence. Mais les informations en provenance de la vallée de Rasht étaient très limitées, la plupart des journalistes étant interdits d'accès à la zone depuis plusieurs jours. La tension était déjà remontée avec l'évasion, fin août, d'un groupe de 25 militants islamistes emprisonnés pour terrorisme à Douchanbé, parmi lesquels plusieurs membres du MIO, dont des ressortissants afghans et russes. Les autorités tadjikes disent rechercher le chef de guerre Mirzokhodzha Akhmadov, qu'ils accusent d'être impliqué dans les récentes violences et d'héberger le chef islamiste Mullo Abdullo, qui joua un rôle central dans la guerre civile au Tadjikistan (1992-97). Akhmadov est lui aussi vétéran de ce conflit sanglant entre le gouvernement du Président Emomali Rakhmon et l'opposition principalement islamiste, qui fit environ 100.000 morts. Selon les autorités tadjikes, Akhmadov se serait allié avec Adullo, commandant islamiste extrémiste parti en Afghanistan après la fin de la guerre civile. Il aurait regagné son Tadjikistan natal l'année dernière pour y reconstituer un groupe armé, recrutant Afghans, Pakistanais ou autres combattants de la région du Sud-Caucase. L'accord de paix qui mit fin à la guerre civile prévoyait l'entrée au gouvernement de plusieurs hauts responsables de l'opposition, dont Akhmadov, qui dirigea ensuite les forces de police chargées de la lutte contre le crime organisé dans la région de Garm (Centre) jusqu'en 2008. C'est dans ce cadre qu'il fut accusé d'avoir tué en 2008 un haut responsable de la police au cours d'une inspection qui devait se centrer sur les activités d'Akhmadov. Ce dernier serait passé à la clandestinité après un raid sur sa résidence à Garm mercredi, au cours duquel cinq personnes ont été abattues.