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«L'agriculture fait face à des défis de taille…»
Entretien avec Aram Belhadj, universitaire
Publié dans La Presse de Tunisie le 15 - 01 - 2019

L'agriculture tunisienne est aujourd'hui à la croisée des chemins où les choix ne sont pas toujours aisés. Entre des problèmes récurrents, la nécessité de moderniser le secteur et les enjeux posés par l'Aleca, le secteur fait face à un défi de taille. Il appartient à l'Etat de le relever avec les moyens les plus appropriés. Interview.
Quelle est votre lecture du secteur agricole en Tunisie ?
La situation économique et financière du pays connaît des hauts et des bas depuis plusieurs années. L'agriculture a tenu bon à ces fluctuations. Ce secteur, qui semble maintenant s'être redressé, reste important pour une économie comme la nôtre et vital pour son développement. Il continue, aujourd'hui, à sauver la croissance économique du pays dans cette période de vaches maigres où rien ne va dans le bon sens et où il aurait fallu prendre des décisions courageuses et parfois douloureuses.
Avec près de 16% de la population active occupée et une contribution au PIB de 13 %, l'agriculture conserve une importance sociale et économique indéniable. Le secteur attire 10% du total des investissements. De même, la participation du secteur agricole dans les exportations tunisiennes n'est pas en reste : elle est chiffrée à hauteur de 11% au titre de l'année 2017. En comparaison du secteur touristique qui peine à redresser la barre, les agriculteurs sont moins endettés que les hôteliers qui ne contribuent qu'à hauteur de 6% au PIB. Les créances des premiers s'élèvent à 1.400 millions de dinars dont 1.000MDT d'intérêts cumulés (8% de l'endettement de l'économie) alors que les unités touristiques traînent, depuis plus de 20 ans des créances douteuses estimées à 6.000MDT.
D'autre part, malgré l'importance de ce secteur et l'impact positif qu'il a eu sur l'économie nationale, on constate un potentiel inexploité considérable en matière de croissance. Plusieurs facteurs poussent vers ce constat : l'emplacement géographique privilégié de la Tunisie, la température du pays qui est favorable surtout à la production et la multiplication végétative et le grand nombre de jours ensoleillés qui sont favorables aux activités agricoles (la Tunisie dispose d'un taux d'ensoleillement dépassant 3.000 heures par an). Donc, tous les ingrédients sont réunis pour rendre à l'agriculture ce qui est à l'agriculture et améliorer sa contribution, ce qui reste un objectif atteignable, même dans ces conditions difficiles. On n'a pas besoin d'une baguette magique pour développer ce secteur, il suffit de bien exploiter le potentiel énorme que le pays possède.
Les problèmes du secteur sont-ils récurrents ?
Oui ! Malheureusement, depuis des décennies, les problèmes auxquels est confrontée l'agriculture tunisienne sont récurrents. On peine à trouver des solutions radicales à ces anciennes difficultés à l'heure où de nouveaux problèmes apparaissent. Ceci est dû à l'absence d'une vision claire pour développer ce secteur. Les gouvernements qui se sont succédé depuis l'Indépendance ne sont jamais parvenus à mettre en place des stratégies claires et efficientes pour l'agriculture.
Il y a tout d'abord le problème de la dégradation des sols qui a été généré par le morcellement des terrains, les problèmes liés à l'octroi des terres domaniales agricoles, l'invasion urbaine, la modification du paysage rural, la pollution, la désertification, la salinisation…Il y a aussi les problèmes liés à l'eau ; la Tunisie est l'un des pays de la Méditerranée les moins pourvus en ressources hydriques. La crise d'eau est un épineux problème qui préoccupe de plus en plus les décideurs, les agriculteurs et les citoyens. Malheureusement, pendant ces dernières années, les autorités ont abandonné leur rôle quant à l'information et la rationalisation des ressources. Aujourd'hui, on se retrouve face à plusieurs nouveaux phénomènes comme l'anarchie, le gaspillage et la surexploitation des nappes phréatiques dus à des forages et pompages illicites…
D'autre part, il existe des problèmes liés aux facteurs de production, particulièrement les intrants relatifs aux semences et aux engrais. Leur coût pèse lourd car ces produits, majoritairement importés, ont accusé une hausse remarquable induite par le glissement du dinar tunisien. Quant à la main-d'œuvre, elle est de plus en plus rare, et lorsqu'elle existe, elle est sous-qualifiée. On est toujours dans le cercle vicieux d'une agriculture classique qui mise sur des produits non intensifs en innovation et technologies, à l'instar de l'huile d'olive et des dattes.
Il ne faut pas oublier non plus la question du financement. Et pour cause, la proportion d'agriculteurs bénéficiant de prêts bancaires qui ne dépasse pas les 7%, pour des raisons liées à la faible marge bénéficiaire, les sécheresses fréquentes…Ajoutons à cela les taux d'intérêt très élevés sur les prêts bancaires, surtout que l'investisseur agricole supporte des coûts énormes. En parallèle, il y a absence d'assurance contre les risques. Selon les derniers chiffres, la part des agriculteurs ayant une couverture assurantielle ne dépasse guère les 8%. Ce faible chiffre est justifié par deux facteurs essentiels, à savoir : le morcellement des terres ainsi que le coût élevé de l'assurance. D'autres raisons viennent s'ajouter, telles que la très faible communication sur ce service et l'existence d'une certaine aversion à l'assurance.
Enfin, on ne peut éluder le problème de la gouvernance du secteur. Et à ce stade, il est clair que l'Etat, le secteur privé et la société civile doivent jouer pleinement leur rôle dans la mise en valeur de l'agriculture en tant qu'instrument de développement, surtout que jusqu'au jour d'aujourd'hui, il y a absence d'une stratégie claire et précise capable d'aider à la prise de décision et à la mise en œuvre de politiques claires et linéaires.
L'agriculture tunisienne pourrait-elle tenir à la concurrence prévue par la libéralisation des échanges des produits agricoles avec l'Europe (Aleca) ?
L'enjeu est grand et les risques sont énormes ! En l'état actuel des choses, l'Aleca représente une menace pour l'agriculture, la main-d'œuvre et les produits agricoles tunisiens qui nécessitent une mise à niveau avant d'être soumis à la concurrence européenne. Faut-il rappeler dans ce cadre que le marché européen a mis en place une politique agricole commune depuis bien longtemps, subventionne énormément ses produits agricoles, utilise la haute technologie dans la production…alors qu'il n'en est rien en Tunisie (sauf quelques exceptions). Soyons réalistes ; on est incapable de concurrencer le marché européen. De plus, nos agriculteurs ne comprennent pas les enjeux de cet accord, notamment sur plusieurs secteurs et produits comme le lait, les pommes de terre, les légumes et les arbres fruitiers. D'où la nécessité de multiplier les campagnes de sensibilisation (surtout dans les régions) pour aider ces agriculteurs à comprendre cet enjeu de taille. Il est, également, indispensable de concevoir un plan d'action visant à défendre les intérêts des agriculteurs tunisiens. Ainsi, face à un secteur qui demeure fragile, des efforts notables doivent être déployés, notamment en termes de modèle de croissance souhaité, des filières et des structures à protéger, du type d'assistance financière à fournir et des marchés et des niches cibles à développer…
A ce titre, il est vrai qu'on a des niches sur lesquelles on peut concurrencer les Européens, à l'instar de l'huile d'olive, des dattes, des produits biologiques…C'est pour toutes ces raisons, et avant de prendre la décision de l'ouverture, il est impératif de préparer le terrain et de fixer les critères de la concurrence et surtout de bien négocier.
Quelles sont vos recommandations pour une agriculture moderne ?
Avoir une vision stratégique globale est la condition sine qua non pour la réforme et le développement de l'agriculture tunisienne. Il est ensuite facile d'établir des stratégies et des politiques, avec des objectifs clairement définis dès le départ. Tout cela aide à identifier les contours du modèle de croissance souhaité pour ce secteur. Bien entendu, tout un écosystème doit être mis en place pour pouvoir surmonter tous les problèmes que rencontre ce secteur.
Il est, également, temps de tirer des leçons du passé et d'élaborer une véritable politique agricole moderne qui aura pour objectif de produire plus avec moins de ressources et d'utiliser des technologies respectueuses de l'environnement.


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