Les tendances inflationnistes sont à l'œuvre de sorte qu'on peut prévoir un taux d'inflation de 5% d'ici fin 2017, ce qui représente une source de préoccupation Le démarrage de la plénière s'est fait au ralenti hier au Bardo. Ouverte à 9h00, elle a dû être repoussée d'une heure et demie, faute de quorum. A 10h30 enfin, sous la présidence de Abdelfateh Mourou, avec à ses côtés Faouzia Ben Fedda, les travaux prennent leur envol. Deux projets de loi sont à l'ordre du jour. L'examen du premier a été reporté, le ministre de tutelle étant en déplacement. Le deuxième projet de loi organique n° 33/2017 portant approbation de l'adhésion de la République Tunisienne à la Convention n°108 du Conseil de l'Europe, pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, et de son protocole additionnel n°181, concernant les autorités de contrôle et le flux transfrontière de données. Le ministre chargé des relations avec les instances constitutionnelles, Mehdi Ben Gharbia, était présent avec son staff. A l'occasion du débat, des élus, Salem Labiadh et Rabha Ben Hassine, notamment, ont rappelé l'article 24 de la constitution qui dispose : « L'Etat protège la vie privée, l'inviolabilité du domicile et le secret des correspondances, des communications et des données personnelles ». Or, ce sont ces mêmes principes qui sont bafoués à longueur de temps par ceux qui sont censées les protéger. Salem Labiadh citant un rapport d'Amnesty international accuse l'Etat de céder à l'agence de renseignement américaine les données personnelles des Tunisiens, comme il attribue aux entreprises publiques la responsabilité de rétrocéder aux entreprises commerciales ces fichiers, qui en font usage pour élaborer leurs stratégies de com. Pourtant, il est du ressort de l'Etat et des instances compétentes, dans un Etat de droit qui respecte ses citoyens, la création, le traitement, la conservation et la protection des données personnelles. Des pratiques contraires ont pourtant fleuri ces derniers temps, détériorant davantage le climat général et sapant la crédibilité de l'Etat, de ses agents et des relayeurs en chef de diffamations. Le progrès économique provient de la valeur ajoutée et non des dons amis L'après-midi a été consacrée à l'audition du gouverneur de la Banque centrale, qui selon les dispositions réglementaires présente une analyse de la situation financière à l'Assemblée chaque six mois. Chedly Ayari a présenté un exposé qui s'est voulu sincère sur la situation financière du pays. Il s'est dit optimiste par le taux de croissance de l'ordre de 2,1% réalisé au cours du premier trimestre, ajoutant cependant que les tendances inflationnistes sont à l'œuvre de sorte qu'on peut prévoir un taux d'inflation de 5% d'ici fin 2017, ce qui représente une source de préoccupation. Après avoir été relativement contenue, l'inflation est de retour, et pourrait augmenter, si on n'avait pas recouru à la compensation, a-t-il renchéri. Mais la compensation crée le déficit budgétaire, c'est un cercle vicieux. A ce titre, le gouverneur omet de signaler que la dépréciation du dinar entraîne mécaniquement une hausse de l'inflation. Dans une allocution d'une vingtaine de minutes face aux travées à moitié vides, le gouverneur a déclaré que le déficit commercial a atteint des niveaux records, ce qui a pour effet d'entraîner une fonte des réserves de change. Une situation naturelle dès lors qu'il y a déficit commercial naturel important. Ayari rappelle les critères importants: déficits jumeaux (commercial et du compte courant), déficit budgétaire, endettement extérieur. Notre économie a une mauvaise note partout. M. Ayari a ajouté que le progrès économique provient de la valeur ajoutée (donc de la croissance) et non des dons qu'on peut obtenir de pays ou d'institutions. Pour ce qui est des variables qui influent sur la santé d'une économie, le gouverneur a estimé qu'elles sont toutes négatives dans le cas présent. « Plus il y a une baisse des réserves de change et plus la capacité d'intervention de la Banque centrale pour défendre la valeur de la monnaie se trouve réduite ». Elémentaire. Et cercle vicieux. Plus elle sera réduite, et plus le dinar se dépréciera. La solution qui s'impose dans l'immédiat La situation de l'économie et du dinar n'est pas une fatalité. Et le FMI n'est pas un monstre avec qui on ne peut pas discuter. Le flottement du dinar n'est pas une décision irréversible. Aujourd'hui, le gouvernement pourrait l'arrêter, de grandes économies l'ont déjà fait. Selon un économiste sollicité par La Presse, les autorités monétaires et économiques sont face à un dilemme: où elles laissent filer le dinar, on atteindra alors la parité 3 dinars pour 1 euro. La dette extérieure s'en trouvera augmentée. Les réserves de change baisseront encore. Les importations se renchériront. L'inflation augmentera. Le chômage augmentera. Si l'on en croit le FMI et ses relais locaux, les importations coûteront tellement cher qu'elles baisseront. Mais on oublie celles qui sont incompressibles ou indispensables (pétrole, biens d'équipement, demi-produits). Les exportations quant à elles seraient dopées. « Mais y a-t-il vraiment quelque chose à exporter qui ne soit menacé ni par une grève ni par l'insécurité? », s'interroge-t-il encore. Si on rétablit la parité fixe du dinar. Cela signifie que la Banque centrale est obligée de servir les demandes de devises jusqu'à épuisement des réserves de change, analyse-t-il encore. Et ensuite, de limiter les importations, par décision réglementaire. En cas de besoin de compétitivité, elle peut dévaluer. C'est la solution qui s'impose dans l'immédiat.