Une conférence de presse s'est tenue hier à la résidence de l'ambassadeur de France à La Marsa au cours de laquelle le ministre français des Affaires étrangères, M. Alain Juppé, s'est exprimé sur des questions aussi diverses que la position de la France à l'égard du conflit israélo-palestinien, l'immigration clandestine, le dialogue avec les mouvements islamistes dans le nouveau contexte du monde arabe, la nature de l'engagement militaire français en Libye, l'Union pour la Méditerranée ainsi bien sûr que les relations tuniso-françaises, qualifiées d'excellentes, et dont il avait été plus particulièrement question lors de la déclaration qu'il avait faite à l'issue de sa rencontre avec le Premier ministre, M. Beji Caïd Essebsi Pourquoi la France a-t-elle reconnu le Conseil national de transition représentant les insurgés en Libye et pourquoi refuse-t-elle de reconnaître unilatéralement l'Etat de Palestine ? La question posée s'inscrit dans un contexte particulier, puisque le président palestinien Mahmoud Abbas, qui était à Tunis, se rend à Paris pour des discussions officielles. M. Juppé conteste la comparaison entre les insurgés et la Palestine : «Nous avons reconnu des interlocuteurs, pas un Etat !» Il fait observer d'autre part que la position de la France est claire qui consiste à dire que l'Etat d'Israël doit bénéficier de sécurité sur son territoire mais que, d'un autre côté, les Palestiniens doivent avoir leur Etat… «Le statu quo n'est plus tenable, dira-t-il. Il faut bouger». Le ministre français a évoqué à ce propos l'échéance de la réunion de l'Assemblée générale de l'ONU, en septembre-octobre, au cours de laquelle un vote est prévu. M. Juppé a rappelé par ailleurs que si les résolutions successives du Conseil de sécurité ont échoué à s'imposer à Israël tout au long des dernières décennies, c'est parce qu'un Etat s'y oppose, à savoir les Etats-Unis : «Nous allons essayer avec l'Assemblée générale…» S'agissant du problème lié aux immigrés clandestins venus de Tunisie, le ministre français a commencé par minimiser l'ampleur du différend que ce problème a suscité entre la France et l'Italie. Une rencontre entre Sarkozy et Berlusconi est à l'ordre du jour, a-t-il indiqué, ajoutant : «Nous trouverons des solutions». Il a souligné que la position française actuelle sur cette affaire avait été approuvée par la Commission européenne. Y a-t-il revirement de la diplomatie française à travers sa disposition affichée à dialoguer avec les mouvements islamistes ? C'est, fait valoir M. Juppé, le monde qui a changé, la diplomatie ne fait que suivre : «Dès lors que leur attitude est claire sur le refus de la violence et sur leur adhésion aux valeurs de la démocratie», les raisons de les bouder sont levées. Le ministre français a indiqué que le même raisonnement était valable en Afghanistan. La France était disposée à reconnaître les islamistes afghans si, de leur côté, ils jouaient le jeu de la démocratie et renonçaient à la violence. La France a décidé récemment d'envoyer des officiers de liaison en Libye : n'est-ce pas là le signe d'un glissement de l'intervention française dans le soutien direct aux insurgés ? Pour le chef de la diplomatie française, les objectifs restent les mêmes : faire cesser l'agression de Gueddafi sur sa population et faciliter un processus de dialogue national. M. Juppé a indiqué que la France demandait l'aide de tout le monde pour réaliser ces objectifs : l'Union africaine, la Ligue arabe, l'ONU… «Nous sommes dans le mandat», répètera le ministre. S'agissant de l'Union pour la Méditerranée, M. Juppé considère que le projet est «plus prémonitoire que jamais». Le contexte nouveau est désormais plus propice à un «équilibre nord-sud». Il a rappelé les «intuitions» françaises : la coprésidence entre le nord et le sud ainsi que les projets comme le Plan solaire ou la dépollution de la Méditerranée… rappelant que le blocage du projet était dû surtout aux difficultés liées au conflit israélo-palestinien, il a affirmé : «On travaille à relancer le projet».