Si l'Agence foncière du tourisme (AFT) a pu voir le jour en 1973, c'est essentiellement pour favoriser l'aménagement de zones touristiques, qui soient à long terme performantes. C'est seulement à cette époque qu'on commençait à assister au lancement des premières générations de zones touristiques dans notre pays. Justement, «avant cette date, l'Etat avait pour mission de produire et de vendre des hôtes balnéaires répartis un peu partout sur le littoral», précise Mme Tafida Ben Othman, de la direction d'étude et participation à l'AFT. «Ensuite, et toujours au cours des années 70, que commence une autre époque où l'Etat produisait toujours des hôtels et les vendait sous forme de zones touristiques. Ce passage d'un tourisme balnéaire à un tourisme balnéaire et urbain représentait une époque qui faisait rêver les plus naïfs». Mais est-ce que ces zones-là sont actuellement bien pensées et bien conçues‑? Est-ce qu'elles répondent aux attentes des touristes, aussi bien tunisiens qu'étrangers ? Ont-elles été conçues d'une façon à être très bien optimisées pour répondre aux besoins des professionnels, mais aussi des habitants des villes qui les accueillent et celles qui les entourent ? Pour Mme Ben Othman qui semble fortement aimer le travail qu'elle assure au sein de sa direction, elle propose de nouvelles idées, qui puissent aider à ramener des touristes en Tunisie en ce temps de crise car selon elle «l'AFT serait au cœur de la conception du plan pour un retour des touristes». Elle explique, «Pour les différentes directions de l'AFT et une fois que le concept de zone a vu le jour, il ne resterait qu'à le développer. Ainsi, pour assurer une très bonne prestation de service, ces zones devaient être diversifiées . En effet, en 1985, notre agence avait connu une nouvelle période de développement touristique où l'on intégrait de nouveaux produits pour offrir encore plus de prestations. C'était pour nous les années de gloire et de grands succès du tourisme tunisien malgré les petites imperfections qu'il fallait à chaque fois réviser». Depuis cette date-là, «les zones touristiques tunisiennes n'ont vraiment pas changées. Elles sont restées, comme simple agglomération d'hôtels qui manquaient de vie. Quelques petits changements ont pu parvenir lorsque nous avons connu, comme toutes les destinations du monde d'ailleurs, une concurrence un peu plus marquée par le phénomène de la mondialisation. Le produit touristique commençait à se diversifier et en intégrait des produits, comme le tourisme de santé, les circuits culturels ou encore le golf, mais sans que tout cela soit bien pensé. L'AFT reste toujours et jusqu'à aujourd'hui une simple exécutante de changements. Elle travaille à partir des ordres qu'elle reçoit et des normes bien déterminées de travail. Nous sommes devenus bâtisseurs de zones touristiques balnéaires et nous avons bâti des zones sahariennes pour diversifier le produit. Nous avons aussi repensé les premières zones que nous avons mis en place durant les premières années de travail de l'AFT,afin de les moderniser par de nouveaux éléments structurants comme le golf et les ports de plaisance». Mme Ben Othman, explique qu'au départ les zones touristiques devaient ressemblaient à une variété de projets individuels hôteliers. «Nous avons retrouvé des projets hôteliers simples qui manquaient encore une fois du concept d'intégration». Elle met l'accent toutefois, sur une zone particulière , celle d'El Kantaoui, et qui répondait, selon elle, à ce concept-là. «El Kantaoui est une «ville dans la ville», je pense que cette entité urbaine est très bien intégrée dans son environnement, elle est aussi bien structurée, chose qui manquait d'une manière flagrante aux restes des zones touristiques tunisiennes». Le métier de développeur-aménageur Ce qui manquait à ces zones là, malgré l'intervention d'autres administrations comme l'Ontt, le ministère de la Santé publique ou de la Culture…pour la diversification des produits au sein de ces zones, c'est surtout une prise en considération les idées des développeurs et aménageurs de ses zones. Mme Ben Othman refusait de rester simple développeur de termes de références pour les investisseurs. Ce qui l'interpellait le plus, c'est de faire un projet de zone intégrée qui épouse parfaitement l'environnement dans lequel il naît. «Jusqu'à aujourd'hui, l'AFT continue à être productrice foncière pour les zones touristiques, et à assurer leur aménagement. Elle s'occupe également de l'infrastructure première (eau, éclairage, routes) ainsi que de la super structure. Un travail qui continue jusqu'à ce qu'une commission finale donne son approbation pour la commercialisation de la zone. L'approbation des plans traduisent que ces plans d'aménagement répondent à un certain nombre de critères de diversification, de qualité afin d'offrir un produit équilibré, qui donne une chance à tout type d'investisseur (hôtelier, restaurateur, projet d'animation…). Les projets non approuvés font l'objet de réexamens où beaucoup de parties doivent intervenir afin de remédier aux imperfections, chose qui pouvait durer des années. Devant cette situation et le mécontentement des investisseurs, l'Etat a décidé de vendre les zones non approuvées. J'estime que c'est une décision aberrante car le vrai problème réside en cette décision. Cette décision démontre et confirme, en quelque sorte, un non-ssouci de l'administration quant à la qualité des zones touristiques tunisiennes et des projets qui vont être mis en place au sein de ces zones. Nous, aménageurs de l'AFT, nous nous sommes rendu compte que les intérêts individuels des investisseurs et des acquéreurs des lots passaient avant l'intérêt général de la zone et du produit final qui sera vendu aux clients. Il est pour nous impensable de continuer à produire des zones dont les termes de référence nous sont parfois dictés par les investisseurs eux-mêmes. Nous nous sommes retrouvés confrontés à une guerre entre le souci de “rentabilité” des investisseurs et un souci de qualité pour les aménageurs des zone». Le rêve de Mme Ben Othman serait alors, de mettre en place des zones touristiques bien diversifiées, respectueuses de l'environnement socio-économique dans lequel elles sont basées. «J'ai envie d'appeler ces zones-là, des villes touristiques qui doivent être des projets urbains réalisés à la fois par l'Etat, les privés, les concepteurs que nous sommes… j'estime que le regard apporté par les concepteurs et les aménageurs de l'AFT est très important dans le sens où ces derniers ont assez d'expérience pour s'auto évaluer et s'autocritiquer et réaliser des projets équilibrés et rentables pour la Tunisie. Ces derniers ont pu anticiper la crise des zones touristiques venant des plans d'aménagement mal conçus. Et je trouve que c'est un très grand pas pour améliorer, à la fois la qualité et la rentabilité des zones». Pour notre aménageuse AFT, les zones touristiques doivent présenter des services complémentaires où le touriste tunisien, d'abord, et étranger, ensuite, doivent se retrouver dans un vrai schéma urbain. Ils peuvent participer à la vie culturelle, sportive, sociale, économique… sans être cloîtrés dans une unité hôtelière qui se chargerait de leur proposer des produits et des services qu'elle aurait conçues d'une manière individuelle. «Le touriste d'aujourd'hui a besoin de voir la Tunisie de l'après-révolution. Il a besoin de se déplacer du Nord au Sud, sans contraintes. Il a besoin de trouver des services qui soient à l'image de cette Tunisie nouvelle».