Les participants à la conférence organisée à l'occasion de la commémoration de l'abolition de l'esclavage en Tunisie ont appelé à l'accélération du vote de la nouvelle loi afin de lutter contre la discrimination raciale. L'Association tunisienne de soutien des minorités (Atsm) a commémoré l'abolition de l'esclavage en Tunisie (23 janvier 1846) en organisant une conférence à Tunis en collaboration avec l'Association des étudiants et stagiaires africains en Tunisie et l'Association des Ivoiriens actifs de Tunisie sur le thème «Une loi pour protéger, une culture pour évoluer». Un grand pas a été franchi au niveau de la lutte contre la discrimination raciale en Tunisie. L'annonce a été faite à cette occasion par Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des Relations avec les institutions constitutionnelles, la Société civile et des Droits de l'Homme, qui a pris part à cette conférence. Le conseil des ministres vient d'avaliser le transfert du projet de loi portant sur la lutte contre la discrimination raciale à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Toutefois, un long chemin reste à parcourir dans le domaine de cette lutte. Que de frustrations et d'émotions qui se dégagent des témoignages des étudiants africains présents lors de cette conférence. Ils ont révélé un autre visage méconnu de notre pays. Oui, on est raciste en Tunisie, martèle Massoud Romdhani, président du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes). Le racisme existe bel et bien, mais il faut faire face à ces dérives comportementales qui n'honorent pas la Tunisie en accélérant le vote de la nouvelle loi d'autant plus que le nombre des étudiants africains qui choisissent de poursuivre leurs études en Tunisie ne cesse de diminuer. Ce nombre est passé de 12.000 en 2010 à 4.500 en 2017, selon ses dires. L'objectif est de préparer le terrain à une nouvelle génération imbue des principes de tolérance et du respect d'autrui. Ne pas reconnaître le racisme est le premier acte raciste, souligne Yamina Thabet, présidente de l'Atsm. Et d'ajouter que la Tunisie n'est pas un pays raciste mais elle est mal armée contre le racisme. Outre la loi qui incrimine les actes de discrimination raciale, il faut axer les efforts de la lutte sur le volet éducatif. Les partis politiques doivent aussi inclure dans leurs programmes la lutte contre le racisme, préconise Yamina. Les sanctions encourues en vertu de ce projet de loi contre la discrimination raciale varient entre une peine de prison allant d'un mois à 3 ans, et une amende allant de 500 à 3. 000 dinars. Une commission nationale de lutte contre la discrimination se chargera de la mise en œuvre d'une stratégie de lutte et des programmes d'action, assure de son côté le ministre Mehdi Ben Gharbia qui a tenu à rassurer certains intervenants africains en rappelant que les actes d'agression verbale ou physique qui ont visé des citoyens africains doivent être incriminés dans le cadre de la loi. «On est heureux d'accueillir l'élite des étudiants africains en Tunisie», a-t-il expliqué. Plusieurs intervenants se sont plaints des difficultés d'intégration en raison de difficultés financières et de l'ignorance des lois tunisiennes, de l'absence de souplesse au niveau des procédures administratives relatives à l'octroi des permis de séjour, et des agressions verbales et physiques. On n'est pas venu en Tunisie chercher de quoi manger mais simplement pour nous instruire, témoigne Joseph M'bale. Le racisme, on le vit même sur les bancs de la faculté avec certains professeurs, ajoute Boubaker. Le constat est alarmant et impose, outre l'adoption au plus vite du nouveau projet de loi, la mise en œuvre urgentet d'une stratégie de lutte contre la discrimination raciale sur le plan national.