«Si tout le monde dit que j'ai tort et que je suis le seul à soutenir que j'ai raison, c'est que j'ai tort» Pourquoi ce vieux dicton est-il, ces derniers jours, à l'honneur, dit et redit de mille et une façons pour commenter en quelques mots chargés de regrets, ce... fameux stage que l'équipe nationale de football a effectué au Qatar ? Bien entendu, c'est avant même de commencer, et dès l'annonce qui en a été faite, que nous avions soutenu que cette initiative ne servait absolument à rien. Ce n'était nullement pour engager une quelconque polémique qui desservirait les intérêts de notre équipe nationale, mais tout simplement pour attirer l'attention sur ce qui relève d'un incompréhensible non-sens. Restés à Tunis au sein de leurs clubs respectifs, les joueurs auraient bénéficié de la même préparation. Les techniciens qui opèrent au sein de leurs clubs respectifs sont aussi capables de relever les insuffisances qui auraient imposé une reprise en main au niveau technique ou physique. Ils n'ont peut-être pas la chance d'être aussi médiatisés, mais leur savoir-faire est chaque semaine illustré par un travail sur le terrain, qui démontre leurs compétences, dans des conditions, pour le moins qu'on puisse dire, incroyables. C'est dire que ce qui s'est fait à l'issue de ce stage ne saurait déboucher sur une réinvention de la roue. Ce qui est par contre différent, c'est cette argumentation que l'on sert à ceux qui voudraient bien se laisser convaincre et qui met en évidence une discutable opportunité. Le seul argument qui aurait pu sauver cette situation a fait défaut : le choix à satiété d'adversaires de qualité, adaptés et répondant à des critères de choix logiques, qui auraient permis une éventuelle extériorisation des éléments retenus et dont l'équipe aurait réellement profité. De ce match joué qui s'est soldé par une «défaite», nous n'avions retenu que les «regrets» du... capitaine qui nous a fait piteusement part des reproches pathétiques de sa «conscience», avant de marquer le seul but de cette rencontre- animation, à propos de laquelle nous ignorons franchement ce qu'on pourrait en tirer sur le plan technique et collectif. Tout le monde a joué ? Et puis après ? Nous avons entendu dire que cette équipe qui est allée en stage compte des joueurs dont on aura besoin à l'avenir ? Et alors, n'aurait-on pas pu s'en rendre compte sans faire des milliers de kilomètres, en engageant des dépenses superflues que l'on aurait mieux fait de consacrer aux sélections jeunes qui crient misère et en bouleversant tout un calendrier national ? Et encore, un sélectionneur qui prépare la phase finale d'un Mondial est-il chargé de jouer le rôle de prospecteur ? D'ailleurs, comble d'ironie et preuve de l'absence totale de programmation à long terme, ces joueurs qui promettent n'aurait-on pas mieux fait de les engager dans ce Chan qui nous passe sous le nez. Personne n'aurait réagi, car cela aurait donné à ces jeunes qui promettent, quel que soit le résultat, l'occasion de s'aguerrir en se frottant à des équipes confirmées et cela aurait démontré que le football tunisien possède de jolies réserves. En nous obligeant à ne voir que le bout du nez, ceux qui désirent imposer leur point de vue oublient que des erreurs d'appréciation stratégiques pareilles sont impardonnables. En arguant que ce stage a rendu service à la sélection nationale on veut simplement induire de cette manière l'idée qu'on n'est pas dans le tort. A Tunis, une sélection des joueurs étrangers opérant en Tunisie, des ententes entre des équipes tunisiennes ou une sélection de la Nationale 2 auraient donné plus d'enseignements à notre sélectionneur national, qui tenait à ce stage, annoncé de manière surprenante pour toutes les parties prenantes, venu court-circuiter les clubs et en face duquel, ni la direction technique nationale ni, bien entendu, la fédération, qui se réfugiera le cas échéant derrière la sainte «carte blanche» accordée pour la préparation de la sélection nationale, n'ont réagi. Une sélection quand même amputée par l'absence de joueurs phares et d'éléments clés, subjugués par leurs éventuels transferts et qui avaient la tête ailleurs. Il n'en demeure pas moins, que quels que soient les arguments évoqués, ce stage a complètement bouleversé le travail des équipes tunisiennes et les a obligées à tourner à vide, durant sa durée. La compétition nationale s'en est trouvée d'autant bloquée, freinée au moment où elle commençait à devenir intéressante grâce au rythme et à l'intensité retrouvés. Qu'à cela ne tienne. Ce stage au Qatar (le lieu est en cause seulement pour des raisons strictement liées au climat) devait avoir lieu. Tout le reste était secondaire. Les clubs, la compétition nationale, les dépenses superflues que les clubs sont dans l'obligation d'assumer, le calendrier que l'on a été obligé ou que l'on sera contraint de réaménager, les répercussions qui suivront ce stage sur le plan individuel et bien d'autres conséquences qui interviendront dans les jours et les semaines qui suivront, ne comptent pas. Le stage promis en grande pompe devait avoir lieu. Et il a eu lieu. Dire que pour jouer en Russie on ne devrait pas aller dans un pays du Golfe est secondaire. Soutenir que sans adversaires valables pour jauger des effets du stage et que pour l'assimilation des acquis dans ce rassemblement il faut des adversaires et des engagements fermes est négligeable. Un pique-nique réussit bien lorsqu'il est abordé à la belle franquette. Alors ? On viendra doctement nous assurer que «tout a bien marché et que ce stage a été bénéfique». Nous l'espérons et nous en sommes en partie convaincus, étant donné qu'un regroupement d'éléments appartenant à la sélection est toujours utile. A condition, bien entendu, que l'on veuille bien lui assurer les meilleures conditions de réussite : bien choisir le moment, laisser les joueurs bénéficier de l'apport de la compétition, les motiver par une mise sous pression qui les aurait obligés à se donner à fond pour mériter de rester au sein de ce groupe d'élus. De toutes les façons, rien, absolument rien, ne remplace la compétition et ces «turnover» qui se veulent des innovations spectaculaires, auxquels on s'adonne pour satisfaire la galerie, ce ne sera jamais aussi bénéfique que la compétition, la vraie. Ces stages on en faisait à une certaine époque, lorsque les clubs peinaient à encadrer valablement leurs protégés. De nos jours, les équipes tunisiennes sont bien encadrées et leur personnel d'encadrement, jeune appartenant à une nouvelle génération de techniciens compétents et terriblement motivés, n'a rien, absolument rien à envier à ceux qui les ont pris en main pour se fourvoyer dans une préparation dont on ignore si elle est foncière ou spécifique, dont personne ne connaît les conséquences. A quand le prochain rassemblement ?