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« Investir davantage dans le capital humain »
Entretien avec… Tony Verheijen, Responsable des opérations de la Banque Mondiale pour la Tunisie
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 10 - 2018

Que mesure l'indice du capital humain que la Banque Mondiale vient de lancer ?
L'Indice du capital humain (ICH) est comparable comme approche à l'indice Doing Business. L'indice mesure, en pourcentage, le niveau de productivité qu'un enfant né aujourd'hui peut espérer atteindre à l'âge de 18 ans. En d'autres termes, cet indicateur évalue la productivité d'un enfant né aujourd'hui, intégrant le système éducatif et sanitaire actuel du pays, lorsqu'il atteindra l'âge adulte, par rapport à sa productivité potentielle, s'il suivait une scolarité complète et vivait en pleine santé. Pour la Tunisie, l'indice (ICH) est de 0.51. Cela revient à dire qu'un enfant né aujourd'hui avec les systèmes éducatif, de protection sociale et de santé actuels, va être productif de 51% uniquement par rapport à sa productivité potentielle. Pourquoi la Banque mondiale a décidé de lancer cet indice ? En effet, un rapport intitulé Wealth of Nations qui définit les facteurs déterminants pour le développement économique d'un pays et qui a été publié l'année dernière par la BM a fait ressortir le facteur humain comme facteur déterminant pour le développement économique des pays. Il représente 70% du PIB pour les pays les plus développés et 50% du PIB pour les pays en voie de développement. Pour la Tunisie, la contribution du facteur humain dans la croissance économique s'élève à 55% du PIB. Ce qui est assez élevé, en comparaison des autres pays de la région, notamment le Maroc, dont le facteur humain représente 41% du PIB. Ainsi, il est important pour la Tunisie d'investir davantage dans le capital humain, pour améliorer son indice, étant donné que le facteur humain joue un rôle important dans le développement économique.
Peut-on estimer le coût du désinvestissement d'un Etat dans le capital humain ?
Pas en termes exacts. Mais, en observant le potentiel de productivité d'un enfant né aujourd'hui, on trouve que la capacité de production d'un Tunisien est de 51% de son potentiel de productivité, lorsqu'il sera âgé de 18 ans. Si on multiplie cet indice par 55%, qui représente le taux de contribution du facteur humain dans le PIB en Tunisie, on pourrait faire un calcul hypothétique du coût d'un faible investissement dans le capital humain sur l'économie nationale. Nous ne l'avons pas fait, mais en tout cas, c'est estimable.
Quelles sont les composantes de l'indice du capital humain ?
Tout d'abord, il faut noter que l'indice est quelque chose d'évolutif. Et à l'instar du classement Doing Business dont le calcul ne cesse d'évoluer depuis son lancement, la mesure de l'indice de capital humain va également évoluer et s'améliorer au cours du temps. Pour ce faire, nous discuterons avec les gouvernements membres, lors des assemblés annuelles, de cet indice et nous allons prendre, évidemment, en considération les remarques synthétisées. L'indice est calculé sur la base de 5 composantes. Le premier sous-indice consiste à évaluer les facteurs déterminants pour la survie d'un enfant depuis sa naissance jusqu'à l'âge de 5 ans. La Tunisie est bien performante au niveau de cette composante. Ensuite, il y a la composante éducation déclinée en deux sous-composantes, à savoir la moyenne des années de scolarisation jusqu'à l'âge de 18 ans et la qualité de l'apprentissage, qui est évaluée en se basant sur les tests d'évaluation reconnus à l'échelle mondiale. La moyenne des années de scolarisation en Tunisie est de 10.2 années sur 18. Ce chiffre est ensuite ajusté par le deuxième facteur relatif à la qualité de l'apprentissage dans le système éducatif tunisien. Le résultat final obtenu est que le nombre des années d'apprentissage réel d'un enfant en Tunisie à l'âge de 18 ans est de 6,3 années. Et c'est ce facteur qui est relatif à l'éducation qui tire le classement de la Tunisie vers le bas. La quatrième composante constitue le taux de survie de la population adulte durant ses années productives, c'est-à-dire entre 15 et 60 ans. Pour la Tunisie, ce taux est de 91%, ce qui la hisse parmi les pays à haut revenu, en termes de taux de survie de la population adulte. Cette composante est importante dans la mesure où elle permet d'évaluer les programmes de santé et de nutrition ainsi que l'impact de la santé d'une population sur sa productivité. La 5e composante représente le taux des enfants de moins de 5 ans atteints par un retard de croissance. En somme, la Tunisie a enregistré de bonnes performances au niveau de trois composantes sur l'ensemble des cinq. Toutefois, elle connaît des problèmes au niveau de l'éducation.
Quels sont les problèmes qui ont été définis dans le système éducatif en Tunisie ?
Tout d'abord, il y a un véritable problème d'accès à l'éducation préscolaire. A cet égard, la BM a travaillé, durant ces dernières années, en collaboration avec l'Unicef, pour valoriser l'enseignement préscolaire. Les cinq premières années de la vie d'un enfant sont déterminantes par la suite pour sa productivité. Et il est reconnu que l'éducation de la petite enfance est extrêmement importante. La Tunisie a un taux très faible de scolarisation de la petite enfance. S'y ajoute une assez mauvaise qualité d'enseignement. A cet effet, nous avons lancé, il y a quelques semaines, avec le ministère de la Femme, la Famille, de l'Enfance et des Personnes âgées une stratégie intégrée de développement de la petite enfance. Le deuxième problème qui se pose, c'est l'abandon scolaire au secondaire. A vrai dire, le taux de décrochage scolaire au primaire est très faible. Par contre, il est assez élevé au lycée. Le troisième problème, c'est la faible qualité de l'enseignement qui est due essentiellement à un manuel scolaire d'enseignement qui n'est pas adapté. Mais, elle est également due à l'absence de formation professionnelle pour les enseignants. Ces trois facteurs sont à l'origine du faible score de l'indicateur relatif à l'éducation.
Pourtant la Tunisie était parmi les pays pionniers à adopter une stratégie solide à l'aube de son indépendance en matière d'éducation. Pourquoi la qualité de l'éducation en Tunisie s'est alors détériorée ?
Je pense qu'en premier lieu, l'objectif des programmes élaborés dans les années 50 et 60 était d'assurer un accès à l'éducation pour tout le monde. Il n'y avait pas, alors, des études qui démontrent l'importance de l'éducation de la petite enfance. A cette époque-là, la Tunisie a beaucoup, investi dans l'éducation primaire et secondaire. Cependant, le pays n'a pas fait évoluer son système éducatif et a gardé un système traditionnel. En deuxième lieu, il y a des problèmes liés aux programmes enseignés. Il n'y a pas eu, en outre, une véritable adaptation des programmes enseignés de façon à seoir les compétences que les élèves sont appelés à acquérir aux exigences d'une nouvelle économie moderne. Les divers concours internationaux servent d'évaluation comparative des systèmes éducatifs dans les pays à travers le monde. Nous nous basons sur ces tests et examens reconnus à l'échelle mondiale, pour évaluer les programmes enseignés et voir si les compétences acquises par les élèves sont en adéquation avec la demande du marché de l'emploi. La Tunisie a maintenu un système d'éducation traditionnel, ce qui s'est traduit par la suite par un problème de chômage puisant son origine dans l'inadéquation entre la demande du marché de l'emploi en matière de compétences et ce que le système éducatif offre. En troisième lieun il y a le volet relatif à la formation des enseignants. Durant ces dernières années, le recrutement des enseignants qui n'ont pas eu une formation professionnelle adéquate a posé un véritable problème. Je pense qu'avec le programme lancé par le ministère de l'Education, il est possible de remédier à la situation. Cela dit, en Tunisie le droit à l'éducation est un acquis. Maintenant, il faut améliorer la performance du système éducatif en renforçant d'un côté la qualité de l'enseignement et d'un autre côté l'accès à l'éducation pour la petite enfance.
Les problèmes liés à la santé, à l'éducation et à la protection sociale, empirent d'une année à l'autre, notamment durant ces dernières années. Peut-on dire que la Tunisie aurait pu enregistrer un Indice du capital humain (ICH) plus élevé avant la révolution ?
A vrai dire, nous ne pouvons pas, éventuellement, estimer cela, étant donné que le capital humain constitue un processus en perpétuelle évolution. Cependant, on peut noter qu'un retard a été enregistré au niveau du lancement du programme de formation des enseignants. Ce retard peut être imputé aux perturbations qui ont eu lieu après la révolution. Mais pour les autres composantes, je ne pense pas qu'il y ait une corrélation avec les événements qui ont eu lieu après 2011. Maintenant, notre priorité dans le domaine de la sécurité sociale, est d'assurer aux enfants issus des familles vulnérables l'accès à l'éducation préscolaire et de baisser le taux de décrochage scolaire. Selon les recensements dont nous disposons, il y a environ 900 mille familles qui devraient bénéficier des programmes d'assistance sociale. Jusque-là, seulement 400 milles familles s'y sont inscrites.Le ministère des Affaires sociales déploie de grands efforts pour adapter ces programmes, et ce, en élaborant un cadre juridique et en recadrant les programmes.
Quelle est la position de la Tunisie, dans le classement de l'Indice du capital humain ?
A vrai dire, le classement se fait en comparaison des pays similaires. En comparaison des autres pays de la région Mena, l'indice de la Tunisie est en dessous de la moyenne enregistrée par l'ensemble des pays de la région. Pour la Tunisie, le facteur humain contribue d'une manière très importante dans l'économie nationale. C'est pour cette raison que la Tunisie est appelée à améliorer son indice du capital humain. Et le gouvernement tunisien était parmi les 28 pays précurseurs qui se sont engagés à établir un programme de renforcement du capital humain.
L'élaboration du programme de renforcement du capital se fait-il exclusivement avec la Banque mondiale ?
L'élaboration du programme se fait conjointement avec la Banque mondiale, mais également avec d'autres partenaires, tels que l'Unicef, l'OMS, l'UE, etc. Ce n'est pas un programme de la Banque mondiale, mais c'est une initiative mondiale. L'objectif est de rendre cette vision un élément fédérateur qui attire davantage de partenaires pouvant fournir des appuis techniques et financiers. Nous avons déjà entamé, avec le gouvernement des stratégies dans le cadre du programme de renforcement du capital humain, à l'instar de la stratégie intégrée de la petite enfance, qui a été lancée depuis quelques semaines et qui représente à mon sens l'un des éléments clés qui vont aider la Tunisie à améliorer son indice du capital humain. Le renforcement de la protection sociale et le programme de formation des enseignants lancé par le ministère de l'Education figurent parmi les éléments sur lesquels nous pouvons nous focaliser avec le gouvernement.
L'objectif de ce programme est d'améliorer l'indice du capital humain pour les générations futures. Toutefois, sa mise en œuvre se fait dans la durée et ne pourrait pas aider la Tunisie à surmonter sa crise économique dans l'immédiat.
En effet, l'une des raisons pour lesquelles la Banque considère cet indice comme une priorité pour le développement, c'est exactement cette question-là. Il est difficile pour les gouvernements, notamment en défaut de ressources financières, d'investir davantage dans le capital humain, parce que ça ne se traduit pas par des résultats immédiats. Ainsi, les pays à faibles et à moyens revenus n'investissent pas suffisamment dans le capital humain, ce qui retardera leur croissances et leur développement économique. Donc, la réponse est oui, les résultats ne sont pas immédiats, mais si on n'entame pas les stratégies maintenant, la situation empirera davantage. Le facteur qui permettra à un pays ayant de faibles ressources naturelles comme la Tunisie d'avancer c'est le capital humain. Il faut y investir pour avancer, même si nous n'aurons pas de résultats dans l'immédiat. Nous avons apprécié le fait que les autorités tunisiennes ont intégré cette vision. Et je pense que cela rejoint ce que vous avez dit au début : il est dans l'esprit et dans l'histoire de ce pays d'investir dans le capital humain.
L'Indice du capital humain (ICH) mesure en pourcentage le niveau de productivité qu'un enfant né aujourd'hui peut espérer atteindre à l'âge de 18 ans. Cet indicateur a été lancé par la Banque mondiale lors du sommet annuel tenu à Bali jeudi dernier, 11 octobre.
L'ICH de la Tunisie est de 0.51. Il est en dessous de la moyenne enregistrée dans la région.
Le nombre des années d'apprentissage réel en Tunisie à l'âge de 18 ans est de 6,3 années. Le décrochage scolaire au secondaire et la faible qualité de l'enseignement et de l'apprentissage sont les principales raisons.
Augmenter le taux d'accès à l'éducation préscolaire et assurer une formation pour les enseignants sont en point de mire.


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