La Tunisie a célébré hier la Journée internationale du Travail. Une journée fêtée chaque année pour honorer les travailleurs et les travailleuses et pour porter haut la valeur du travail. Une valeur qui a besoin d'être consolidée davantage, surtout dans un contexte difficile qui requiert de tous une mobilisation accrue pour réaliser une productivité permettant à notre pays de pallier les difficultés économiques et d'atteindre les équilibres souhaités. Le 1er mai constitue une occasion pour rappeler ces valeurs et en particulier pour prendre conscience des défis majeurs auxquels fait face notre économie. La Cité de la culture a accueilli hier les invités à la cérémonie consacrée à la Journée internationale du Travail, en présence des trois présidents Béji Caïd Essebsi, président de la République, Youssef Chahed, chef du gouvernement, et Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée des représentants du peuple. Un événement qui a vu la participation des membres du gouvernement, de personnalités du monde politique, parlementaire, économique et syndical. La cérémonie a été également l'occasion pour honorer plusieurs employés dans la fonction publique, le secteur public et le secteur privé à travers l'octroi de quatre prix, à savoir le Prix de l'employé idéal, le Prix national de la santé et la sécurité, le Prix du progrès social et le Prix des comités consultatifs des entreprises et des représentants des employés. Mohamed Trabelsi, ministre des Affaires sociales, a indiqué dans son discours d'ouverture de la cérémonie que l'Etat n'a jamais renoncé à son rôle régulateur et à ses efforts de redistribution de la richesse dans le but de permettre à chacun l'accès au travail décent et de réaliser la justice sociale et la prospérité économique. Il a souligné que les négociations sociales s'inscrivent dans ce cadre, ajoutant que deux nouveaux cycles de négociations ont démarré le 30 mars 2018 pour le secteur privé, et le 27 avril 2018 pour la fonction publique et le secteur public. Le ministre a fait remarquer que le gouvernement a mis en place une stratégie participative englobant tous les plans et les programmes visant à réduire la pauvreté. Il a signalé qu'une enquête de terrain est en cours pour actualiser la liste des familles indigentes, comme étant le point de départ de la stratégie indiquée afin de mettre à la disposition de l'Etat des données objectives en vue de mieux cibler son intervention au niveau social. Travail décent M. Trabelsi a également évoqué le programme du travail décent pour la période 2017-2020, signé avec le Bureau international du travail en juillet 2017. Les priorités de ce programme concernent le développement économique, le développement régional, l'emploi, la formation professionnelle et la mise en place d'un nouveau modèle des relations professionnelles et du travail décent ainsi que la réforme de la sécurité sociale et l'institutionnalisation du dialogue social. En ce qui concerne les caisses sociales, le ministre a affirmé que ce dossier est inscrit parmi les réformes prioritaires du gouvernement dans le cadre du dialogue et du consensus entre toutes les parties pour maintenir le régime de sécurité sociale et améliorer sa performance. A ce niveau, il a indiqué que les parties sociales œuvrent dans le cadre de la commission tripartite à trouver des solutions consensuelles pour réduire les pressions financières sur les régimes de retraite dans les secteurs public et privé. De même, la santé et la sécurité professionnelle est un axe important dans la vision du ministère des Affaires sociales. Une commission technique a été constituée pour la mise en place d'une stratégie adéquate. Un sondage national a été élaboré pour déterminer une cartographie des risques professionnels en Tunisie, la première en son genre au niveau africain et arabe. Priorités de l'Ugtt De son côté, Noureddine Taboubi, secrétaire général de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt), s'est réjoui du démarrage des négociations sociales dans les temps convenus, estimant qu'il s'agit d'un pas vers la bonne voie. "Nous souhaitons que ces négociations se terminent dans les plus brefs délais et que leurs résultats débouchent sur une amélioration du pouvoir d'achat des employés à cause de l'inflation, la dépréciation du dinar et du marché parallèle", lance-t-il. M. Taboubi a fait observer que le retour au dialogue entre les signataire du Document de Carthage montre que les différentes parties sont encore loin d'incarner les principes sur lesquels elles se sont mises d'accord et de réaliser les objectifs de la révolution pour un développement juste, équilibré et intégré ainsi que pour un travail décent. Il a indiqué que les ressources de l'Etat se sont détériorées à cause de l'évasion fiscale, les entreprises économiques ont subi les effets de l'économie parallèle et l'investissement a baissé. Des conditions qui, selon lui, doivent pousser à unifier les efforts et à privilégier l'interêt commun. Ainsi, il a affirmé que l'Ugtt s'est fixé des priorités nationales sur lesquelles elle mettra l'accent, à savoir la consolidation des établissements publics et l'amélioration de leur performance, le renforcement de la justice sociale et la lutte contre la corruption, la protection de l'économie et des entreprises nationales en faisant face à la contrebande et au marché parallèle, en favorisant le travail décent et en éradiquant le travail précaire ainsi que la régularisation de la situation des retraités. Quid de la productivité ? Pour Samir Majoul, président de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), le 1er mai est une occasion pour rappeler la valeur du travail qui a connu une régression en Tunisie, estimant que les crises ne pourront être dépassés qu'en redoublant d'efforts et en améliorant la production au niveau quantitatif et qualitatif. Il a indiqué que l'amélioration de la productivité est la bonne recette pour pallier toutes les problématiques et pour sortir de la situation économique actuelle. « La productivité est le seul garant de la compétitivité de l'entreprise économique et sa pérennité afin de mieux se positionner sur les marchés internationaux et de créer plus d'emplois, d'être capable de procéder aux augmentations salariales, de permettre une stabilisation du dinar, de maîtriser l'inflation et de créer une valeur ajoutée pour l'économie », rétorque-t-il, ajoutant que l'entreprise économique organisée connaît des difficultés qui entravent sa capacité à investir. « Mettre plus de pression sur l'entreprise organisée ne fera que favoriser le secteur parallèle», affirme-t-il. Du côté de l'Union tunisienne des agriculteurs et de la pêche (Utap), le secrétaire général, Abdelamajid Zar, a mis l'accent sur l'importance du secteur agricole, qui emploie près de 50% de la population active. Il a rappelé la convention-cadre signée avec l'Ugtt, estimant qu'il s'agit d'une avant-première, surtout qu'elle gère les relations de travail dans le secteur agricole, prenant en compte ses spécificités. M. Zar a souligné que l'agriculture offre des opportunités de développement économique surtout dans les régions intérieures, et peut offrir des solutions adéquates pour résoudre la problématique du chômage, notamment parmi les jeunes diplômés.