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Les dépositaires de l'autorité à la recherche de protection Projet de loi sur la répression des agressions contre les forces sécuritaires a l'examen à l'ARP
Sur les six dernières années, l'évolution des violences déclarées contre les sécuritaires est pratiquement constante. Les syndicats des forces sécuritaires appellent à l'accélération de l'examen du projet de loi criminalisant les agressions portées contre eux, en gestation depuis le gouvernement Essid, et son adoption par l'ARP, mais ce projet de loi ne semble pas recueillir l'assentiment des députés ni celui des organisations de la société civile Les chiffres sont effarants, voire têtus. Depuis 2011 et jusqu'à nos jours, 60 agents sécuritaires ont trouvé la mort dont 20 au cours de la seule année 2011 et 2.000 autres ont été blessés suite à des agressions perpétrées contre eux par des protestataires en colère. Certains d'entre eux ont connu une mort atroce, comme c'est le cas du lieutenant Mejdi Hajlaoui, décédé des suites de ses blessures, après que la voiture de police a été incendiée par un cocktail Molotov dans la délégation de Bir El Hfay à Sidi Bouzid. Les violences contre « les dépositaires de l'autorité » s'étendent souvent pour cibler les postes de police et de la garde nationale, les voitures des sécuritaires et des fois leurs voitures particulières, lors des mouvements de protestation. Au cours des évènements d'El-Kamour et de Tataouine, 9 véhicules administratifs ont été incendiés et 2 motos brûlées. Sur les six dernières années, l'évolution des violences déclarées contre les sécuritaires est pratiquement constante. Leurs familles ne sont pas non plus à l'abri de mauvaises surprises et vivent dans la peur d'être un jour ciblées par des malfrats ou des terroristes. Les syndicats accusent « une réponse pénale clémente » du gouvernement qui affaiblit davantage l'autorité de l'Etat. Et elles appellent à la mise en place d'une loi spécifique qui criminalise les agressions contre les agents porteurs d'armes. Projet de loi d'avril 2015 Un projet de loi a été préparé par le gouvernement Habib Essid et approuvé par le Conseil des ministres du 8 avril 2015. Il a, depuis, été transmis à l'Assemblée des représentants du peuple. A chaque fois, les syndicats sécuritaires appellent à l'accélération de son examen et son adoption par l'ARP. Jeudi 6 juillet, des centaines de policiers se sont rassemblés devant le siège de l'ARP au Bardo pour protester contre « les agressions dont ils sont victimes et réclamer une loi de protection les couvrant durant leurs missions ». Leur appel a été entendu et une semaine après, jeudi 13 juillet, la commission de la législation générale de l'Assemblée des représentants du peuple a pris les choses en main. Elle a entamé l'examen du projet de loi d'avril 2015 en auditionnant les ministres de l'Intérieur et de la Défense ainsi que les syndicats sécuritaires. Hédi Majdoub, qui reste favorable à l'accélération de l'examen du projet de loi relatif à la répression des atteintes contre les agents porteurs d'armes, a déploré la récurrence des agressions commises contre les sécuritaires. Il a expliqué que « ce projet de loi s'inscrit dans le cadre d'un processus de réforme engagé par le département depuis l'année 2011 visant à améliorer le cadre juridique réglementant le travail des forces de l'ordre à la lumière des nouveaux défis et de la situation sécuritaire délicate du pays ». Il s'agit pour le ministère de tutelle de réunir « les conditions requises garantissant la protection des forces de l'ordre ». Même son de cloche chez son collègue de la défense Farhat Horchani qui a indiqué que la loi réprimant les agressions contre les agents porteurs d'armes « vient combler un vide juridique » et qu'elle constituerait « un message politique envers ces corps de métiers ». La commission de la législation générale de l'Assemblée des représentants du peuple a, également, auditionné neuf syndicats de sécurité. Mettant l'accent sur « la faiblesse des textes juridiques et la problématique au niveau de la justice », elles ont estimé que « la nature de l'action de l'agent de sécurité exige une loi spéciale à la différence des autres lois qui portent sur l'agression envers le fonctionnaire public ». L'adoption du projet de loi après son amendement « dissipera les craintes de voir l'appareil sécuritaire revenir à la situation avant la révolution de 2011 en passant des messages par le biais des différents articles ». Les députés pas chauds, la société civile hostile Toutefois, leurs thèses ne semblent pas recueillir l'assentiment des députés dont certains ont exprimé « la crainte de voir la promulgation de la loi aboutir à des résultats contraires et la multiplication des revendications de lois spéciales par d'autres secteurs, à l'instar des juges et des agents des tribunaux ». D'autres ont évoqué la possibilité de voir cette loi « entraîner l'éparpillement du système législatif », puisque le code pénal et le code disciplinaire militaire contiennent des articles « fermes à l'encontre des agresseurs des fonctionnaires publics et autres ». Les députés ne sont pas les seuls à émettre des objections contre le projet de loi réprimant les agressions contre les agents porteurs d'armes. Des organisations de la société civile ont déjà exprimé leur hostilité à ce projet depuis l'annonce de son adoption par le Conseil des ministres en avril 2015. Le qualifiant de « liberticide ». En cas d'adoption, une telle loi risque de bâillonner la presse et de limiter la liberté d'expression. Il s'agit du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (Ltdh), l'Organisation 23-10 pour l'appui de la transition démocratique et du Front populaire (FP). Et c'est le Snjt qui a été le plus virulent de toutes, le jugeant « répressif » et exigeant son retrait pur et simple parce qu'il « représente une atteinte à la liberté d'expression ». Hamma Hammami, le porte-parole du Front populaire, avait, à l'époque, affirmé que vouloir protéger les forces de sécurité par une loi spéciale signifie le retour à « l'Etat policier » et par là même à la « restriction des libertés ». Le métier de sécuritaire est un métier à hauts risques. Un policier est appelé à assurer la sécurité des personnes, des biens et des institutions. Il lutte contre la drogue, la criminalité et la grande délinquance. Il assure le maintien de l'ordre, notamment pendant les grandes manifestations sportives et autres. C'est pourquoi il est souvent exposé à plusieurs menaces et à toutes sortes d'agressions dans la traque des flagrants délits et la chasse aux délinquants et autre criminels et contrebandiers. Comme il est souvent la cible d'attaques de la part des protestataires. La dégradation des rapports de la police avec les citoyens s'ajoute aux mauvaises conditions de travail, ce qui rend difficile l'exercice de ce métier. Le malaise qu'expriment souvent les sécuritaires fait que pour la plupart d'entre eux, la motivation professionnelle se trouve en baisse. La sécurisation des sécuritaires, passe, avant tout, par l'amélioration des conditions de travail, la revalorisation de leurs indemnités et la mise à leur disposition des moyens nécessaires pour face à toutes les menaces et tous les dangers. Une loi spéciale suffira-t-elle à assurer leur protection ?