Ça n'en finit pas avec les sit-in de contestations et surtout de revendications. Partant de réclamations sociales, puis politiques, la révolution connaît, depuis quelques jours, une orientation nouvelle des revendications portant sur le volet socioprofessionnel et même sécuritaire. Hier matin, plusieurs centaines de manifestants ont entamé un sit-in devant le ministère du Commerce et du Tourisme, brandissant des banderoles et autres supports de leurs slogans exigeant la régularisation de leur situation professionnelle, la titularisation, la justice sociale, et autres doléances concernant l'éviction des responsables appartenant à l'ancien régime. Vers midi, la foule grandissante à l'avenue Kheireddine Pacha s'est dispersée pour former des foules distinctes selon leurs revendications. Celle qui a choisi de bloquer l'issue au siège du ministère réclamait la titularisation des agents et des cadres temporaires et contractuels «dont certains cadres ont le statut de temporaire depuis 1995 ! s'exclame Atef Ayari, agent de contrôle. La deuxième revendication est d'établir un statut interne clair, puisque depuis 1992, on a essayé d'en faire un mais à chaque fois ça tombe dans l'eau». «Aussi, ajoute-t-il, nous n'avons pas de syndicat pour nous défendre alors que notre situation financière est encore lamentable. Les responsables malhonnêtes désignés par l'ancien régime sont encore à leurs postes et ce sont eux qui ont semé la pagaille dans le système de travail du contrôle économique. Imaginez un simple ouvrier qui effectue la tâche d'un contrôleur ! C'est l'un des dépassements qui se produisent dans le secteur jusque-là mal géré. Autrement, pour passer d'un grade à l'autre nous devons passer du statut de titulaire à celui de temporaire pour que nous puissions passer un concours de passage de grade. Nous avons des cadres qui disposent de doctorat et de licence en droit et qui sont payés en tant que bacheliers…C'est inadmissible !». SOS «corruption et abus de pouvoir» Pour sa part, Afef Jertila, agent d'administration, confirme que plusieurs responsables et hauts cadres sont «impliqués dans des circuits de corruption et des abus de pouvoir. Mohsen Aroui, ancien secrétaire d'Etat, affirme Afef, Khelifa Tounakti, directeur général de la concurrence et des enquêtes économiques, et Ali Gharbi, directeur général de la Société des viandes, sont les symboles de la corruption au ministère du Commerce et devraient être jugés pour leurs abus de pouvoir». Quant à Brahim Tarhouni, cadre du contrôle économique, il évoque le danger que représentent plusieurs abus de pouvoir et dépassements de la part des directeurs «qui ne cessent de prendre des décisions en leur faveur aux dépens des agents. Il y a des agents non formés, non habilités pour effectuer le contrôle économique et encore contractuels qui disposent des attributions de la police judiciaire, ce qui est grave. Ceci facilite la corruption au sein du corps et affecte la relation avec les commerçants, de plus en plus tendue. Au niveau régional aussi, on note des dépassements notamment dans la désignation des directeurs et des responsables qui n'ont aucune notion du droit et des réglementations du secteur», souligne-t-il. L'accès au ministère était impossible pour recueillir des réponses auprès des responsables et du ministre. Ce dernier a fait une courte parution vers 13h00 avant de rejoindre la foule des protestataires venus du marché de gros de Bir El Kassaâ. Les ouvriers et les mandataires dudit marché sont venus revendiquer une sécurité perdue. En effet, des agents de la coopérative avaient assiégé tôt le matin le carré 4 du marché interdisant l'accès des mandataires et des ouvriers. Un geste qui a poussé ces derniers à aller protester devant le ministère. Il a fallu que le nouveau ministre, M. Mehdi Houas, vienne rassurer les mandataires et les ouvriers qu'il va intervenir pour sécuriser le marché de gros. Salem Abidi, mandataire, affirme que les ouvriers de la coopérative, dirigée par Hmed Bou Oun, n'ont pas agi de la sorte de leur propre gré et qu'il y a des gens qui les ont poussés à bloquer le carré 4 du marché. «L'intention de ces gens, souligne-t-il, est d'entraver notre travail alors que nous sommes en pourparlers avec les ouvriers pour régulariser leur situation. Nous sommes des investisseurs dans ce domaine et notre productivité est nettement meilleure que celle de la coopérative en dépit du contexte de plus en plus contraignant». Par ailleurs, de l'autre côté de l'avenue Kheireddine Pacha, on a remarqué un autre sit-in conduit par les agents et les cadres administratifs de la délégation régionale de l'éducation de Tunis 1. Ils entament ce sit-in revendiquant entre autres la régularisation de leur situation et la titularisation des agents temporaires.