Baffes, coups de poing, coups de pied et gros mots, bagarres, insultes, bousculades... sont le lot quotidien des émissions, feuilletons, séries comiques et caméras cachées de la programmation des chaînes de télévision publiques et privées de ce mois de Ramadan 2017. Ces émissions, toutes catégories confondues, diffusées à des heures de grande écoute, banalisent pour ne pas dire incitent à la violence, et ce, dans le but d'enregistrer le maximum de taux d'audience. Et l'éthique dans tout ça ? Les feuilletons à caractère historique et religieux, diffusés généralement peu avant la rupture du jeûne, prônent en grande majorité la violence. Les moments forts de ces feuilletons reposent essentiellement sur les combats entre tribus qui utilisent entre autres des épées et autres armes blanches violentes sans compter les cascades de coups de poing et de pied. Un étalage complaisant de la violence, et ce, au nom de la religion. La violence, peut-être psychologique, à l'image des caméras cachées, censées apporter un petit moment de bonheur et de divertissement, devient carrément un cauchemar provoquant la terreur chez les invités ainsi que chez les spectateurs. «El clinique» de Bilel Béji (Hannibal TV). Les invités sont mis dans des situations de choc intense et de peur. «Yassine», sur la même chaîne Atessia, met en scène le jeune Yassine en train de menacer des innocents avec une arme qu'il a, soi-disant usurpé, à un policier. La victime de la caméra cachée, une personnalité politique intervient via une station de radio pour le dissuader de jeter l'arme et de se rendre à la police. L'invité est pris de panique lorsqu'il apprend que Yassine est abattu. «Le masque» de Mégalo (Attessia) ne manque pas d'actes de violence mais cette fois-ci sur la personne de Mégalo lui-même. En découvrant qu'il a été trahi, l'invité assigne des coups de poing au farceur de service. On assiste à des actes d'agression simulés pour provoquer le rire des téléspectateurs. Clashs et gifles en série Les émissions de divertissement ne sont pas non plus épargnées. Profération de boutades vulgaires et grossières, clash entre chroniqueurs, gifles en séries et autres actes de violence sont le lot quotidien dans les talk shows ou les séries de divertissement comme si le rire ne peut passer que par ces sornettes où les acteurs et chroniqueurs en viennent aux mains. L'exemple le plus frappant est celui de «Oumour jeddia» de Nawfel Ouertani sur El Hiwar Tounsi où les protagonistes terminent souvent leurs sketchs par des querelles et des poursuites. C'est vrai que Charlie Chaplin a beaucoup utilisé ce genre de gags pour ses films mais avec le temps, ils ont été largement dépassés. La même clique de «Oumour jeddia» propose quotidiennement une série comique «Dinya okhra» où les claques ne se comptent plus. A chaque réplique, un des personnages corrige son vis-à-vis avec une paire de gifles dans le but de provoquer le rire des téléspectateurs. L'excès de ce genre de gags, par ailleurs de mauvais goût, donne l'effet contraire. Les feuilletons de la soirée sont généreux en séquences violentes. Plus il y a de coups de poing et des menaces avec un étalage d'armes blanches (couteau) et d'armes à feu : RBG, revolver, kalachnikov..., on aura tout vu. «Bolice», série policière comique de Majdi Smiri (Atessia), affiche une panoplie d'artillerie lourde utilisée pour régler les comptes des malfaiteurs. «Wled Moufida» de Sami Fehri (El Hiwar Tounsi) ne manque pas d'audace en matière de scènes violentes où les armes utilisées ne se comptent pas. Suicide, meurtres, crêpage de chignon. Il ne se passe pas un épisode sans qu'il y ait une à deux scènes agressives. Nous nous sommes contentés de ces exemples, mais il y en a d'autres aussi sur les chaînes publiques. La Haica a réagi seulement au sujet de «Wled Moufida» en exhortant la chaîne de déplacer la programmation de ce feuilleton de 21h00 à 22h00, outre le fait qu'une signalétique indiquant que le feuilleton en question est interdit au moins de 12 ans joue en quelque sorte de pare-choc. La corrélation entre médias et violence n'est pas nouvelle, elle a toujours existé mais elle ne cesse de se renforcer notamment sur les chaînes privées en quête d'audimat, et ce, dans la perspective de séduire les annonceurs. Mais cet excès de violence n'est pas sans conséquence sur le comportement des jeunes qui peuvent devenir agressifs, c'est en tout cas ce que démontrent plusieurs études scientifiques, et ce, même si la relation de cause à effet n'est pas toujours prouvée.