Les besoins de financement sont en hausse d'année en année et l'économie est aujourd'hui incapable de satisfaire ses besoins qui s'élèvent à 5.000 MD En vue de l'examen dans les prochains jours du projet de loi de finances 2018, la commission des finances a auditionné hier le ministre des Finances, Ridha Chalghoum, pendant toute une journée. Accompagné de son staff, Ridha Chalghoum a défendu avec passion le texte, en répondant, dans le même temps, aux inquiétudes d'une partie des membres de la commission. Ridha Chalghoum a procédé à une présentation générale du contenu et des ambitions du projet, tout comme il l'a fait chez un certain nombre de partis politiques. Le projet de loi de finances soutenu par le gouvernement vise, en fait, à libérer de l'espace budgétaire à même de permettre le financement de dépenses utiles. Si le projet est voté tel quel, l'Etat pourrait parvenir (selon les calculs du ministère des Finances), à ramener le déficit budgétaire à 4,9% du PIB contre 6,1% en 2017. Cela passe nécessairement par une augmentation des ressources fiscales qui devraient augmenter de 10,5%. Cependant, Ridha Chalghoum refuse de concéder aux élus de l'opposition le fait que le projet accentue la pression fiscale sur le contribuable. Selon lui, la pression fiscale n'a pas augmenté et a même tendance à régresser depuis 2014. En effet, celle-ci s'établissait à 23.1% en 2014 et ne serait que 22% en 2018. En outre, le ministre des Finances a indiqué que le budget de 2018 pourra être financé à 73% par des ressources propres et à 27% par des emprunts, alors qu'il y a un an l'Etat ne pouvait financer son budget qu'à hauteur de 70%. L'endettement reste toutefois important même si la tendance est à la baisse par rapport à 2017. Pour l'année prochaine, le gouvernement espère ramener le taux d'endettement sous la barre symbolique de 70%. Le ministre des Finances a déclaré que les deux défis majeurs du budget sont malheureusement le service de la dette et la masse salariale qui sont lourds à porter par les finances publiques. "Les besoins de financement sont en hausse d'année en année, explique-t-il. Notre économie est-elle aujourd'hui capable de satisfaire ces besoins qui s'élèvent à 5.000 MD? La réponse est clairement non". L'une des alternatives envisagées, selon le ministre des Finances, est d'aller vers la création monétaire, "avec les risques que cela comporte sur l'inflation". Le député du Front populaire, Fethi Chemkhi, à l'origine d'une proposition de loi sur un "audit des dettes publiques", a recommandé au ministre des Finances de faire un moratoire sur le remboursement de la dette, ce à quoi, très gentiment, Ridha Chalghoum a répondu «qu'à partir du moment où l'on refuse le paiement d'une échéance, la dette devient immédiatement exigible avec toutes les conséquences que cela peut avoir». De son côté, la députée de l'opposition Samia Abbou a considéré que le gouvernement n'avait absolument aucune vision et a appelé ses collègues à ne pas voter en faveur du texte. "Ce gouvernement est tout à fait capable d'améliorer ce projet de lui-même, s'il est contraint en refusant de voter le texte en l'état". Samia Abbou peut se permettre une telle demande d'autant plus que même les élus de la majorité font la moue devant certaines dispositions. Mongi Harbaoui estime ainsi que le projet est en deçà des attentes. "Nous avons, à Nida Tounès, formulé un certain nombre de propositions en ce qui concerne la lutte contre la contrebande, contre le commerce parallèle et la rationalisation des dépenses des entreprises publiques, mais elles n'ont malheureusement pas été prises en considération", a-t-il lancé au ministre. Toujours du côté de Nida Tounès, Zohra Driss, députée et hôtelière, défend clairement son secteur, oubliant parfois qu'elle est une députée du peuple. En porte-parole de la Fédération de l'hôtellerie, elle critique les dispositions fiscales concernant les boissons alcoolisées, ainsi que la taxe de 3 dinars imposée aux résidents des hôtels. "De telles dispositions risquent de peser lourd dans les négociations avec les tours-opérateur", déclare-t-elle. Certains élus de l'opposition se sont demandé où sont passés les revenus du phosphate, dont la production a repris. Le ministre des Finances rétorque : "Si la production a repris, l'acheminement des phosphates vers les usines de transformation reste perturbé". Il ajoute que, jadis, les revenus du phosphate permettaient de juguler le déficit budgétaire.