La cinémathèque tunisienne consacre un cycle à Agnès Varda du 8 au 13 janvier sous le signe «l'éternelle jeunesse d'Agnès Varda».Une grande dame du cinéma français dont la filmographie reste difficile d'accès dans beaucoup de pays. L'ouverture de ce cycle a eu lieu avec le film «Sans toit ni loi» (1985). Voici un thème auquel Varda était particulièrement sensible: les sans-abri, les marginaux et les exclus. Le choix de la thématique engagée de cette réalisatrice nous renvoie déjà à l'actualité brûlante en France qui est la révolte de ceux qui se sentent exclus, ce qui ne fait que souligner le titre choisi par les programmateurs «l'éternelle jeunesse d'Agnès Varda». Une jeune fille vagabonde (Mona ) est trouvée dans un fossé, morte de froid, au pied de deux cyprès jumeaux. C'est un simple fait divers. Que pouvait-on savoir d'elle et comment ont réagi ceux qu'elle a croisés sur sa route, dans le sud de la France, cet hiver-là ? La cinéaste trace ensuite le portrait de Mona à travers un ensemble de points de vue différents sans l'enfermer dans un portrait univoque laissant cette liberté au spectateur de vivre ses émotions (dégoût ou tendresse d'ailleurs) face aux actes du personnage. Le film a une dimension documentaire assumée mais cela ne l'empêche pas d'être une fiction au style bien travaillé et très particulier à la cinéaste qui a cultivé la notion de «ciné- écriture». Nous pensons que la façon dont la réalisatrice mêle documentaire et fiction, acteurs professionnels et non professionnels est l'un des points forts de ce film qui n'a pas pris une ride. Un personnage qui traverse des espaces différents et dont la force réside justement dans son ambiguïté et son ambivalence. Un personnage qui prend un chemin, est-ce celui de la liberté ou de la solitude? Être libre est un acte qui se paie et la révolte n'a pas forcément des conséquences heureuses. L'ensemble des témoignages constitue un portrait kaléidoscopique et fait de Mona un personnage très «glissant». Une écriture et une construction qui ne jugent pas le personnage mais qui le laissent se définir par tous ceux qui le regardent passer. Actuelle Varda aujourd'hui ? À notre sens oui ! Et ses films ne semblent pas avoir pris une ride non seulement parce que son écriture filmique reste toujours fraîche mais aussi parce que sa profonde connaissance de la condition humaine nous renvoie vers tous les thèmes qui agitent notre société aujourd'hui : xénophobie, exclusion, marginalisation et solitude.