Par Saïda MEHERZI (Journaliste, ex-directrice de l'émission Femme à la RTT, de 1958 à 1980) «Dieu soit loué, un coup, deux, trois, quatre, cinq… et puis quarante minutes… 17h45… Un à un, les liens qui t'enserraient se sont défaits, mon cœur a fait un bond vers toi… Depuis que je t'attends, viens, ô viens vite à moi, ma bien-aimée !». C'est par ces mots éperdus de bonheur, qu'une jeune fille saluait la naissance de la Tunisie, en ce mois de mars 56, dans l'action tunisienne. Une Tunisie libre, l'incroyable, l'inouï, l'inoubliable : la déclaration d'indépendance de la patrie, venait d'être annoncée. Ces mêmes sentiments sortis du tréfonds de mon être, de journaliste retraitée, je les redis, aujourd'hui, avec une force et une foi identiques. Dieu soit loué qui m'a permis de vivre une indépendance nouvelle. J'ai vu enfin, jaillir de ce pays tant aimé, dans lequel je me sentais étrangère ces dernières années, une jeunesse magnifique, héroïque. Soudée dans son élan, offrant aux balles assassines, l'hymne à la vie malgré la mort… Bénis soient-ils tous ceux qui sont tombés pour que renaisse la patrie. Pour avoir décrit les souffrances de la société tunisienne et l'avilissement de la femme en particulier, d'avant 56, pour avoir vécu, pas à pas, le miracle de l'après-indépendance : le Statut personnel, le droit de vote en 57 et tant d'autres étapes de progrès, je souhaite dire à ceux qui veulent, non conscients, semble-t-il, de la gravité que cela comporte, de mettre fin au PSD… Je voudrais dire, ce parti que Bourguiba a créé le 2 mars 1934 dans la ville historique de Ksar Hellal, qui a donné à la Tunisie, l'indépendance, après une longue marche faite d'exil, de prisons, de martyrs, ce parti ne peut mourir. Qu'il change d'appellation, qu'il reprenne ses lettres de noblesse, il est pérenne de même que l'hymne national qui s'y rattache. Jeunesse de Tunisie, vous avez assumé la révolution pour la dignité et la justice (je réfute le mot jasmin) à vos risques et périls. Les ondes de votre courage ont électrisé, via l'internet et les médias, tous vos semblables compatriotes et étrangers. Vous avez planté un drapeau flamboyant d'héroïsme, rouge du sang des martyrs, sur l'Everest du monde. Il restera éternel. Cette révolution est la vôtre. Elle a éclaté du plus profond de vous-mêmes. Restez vigilants, garants de son présent et de son avenir afin qu'elle ne puisse être dévoyée à des fins personnelles. Tous les regards vous suivent jour après jour, dans chaque pays, conscients de votre patriotisme, de vote maturité, de votre civisme. Vous représentez la Tunisie dans ce qu'elle porte en son sein de plus noble. Vous avez créé une révolution atypique, la révolution des blogueurs du siècle nouveau. Transmettant ainsi à tous les peuples de jeunes et de moins jeunes, la voix réelle de la Tunisie. Dans ce but ne laissons pas s'installer le désordre, les rivalités. L'heure est grave. Elle nous impose de serrer les rangs. Nous avons 6 mois pour juger des faits du gouvernement de transition. Il est urgent de prendre en compte le temps perdu. Universités, lycées et écoles vous appellent. Tous au travail, dans tous les domaines, pour un nouveau départ, avec dans le cœur, l'image indélébile de nos martyrs, qu'ils soient bénis. Nous ne voulons pas le chaos, tel l'Irak aujourd'hui, ce pays immense par son histoire et sa culture, détruit par un criminel jusque dans ses bases, et qui, décapité de ses cadres, n'arrive pas à se relever de ses cendres. Nous sommes fiers de vous, emplis de joie et d'émotion. La graine semée par le Président Bourguiba, en privilégiant, entre autres, le budget de l'enseignement, a donné ses fruits : une jeunesse éblouissante de maturité. Qu'il me soit permis d'exprimer, ici, en tant que citoyenne et patriote, l'expression de ma gratitude, de l'incommensurable reconnaissance qui me submerge, qui nous submerge, envers le général Rachid Ammar, chef d'état-major, envers tous les généraux, officiers et valeureux soldats qui ont protégé notre pays d'une guerre fratricide, d'un bain de sang. Dieu en soit loué.