C'est surtout l'inflation sous-jacente qui est inquiétante car elle devrait poursuivre sa courbe ascendante au cours de la prochaine période dans la mesure où les différents indicateurs inflationnistes pourraient évoluer. Un suivi des sources de l'inflation doit se faire de près en prenant, au besoin, des mesures pertinentes pour contrecarrer son aggravation. Le taux directeur est passé de 6,75% à 7,75%, soit une augmentation de 100 points, ce qui va avoir incontestablement des répercussions sur la valeur des crédits. En effet, à l'issue de la réunion périodique de la Banque centrale de Tunisie (BCT), tenue les 16 et 19 février, le conseil d'administration a justifié la décision d'augmenter le taux directeur par la nécessité de faire face à la poursuite des pressions inflationnistes qui représentent un risque pour l'économie et une menace pour le pouvoir d'achat. D'où l'obligation de prendre des mesures appropriées de nature à réduire les effets négatifs de cette inflation. A noter que depuis 2016, des mesures ont été prises au niveau de la politique monétaire, ce qui a permis une décélération relative du rythme de l'inflation durant le mois de janvier de cette année. Ainsi, le taux d'inflation a été ramené à 7,1% au lieu de 7,3% en moyenne au cours de l'année 2018. Les perspectives des pressions inflationnistes sont, cependant, source de préoccupation du conseil d'administration de la BCT. Indicateurs inflationnistes C'est surtout l'inflation sous-jacente qui est inquiétante car elle devrait poursuivre sa courbe ascendante au cours de la prochaine période dans la mesure où les différents indicateurs inflationnistes pourraient évoluer. Un suivi des sources de l'inflation doit se faire de près en prenant, au besoin, des mesures pertinentes pour contrecarrer son aggravation. De son côté, l'Utica a été surprise, de nouveau, par la décision de la BCT d'augmenter le taux directeur de 100 points pour passer à 7,75% par an, ce qui correspond à la troisième hausse en moins d'une année et demie. L'Utica considère que cette mesure ne constitue pas une solution aux problèmes que vit notre économie nationale. Il s'agit, tout simplement, d'une politique de fuite en avant au lieu de rechercher des solutions sérieuses aux difficultés. L'idéal serait, selon l'organisation patronale, l'arrêt de la dépréciation du dinar, la maîtrise de l'inflation qui lèse l'entreprise économique et la lutte contre le commerce parallèle et la contrebande. L'Utica souligne, à travers son président, Samir Majoul, que cette décision aura des répercussions négatives sur le rythme des investissements et va augmenter le coût de financement pour les entreprises vu que le coût des crédits va évoluer de près de 15% qui sera ajouté aux dernières augmentations consécutives. Aucune entreprise n'est en mesure de supporter ces charges et sa capacité d'honorer ses engagements auprès des institutions bancaires et financières seront amoindris, ce qui devrait aggraver les difficultés de sa gestion. Besoin de stabilité L'organisation patronale exprime, de nouveau, son refus des décisions unilatérales qui ne tiennent pas compte de la situation difficile des entreprises économiques et prévient les parties concernées des risques encourus en conséquence aussi au bien au niveau économique qu'au niveau social dans un contexte où le pays a besoin de stabilité politique et sociale et d'une consolidation des capacités compétitives de l'entreprise économique. Il est nécessaire, également, de prendre les mesures nécessaires susceptibles de relancer l'investissement et d'encourager la création de projets générateurs de postes d'emploi. Selon Mohamed Hammadi Jarraya, expert en économie et président de l'observatoire Tunisia Progress «la BCT court derrière l'inflation, sans la rattraper !» Et d'ajouter: «Habituellement, le taux directeur «TD» est régulé par la BCT pour amortir l'effet d'une inflation structurelle et parfois même galopante. Le mécanisme s'inspire du TMM. Le TD est appliqué par les établissements de crédit, avec une marge jusqu'à 4% sur les crédits accordés à leurs clients. En effet, la BCT, pour la nième fois, vient d'élever le TD de 6,75 % à 7,75%. D'après l'INS, le taux d'inflation a baissé de 7,5% à 7,1% en janvier 2019. Les bonnes raisons ne sont pas claires. Certains experts évoquent un changement de l'année de référence pour le calcul de ce taux !» Notre interlocuteur souligne, cependant, que logiquement l'augmentation du TD par la BCT devait être décidée quand l'inflation était à 7,75% et non plus maintenant ! Il précise: «Certes, l'effet de la hausse du TD impacte plutôt négativement l'économie. Ce qui explique la prudence de la BCT, durant les derniers mois de 2018, en décidant le passage à 6,75% uniquement». M. Jarraya pense que l'impact de cette nouvelle hausse est multiple : — Pour les crédits encours de paiement (entreprises et ménages), une révision rétroactive des échéanciers, pour la partie encours, engendrera une charge financière supplémentaire impactant le pouvoir d'achat des salariés — Pour les nouveaux investissements, un surcoût dans les schémas et business-plans réduisant une profitabilité (rendement, TRI) devant être, plutôt, plus attrayante. La décision de passer à la réalisation risque d'être compromise ou reportée à des jours meilleurs. — Pour la consommation, un frein (rationalisation) dans le but d'alléger la demande exagérée sur la liquidité en circulation et le marché des capitaux — Pour les banques et établissements de crédit, un enrichissement gratuit et non mérité sur des anciens crédits et produits financiers. L'expert prévient que « dans le contexte économique actuel, l'inflation risque bien de s'aggraver et le dinar continuera sa chute, alimentant une inflation importée plus lourde. Les augmentations salariales, profitant uniquement aux syndicalistes, engendre l'augmentation des prix de consommation. Cependant, la chute du pouvoir d'achat concerne et porte préjudice à toute la population. Cette injustice sociale doit être résolue par des mesures équitables. L'action de la BCT, solitaire, ne pourra jamais rattraper l'inflation réelle, estimée à environ 9%». Quelle solution pour amortir cette crise ? M. Jarraya est clair : «A mon avis, il faut concevoir, rapidement, un plan Marshall de sauvetage engageant activement tous les ministères en relation avec l'économie. Parmi les premiers objectifs de ce plan : la relance de l'économie et le contrôle des prix. Cette mesure est plus efficace et plus équitable que les augmentations salariales».