• Longtemps restée éloignée des cimaises, Radhia Ghariéni, la spécialiste des portraits, nous revient avec des œuvres qui ont pour légitime prétention de glorifier une nature qui, pour être dominée, doit être respectée Hôte de la galerie Bel Art, l'exposition «Œuvres d'hier et d'aujourd'hui» de l'artiste peintre Radhia Ghariéni a été inaugurée jeudi dernier. Jusque-là réputée pour ses portraits de paysans aux traits burinés par le soleil du Sud et ses visages de bédouines aux traits marqués de sillons et de rides comme s'ils étaient travaillés au burin, Radhia Ghariéni nous revient, après cinq années d'absence, avec du nouveau. Une autre peinture, celle de la nature, du monde physique considéré en dehors de l'homme avec une végétation luxuriante et une représentation peinte de fleurs, d'objets divers dont des pans entiers de l'architecture saharienne avec cependant une autre nouveauté de taille, le lavis, des dessins de petit format à l'encre de Chine. La vérité intime de la nature Ses toiles, au nombre de vingt-huit, apparaissent, pour la plupart, pleines d'un sentiment de gratitude, de félicité et d'espoir en une nature qui, pour être commandée et maîtrisée, doit être obéie et respectée. Dans sa vision de la forêt et des éléments de la nature, son regard s'est tout particulièrement attaché à souligner, en toute chose, la preuve d'une harmonie interne. Elle parvient à créer un climat, une atmosphère à partir du jeu des formes, des silhouettes de ces hommes et ces femmes du Grand Sud, des couleurs et des rythmes qu'elle agence selon ses propres besoins plastiques. C'est pourquoi il nous est permis d'avancer qu'elle aime approfondir un thème pour en saisir la vérité intime. Ses tableaux sont souvent d'une intense invention poétique, étrange et parfois désarmante tant la sûreté plastique est grande. L'artiste connaît les prestiges de la couleur, et de ce fait elle respecte le souci de la forme et de la construction et on ne voit pas dans ses peintures cette fracture heurtée et négligée par quoi se traduit la violence de l'instinct, mais des rapports de proportions et de tons qui attestent une pensée réfléchie et une bonne maîtrise du métier. Formée à bonne école, celle de Sylvain Monteleone et M'timet, cette ancienne ingénieure agronome a réussi à traduire, dans un langage purement plastique, des formes, des couleurs harmonieuses, des contrastes subtils, un univers poétique (lac, forêt, port, oued, etc.) qui fait partie de son imaginaire et n'hésite pas à utiliser les couleurs les plus luxuriantes, les plus exubérantes ou les plus tendres oppositions de tonalités chaudes et froides. Chez Radhia Ghariéni, les scènes baignent dans une lumière étrange qui semble irradier de l'intérieur des formes et il apparaît clairement que le dessin est chez elle une nécessité, afin que l'image ne se contente pas de représenter le monde extérieur, mais aussi d'exprimer et de suggérer certaines pensées ou idées conformes à ses états d'âme. La ferveur extatique de certains visages rend les peintures très émouvantes. Ses réalisations sont destinées surtout à l'acquisition d'un langage personnel propre à traduire ses visions. Elle éprouve d'abord la nécessité d'observer les éléments du réel et c'est seulement après un effort de volonté pour représenter un paysage, une forêt, une clairière, un cours d'eau… qu'elle est prise comme d'un tourment de créer des visions poétiques qu'elle traduit en tendres harmonies colorées appartenant à un univers pictural qui n'est jamais totalement détaché de la réalité. * L'exposition «Œuvres d'hier et d'aujourd'hui» de Radhia Ghariéni se poursuivra à la galerie Bel Art jusqu'au 3 avril 2010.