Instructeur-entraîneur, conseiller de longue date de la FTF et Directeur Technique National, Sghaier Zouita s'active actuellement à organiser la politique fédérale au niveau de la formation des cadres et de la promotion du football de haut niveau. De la formation au perfectionnement en passant à la coordination des actions, rien n'échappe à cet instructeur chevronné qui ne jure que par la cohérence des projets sportifs. Interview et éclairage de la part de cet expert hors-pair qui a aussi endossé par le passé la casaque de directeur général de Ahly Jeddah où il a en partie dirigé un «think-thank» en vue de promouvoir le sport-roi au sein de ce prestigieux club. Son rôle de concepteur des programmes de travail du DTN concerne, de très près, le développement du football dans tout le pays, quoiqu'accentué en particulier sur l'élite et les équipes nationales. A la Fédération tunisienne de football, c'est aujourd'hui Sghaïer Zouita qui occupe ce poste après le départ de Youssef Zouaoui à l'issue de la Coupe du monde 2018. Sghaïer Zouita, 50 ans, était joueur à l'Olympique du Kef durant une bonne dizaine d'années. Il est détenteur d'un doctorat d'Etat en éducation physique, instructeur d'entraînement à la CAF, instructeur auprès de la Fifa et consultant au service de l'Ajax d'Amesterdam et du Sporting de Lisbonne. Aujourd'hui, il est notre invité pour nous parler de l'Equipe nationale, d'Alain Giresse et d'autres sujets liés à ses fonctions. Interview. Pourquoi en Tunisie, l'apport du directeur technique national n'est-il suffisamment pas connu par le public ? Le DTN n'est pas censé médiatiser ce qu'il fait comme travail. D'ailleurs, il ne peut pas trouver le temps pour le faire, tellement la charge du travail qui l'occupe est énorme. Son rôle, consistant essentiellement à suivre de près les activités des équipes nationales, toutes catégories confondues, et celles des clubs (en retrait), à promouvoir et à développer le football dans tout le pays et tant d'autres activités, ne lui permet pas de réserver du temps pour les médias. Sauf rarement. Peut-on affirmer que le DTN a vraiment son mot à dire à la FTF et que ce qu'il trace comme politique ou plan de travail est appliqué? Tout à fait et sans l'ombre d'un doute : depuis 2016, lorsque j'ai été désigné comme DTN adjoint avec Youssef Zouaoui, tout ce que nous avons suggéré à la fédération a été mis en exécution sans la moindre tergiversation. Nous travaillons en parfaite symbiose à la FTF. Bien évidemment, notre devise reste toujours le dialogue et la concertation sur tous les objectifs visés. D'ailleurs, je considère que le travail collégial est la devise de toute réussite. «Giresse a le profil qui convient à l'équipe nationale» Venons-en maintenant à la question qui intéresse tous les Tunisiens : sur quelle base avez-vous tranché à la FTF en faveur d'Alain Giresse pour veiller aux destinées de notre équipe nationale ? Giresse, comme tout un chacun le sait, est l'un des meilleurs produits du football français et de l'équipe de France de tous les temps. Et en ce qui concerne sa carrière d'entraîneur, il s'agit de quelqu'un qui a roulé sa bosse un peu partout avec des équipes nationales africaines (Gabon, Mali, Sénégal) durant les dix dernières années. C'est, donc, d'un fin connaisseur de la réalité du football africain qu'il est question. Sa riche expérience africaine a largement plaidé en sa faveur lors de l'opération de choix effectuée au sein de la FTF. Ne serait-il pas quand même sur une chaise éjectable comme ses prédécesseurs, surtout avec son contrat de 18 mois seulement (quoique renouvelable) qui ne permet pas le travail de longue haleine escompté pour notre «onze» national? Ce bail de 18 mois a été fait d'un commun accord avec Giresse et il n'y a pas le moindre mal à cela. L'essentiel, c'est que Giresse est convaincu du fait qu'il n'est pas tenu de tout démolir pour reconstruire l'équipe nationale. Au contraire, il juge que le travail effectué par Nabil Maâloul (en particulier) n'est pas négligeable et qu'on peut broder dessus comme on dit. Du coup, sa tâche ne sera pas ardue et les résultats positifs vont, normalement, suivre et conduire au renouvellement. Ce ne sera donc pas un contrat assorti d'objectifs à atteindre, faute de quoi il ne sera pas reconduit? Ce n'est pas tout à fait cela. La première évaluation du travail de Giresse sera effectuée après la prochaine Coupe d'Afrique des nations. La préservation, voire l'amélioration de notre rang dans le classement mondial des nations, sera également un indicateur d'évaluation. Mais c'est surtout la qualité du jeu et la compétitivité de notre équipe nationale qui vont être déterminants dans la suite de l'aventure avec Giresse. Il ne faut pas oublier que le bon relationnel dont dispose ce coach à l'échelle internationale a également influé sur notre choix sans parler de l'avantage de la langue et du fait que ce technicien connaît tous nos joueurs évoluant à l'étranger. «La libre circulation des joueurs maghrébins est une bonne chose» Ne faudrait-il pas asseoir une politique de coordination et d'uniformisation d'une ligne de conduite à adopter entre le coach national et ceux des grands clubs en Tunisie dans le but d'améliorer la qualité de notre football? Cela va être l'une des priorités à mettre en application, dans la mesure où dès le début du mois de janvier, nous allons entrer en contact avec les clubs et leurs entraîneurs en vue de mettre en place une nouvelle stratégie de travail dont la finalité sera de servir l'intérêt des élites nationales et l'amélioration du niveau de notre football. On parle, ces derniers temps, de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation inter-maghrébine qui régira la libre circulation des footballeurs au sein de tous les pays maghrébins et la levée des contraintes actuelles. Qu'en pensez-vous? Pour moi, c'est une initiative louable, puisqu'elle va donner plus de chances aux joueurs des pays maghrébins d'exceller en dehors de leurs pays et de monnayer leur talent. Pourvu que les opérations de recrutement soient bien étudiées et en conformité avec les règlements de la Fifa, et ce, pour l'intérêt commun des joueurs et des clubs. Ne pensez-vous pas que cela risquerait de se faire aux dépens des jeunes talents ? Au contraire, la libre-circulation va créer une nouvelle dynamique qui va catalyser tout le monde : jeunes et moins jeunes à travailler plus pour exceller et sortir vainqueur d'une concurrence loyale et motivante. De toutes les manières, une période d'essai sera nécessaire, après quoi, on verra si l'on doit maintenir l'expérience ou l'abandonner.