103 établissements universitaires sont en grève, certains sont complètement bloqués. Le gouvernement refuse de composer avec le jeune syndicat qu'il considère «très peu représentatif», selon le coordinateur général. Ijaba brandit, de son côté, le chiffre de 3.000 affiliés et la Constitution ainsi qu'un jugement du Tribunal administratif qui «oblige le gouvernement à traiter de manière égale avec tous les syndicats dans le cadre de la pluralité syndicale» Le dialogue est complètement rompu entre le ministère de l'Enseignement supérieur et l'Union des professeurs universitaires et chercheurs tunisiens (Ijeba), l'un des syndicats non majoritaires de l'enseignement supérieur. Depuis le 2 janvier dernier, les affiliés à ce syndicat bloquent les notes de leurs étudiants et menacent d'une année blanche. Fondé en 2011, Ijeba a profité de la notion de pluralité syndicale consacrée dans la nouvelle constitution tunisienne et s'érige comme un interlocuteur syndical sérieux, tout comme le Syndicat général des enseignants universitaires. Hier, le syndicat a organisé un point de presse dans lequel il accuse le ministre de l'Enseignement supérieur, Slim Khalbous, de mener une campagne de dénigrement «de basse manœuvre», dont le but est de dévaloriser le mouvement du syndicat Ijaba. Trois revendications «Aujourd'hui, il y a 103 établissements universitaires en grève, certains sont complètement bloqués, à l'instar de l'université de Sfax, l'Institut supérieur de gestion de Gabès ou encore la faculté des sciences de Gafsa. L'Insat est partiellement bloqué. Le ministère doit négocier avec Ijeba à propos des revendications que nous portons», martèle le coordinateur général du Syndicat Najmeddine Jouida. Ijeba porte trois revendications, la principale étant l'adéquation de l'échelle de rémunération avec les diplômes. Ijeba appelle également le gouvernement à considérer l'université et la recherche scientifique comme des priorités nationales et à leur donner tous les moyens nécessaires et, enfin, le syndicat réclame le recrutement d'une partie des 5.000 docteurs au chômage. Malgré ce mouvement qualifié «sans précédent» par les grévistes, Ijeba n'a eu droit qu'à deux réunions «de dialogue» (24 janvier et 20 avril) sans la présence du ministre. Deux réunions pendant lesquelles les deux parties ont fait du surplace. De leur côté, le ministère et le syndicat général relevant de l'Ugtt sont accusés par Ijeba de faire front commun pour court-circuiter le mouvement de grève de Ijeba. Pour preuve, Zied Ben Amor, coordinateur général adjoint de Ijeba, note la création par le syndicat général des enseignants universitaires de «commissions pédagogiques» chargées de faire le travail des universitaires grévistes. «C'est un acte qui ne fait malheureusement pas honneur au travail syndical», déclare Najmeddine Jouida. Les commissions pédagogiques Jusqu'à présent, le gouvernement refuse catégoriquement de composer avec le jeune syndicat qu'elle estime être «très peu représentatif». Ijaba brandit cependant la Constitution et une jurisprudence du Tribunal administratif qui «oblige le gouvernement à traiter de manière égale avec tous les syndicats dans le cadre de la pluralité syndicale». Par ailleurs, Ijeba affirme qu'il dispose de 3.000 affiliés sur les 8.500 enseignants universitaires, ce qui ferait de lui «le premier syndicat». Des chiffres que contestent à la fois le ministère et le syndicat général. L'Union des professeurs universitaires et chercheurs tunisiens appelle le gouvernement à publier, officiellement, les chiffres relatifs aux affiliations dans les deux syndicats. Hier, le secrétaire général adjoint de Ijeba a déclaré que son organisation syndicale s'apprête à porter plainte auprès des tribunaux tunisiens et des institutions internationales pour faire face aux «commissions pédagogiques». «Ces dernières sont semblables à ce qui a été fait en 2005, du temps de la dictature, pour contrer, à l'époque, des grévistes», dénonce Najmeddine Jouida. Hier, Ijaba a déposé auprès du ministère de l'Enseignement supérieur ce qu'il a appelé «une demande officielle de négociations sérieuses».