A Dar Echaraâ en plein centre de la Médina de Sousse, et dans un cadre architectural patrimonial pittoresque, le Pr Elyès Dardour , titulaire d'un master en sciences islamiques, a présenté tout récemment sa dernière publication historique rédigée en langue arabe intitulée : Sousse depuis l'époque des Aghlabides installés en Tunisie en l'an 800 après J.C jusqu'à l'établissement du protectorat français en 1881 en Tunisie. En présence d'un public restreint, mais intéressé, l'orateur s'est évertué à fournir un aperçu historique exhaustif richement documenté et savamment illustré du passé civilisationnel de cette ville côtière jalousement surnommée la "Perle du Sahel". Le conférencier s'est étalé sur les péripéties de l'histoire, a remonté le temps, a fait la chronologie minutieuse et a fouillé au fin fond des civilisations qui se sont succédé dans cette ville portuaire. La publication de 286 pages, renferme six chapitres, relatant les différents moments historiques par lesquels est passée la ville de Sousse avant la conquête musulmane.En guise de prélude, l'auteur est remonté très loin dans l'histoire pour parler de cette cité durant toute la période punique, au temps des Phéniciens suivis des Romains, des Vandales et des Bysantins. Il a présenté avec brièveté et concision les composantes des 6 grands chapitres de l'œuvre. Le premier volet s'est intéressé à la première expédition musulmane à Sousse, puis il a enchaîné avec l'installation des Aghlabides durant des années 800-909. Dans le second chapitre, il a focalisé sa recherche sur la période des Fatimides (909-971 après J.C.). Notre historien a tenu à préciser que la ville de Sousse a perdu de son rayonnement au profit de la ville de Mahdia, capitale des nouveaux conquérants d'Ifrikya. Ces derniers lorgnaient vers la conquête de l'Egypte et l'avaient tellement négligée quelle avait été assiégée et brûlée par les insurgés contre les souverains. Dans le troisième chapitre, il a été question de l'ère sanhajite (971-1160). Il a remarqué que la ville côtière a retrouvé son essor économique, urbain et culturel après le départ des Fatimides en Egypte et l'arrivée de leurs vassaux, les Zirides de Sanhajas. El Moëz Ibn Badis Sanhaji fit, durant plus de 40 ans, tout son possible pour moderniser la cité. Mais ce renouveau ne dura pas longtemps. Les Hilaliens, dépêchés par les Fatimides pour punir les Sanhajites, coupables d'insoumission, débarquèrent et saccagèrent la ville.Dès lors, les convoitises étrangères pour s'emparer de cette métropole se sont multipliées. Dans le quatrième chapitre, il a décrit la ville sous les Ahomades (1160-1230) et sous les Hafsides (1230-1574). Ce qui attire l'attention, c'est que la ville n'avait pas connu le même essor architectural qui avait caractérisé la période des Aghlabides et des Sanhajites en particulier. Les Hafsides, héritiers des Ahomades, n'avaient pas beaucoup d'engouement pour l'architecture. Ils se sont plutôt occupés de l'agriculture et de l'arbre de l'olivier spécialement. Politiquement, ce n'était pas une période d'accalmie. Le sultan hafside Moulay Hassen avait envoyé une expédition espagnole à Sousse pour la punir à cause de son insubordination. Elle en paya très fort le prix. C'est dans le chapitre 5 que Elyès Dardour aborde la présence turco-ottomane à Sousse (1574-1612 ).Une arrivée salvatrice, surtout après les vagues successives d'attaques espagnoles sur la ville. L'ordre s' était rétabli. Les activités agricoles, artisanales et commerciales reprirent de plus belle.L'activité portuaire s'est accrue sous le règne de Othmane Dey.Les frégates et les différentes flottes avaient sillonné les côtes ouest de la Méditerranée et rentraient pleines de butin et de précieuses prises. Il passa ensuite au chapitre 6 pour évoquer l'époque des Mouradites (1612-1705 ). Cette période fut marquée par de dangereux troubles politiques et de querelles intestines pour l'accession au pouvoir. Un conseil constitué de sages, de notables et de militaires choisit Hussein Ben Ali Turki pour lui succéder.Celui-ci annonça la naissance de l'Etat Husseinite et l'autonomie vis-à-vis de la dépendance ottomane. Dans le dernier chapitre de l'œuvre, l'auteur parle de cet Etat jusqu'à l'établissement du protectorat français en Tunisie (1705-1881). Durant toute cette période , la ville a connu un grand essor architectural. Sousse est devenue la seconde métropole du Royaume. On ne tarissait pas d'éloges sur sa splendeur et sur son animation. "A l'aube, Sousse paraissait une ville aussi rose qu'une mer en émeraude" , disait Charles Lalemand, en y débarquant au début du protectorat. Les appellations de Sousse à travers les temps et les âges Au-delà de toute cette chronologie détaillée et minutieuse, l'œuvre de Elyès Dardour suscite la curiosité du lecteur par la recherche approfondie et élaborée de l'auteur sur les différentes appellations données à la «Perle du Sahel» à travers l'histoire. Il a précisé que le mot Sousse est d'origine berbère qui signifie toute élévation de terrain de forme arrondie. Géographiquement, cette ville est située au fond d'un golfe relativement vaste, qui l'abrite des tempêtes, et au pied d'une colline qui lui permet de se prémunir efficacement contre les convoitises des ennemis.Ce nom de Sousse est également attribué à deux autres villes:l'une en Libye et l'autre au Maroc. Mais ces deux villes sont moins célèbres que la Sousse de Tunisie. Cependant, en se référant à l'histoire ancienne, on nous apprend que cette ville avait été fondée au XIe siècle av. J.C par les Phéniciens venus de Tyr (le Liban actuel) et l'avaient nommée Hadrumetum ou Hadrumète (communément admise). La signification de cette première appellation demeure énigmatique. Mais selon certaines tribus au Yémen, Hadrumète signifie tout simplement repaire de scorpions et de vipères. Donc, celui qui s'y approche est menacé de mort. Au Ve siècle, les Vandales, venus d'Espagne sous la conduite de Genséric, déferlèrent sur l'Afrique du Nord et chassèrent les Romains. Hadrumète changea alors de nom et fut appelé "Hunéricopolis" du nom d' Hunéric, fils du chef vandale. Après le départ des Vandales qui avaient laissé la ville en ruines, certains historiens l'avaient baptisée "Sousa" qui signifiait "la rescapée", eu égard à la démolition subie par la faute des Vandales. Ces derniers cédèrent la place aux Bysantins qui avaient remis la ville sur pied après la période de dévastation et de destruction. L'empereur Justinien donna à la ville le nom de "Justinianopolis". Il a fallu attendre l'arrivée des Arabes et des Aghlabides conduits par Okba Ibn Nefaâ pour voir la ville porter le nom de "Sousse", celui qu'elle porte aujourd'hui et qui fait sa renommée.