Par Jalel Mestiri A la seule lecture du palmarès de l'Espérance après une 28e consécration en championnat, on pourrait penser à une domination (presque) sans partage de la compétition. On ne gagne pas à partir de rien. Les plus grandes sources d'inspiration de l'équipe espérantiste se situent dans la régularité et la persévérance dans le rendement, mais aussi dans la faculté de surpassement des différents acteurs, dans l'histoire du football d'une équipe condamnée à jouer les premiers rôles. Notamment en ce qui concerne l'aspect créatif'. Le principal souci de l'équipe étant le souci de se réinventer sans cesse, de ne pas s'endormir. Le football à l'EST reste un formidable exhausteur de sensations. Une passion raisonnée et déraisonnable. Un attachement qui fait du bien et qui renvoie à l'ivresse des victoires, des trophées, des épopées mythiques et des célébrations affectueuses avec les supporters. Mais évoquer l'Espérance à l'occasion de ce 28e titre, c'est surtout parler de l'amour du jeu. Des touches de balle comme des caresses, des ouvertures des délices et de ces buts comme des petits mots doux à l'oreille. L'amour du foot et l'EST ne font qu'un. La passion est trop forte, l'enracinement est bien trop tenace. Le club a vu naître, grandir, vieillir des noms inoubliables. Des légendes. Des éternels. Dans le sport, et en football tout particulièrement, aucun joueur, aucun entraîneur, aucun président, quelle que soit leur valeur, ne sont plus grands que le club. Mais peut-être un peu moins à l'Espérance, justement. L'EST a existé avant ses hommes d'exception et elle existera après eux. Mais personne n'a et n'aura porté ce maillot avec autant de dignité que l'actuel entraîneur Khaled Ben Yahia. Personne n'aura jamais fait autant de sacrifices comme l'actuel président, Hamdi Meddeb. Personne d'autre qu'eux n'aura d'ailleurs vécu sa vie comme on vit un rêve. Meddeb est à l'heure actuelle (et depuis une dizaiwne d'années) la référence dans le bénévolat. Coup de folie et coup de génie. Sa présence à la tête du club parle pour lui. Il est allé au bout de ses idées et n'a pas fui ses responsabilités. Il s'en amusait presque. C'est un puits d'exigence sans fond. Et puis, il y a, et il y aura certainement, encore Ben Yahia, l'entraîneur le plus attendu, le plus observé, le plus copié. Même ceux qui n'aiment pas sa manière sont obligés de se prononcer à son sujet. Il déroge à la règle. Ce n'est pas le cas de tous. Sa spécificité consiste non seulement à prêcher une certaine manière de jouer mais aussi une certaine manière de penser le football. En ce sens il est porteur d'une éthique de jeu. C'est à ce titre qu'il peut être brocardé, comme tous les grands inventeurs et grands entraîneurs, et «taxé» d'illuminé. Tous les gens qui ont des idées, qui sortent de l'ordinaire et prétendent réfléchir à la portée de leur travail sont toujours taxés de cette manière. C'est néanmoins cette catégorie d'entraîneurs qui fait avancer la cause du football. Ben Yahia est un penseur du jeu et une sorte de mentor pour ses joueurs. Il leur enseigne à la fois une manière de se comporter sur le terrain, mais aussi une certaine sensibilité du jeu...