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Le destin d'un amoureux des arts
L'entretien du lundi : Rencontre avec Habib Bel Hédi (producteur)
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 06 - 2011

• Pour ceux qui ne le connaissent pas, Habib Bel Hédi c'est l'homme de l'ombre de Familia production, tête pensante et gestionnaire d'une structure de production théâtrale et audiovisuelle à qui l'on doit les plus belles pièces signées par Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi
• C'est avec lui que Familia Productions est née il y a vingt ans et que le théâtre de Jaïbi a le plus voyagé dans les quatre coins du monde
• Mais Habib Bel Hédi n'est pas seulement cela, c'est un producteur de cinéma et surtout un agitateur culturel qui a fait revivre la salle de CinémAfrica et en a fait un haut lieu de la cinéphilie
Entretien :
Racontez-nous le déclic, votre première rencontre avec le monde des arts ?
C'était à Dar El Jazizi, l'actuelle maison de la poésie dans la Médina, c'était un club culturel où, tout petit, j'ai commencé à pratiquer le théâtre des marionnettes, et un jour, j'ai reçu un prix et c'était pour «La chair vive» (Ellahma el haya), texte en arabe dialectal de Salah Garmadi; et depuis, je n'avais qu'une seule envie, le rencontrer.
Par la suite c'était le collège Sadiki, d'abord le théâtre scolaire, ensuite, j'ai créé avec Raouf Kouka la troupe de théâtre alternative du lycée. Mon histoire avec le théâtre s'est poursuivie au club Tahar-Haddad avec plein de créations dont Des souris et des hommes de Steinbeck et Etat de siège de Tahar Hammami qui était à l'époque censurée.
Après ces débuts, les choses sont devenues plus sérieuses et ont pris une tournure plus professionnelle…
Oui, j'ai suivi une formation d'animateur et j'ai intégré la maison de la culture Ibn Zeidoun (El omrane) où j'ai créé avec Habib Chebil le premier noyau du théâtre triangulaire, et ça a duré 9 mois; après, c'était la période du centre culturel de la Ville de Tunis (Med V); ensuite j'ai fait une saison à la maison de la culture Ibn Rachiq et on m'a renvoyé au bout de quelque temps
Quelles étaient les raisons ?
On a découvert dans mon tiroir 30 exemplaires du journal du Parti communiste «Ettarik».
Qu'avez-vous fait alors pour vivre?
J'ai eu l'idée de rouvrir la salle d'El Hamra comme salle de cinéma et j'ai loué le local, mais on m'a interdit le visa d'exploitation. Du coup la salle que je payais cher ne pouvant pas recevoir le public, j'ai donc créé la société «Al Amal artistique» qui avait pour activité de faire tourner et de diffuser les groupes de musique engagée. Ce fut une expérience qui a duré trois ans.
Parallèlement à votre parcours artistique, il y a eu aussi un parcours politique; racontez-nous cette période.
Ça a commencé d'abord au lycée! Après la libération des militants de l'Ouvrier tunisien en 1977, certains que je connaissais ont intégré le PC et j'y étais presque naturellement attiré. Je me suis retrouvé dans les cercles de discussion et de réflexion et très proche du cercle des intellectuels et des hommes de la culture. C'était à l'époque des exposés d'un niveau très élevé en plus d'une vraie discipline, consistant à lire un livre et voir un film par jour. Très vite, je me suis retrouvé l'animateur principal de tous les meetings du Parti communiste; on a même organisé un festival pour fêter le lancement de la revue «Attarik El jadid».
Que retenez-vous de cette période?
C'est dans ces cercles là que j'ai appris ce qu'est la démocratie; en même temps, je me posais un tas de questions sur le pouvoir central, la dictature du prolétariat… mon engagement dans le Parti communiste s'est arrêté en 1985. Mais je n'ai jamais abandonné l'engagement politique et je suis resté tout le temps un militant de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme.
Votre rencontre avec Taoufik Jebali et Mohamed Driss s'est faite sur la production «Ismaïl Pacha» et la société «Cinémar». Après, c'était la période du théâtre national…
J'ai quitté Cinémar avant l'ouverture d'El Teatro, suite au différent entre Jébali et Driss. Je ne voulais pas prendre parti et j'ai préféré quitter. Par la suite Driss fait appel à moi pour me charger de la production de son monodrame Hayi el Mouaâllem et je suis resté avec Driss quand on lui a proposé la direction du Théâtre national.
Ce parcours de plus de trois ans, qu'en retenez- vous?
Driss a su tirer profit de ses relations pour imposer le Théâtre national comme structure indépendante. Il a su rendre ce qui était de l'ordre de la donation, un droit. Mais Driss c'est fait prendre dans les rouages administratifs et il a été pris au piège du politique. Et moi j'ai dû, encore une fois, quitter.
Après il ya eu Jaïbi…
Après une année passée à Marseille dans le théâtre Toursky, Fadhel Jaïbi fait appel à moi pour monter Familia (la pièce de théâtre), une création qui a été faite d'une manière collégiale : Taoufik Jebali offrait l'espace de répétition, moi j'avais quelques sous à mettre dans la production … et quand la pièce a eu du succès, on a décidé de créer une société qui porte son nom. Et depuis, c'est resté une affaire de famille (Familia…)
Pour un éternel démissionnaire comme vous, comment ça se fait qu'avec Jaïbi et Jalila ça a pu durer aussi longtemps, c'est quoi votre recette pour que ça marche ?
Au bout de vingt ans d'étroite collaboration, on peut faire le constat suivant : on a eu tellement de problèmes qui menaçaient même notre existence qu'on n'a pas eu du temps pour nous faire la guerre ( rires). On travaille beaucoup aussi et nous avons beaucoup plus de combats en commun que de différends.
Qu'est-ce que Familia vous a apporté ?
J'ai appris à résister calmement et intelligemment; j'ai appris à faire avec les moyens du bord et surtout la grande leçon est que rien n'est acquis et que la résistance est un exercice quotidien. Ce n'est pas toujours évident tous les jours mais on est une famille. Quand l'un de nous fléchit, il y a les autres qui le soutiennent et le boostent.
En plus, nos créations sont montées en crescendo au niveau du propos politique jusqu'à devenir un peu trop frontales pour certains, mais pour nous ces pièces nous donnent une grande énergie et surtout l'envie de continuer et de reprendre le travail très vite.
Dans les pièces de Familia ne sentez-vous pas que nous assistons à l'ère de Jalila Baccar auteur ?
Depuis le monodrame A la recherche de Aïda écrit et interprété par Jalila Baccar, l'apport de Jalila est d'autant plus ressenti. D'une part, elle signe le texte et, d'autre part, avec le contexte général et la conjoncture politique; on se retrouvait forcément dans l'engagement politique de Jalila.
Qu'en serait-il du théâtre de politique de Jaïbi-Baccar après la révolution ?
Avec Ben Ali, nous avons trouvé un certain équilibre, c'est-à-dire comment contourner la censure, comment faire peur et comment affronter. Ce sont des réflexes qui, avec le temps sont devenus notre pain quotidien. Maintenant les repères sont autres, sont diamétralement à l'opposé et il va falloir les comprendre. Ce qui est certain, c'est que l'esprit de citoyenneté restera toujours de rigueur. Poser un regard sur la contemporanéité, le pouvoir, le gouvernement, le citoyen et le rôle du créateur dans cette phase intermédiaire, toutes ces questions sont au cœur de nos préoccupations. C'est une nouvelle vision qui s'impose à nous mais qui n'est pas en rupture avec notre parcours.
Famila productions est aussi une structure de production audiovisuelle et cinématographique. N'est-ce pas un éparpillement ?
Aucunement, il faut dire que pendant les répétitions des créations, j'ai beaucoup de temps libre et puisque je dispose d'un bureau, de personnel et de matériel, je me disais: Pourquoi ne pas fructifier tout cela? Et c'est une manière d'assurer des entrées d'argent à la société. De là sont nées deux séries pour la télé, une dizaine de documentaires, un court métrage et un long métrage de fiction en cours de finition de Mahmoud Ben Mahmoud.
Quel regard posez-vous sur la situation actuelle et sur les enjeux politiques de cette phase transitoire?
Je ne cesse de m'étonner de la maturité du Tunisien et de sa capacité de se placer dans le consensus. Depuis le 14 janvier et la fuite de Ben Ali, on a eu des moments chocs, des certitudes qui s'ébranlent et des moments de doutes profonds. A chaque fois, on se dit que c'est un point de non-retour… le fantôme de la guerre civile et de la scission… les militaires qui vont prendre le pouvoir… Eh bien, non, les différents protagonistes montrent une grande capacité de revenir à la stabilité. Du coup, moi je me dis : Plus jamais peur et peur de rien et on ne nous fera jamais douter de nous.
Quelle serait, à votre avis, la culture post-révolution?
Sous Ben Ali on était en congé, maintenant le pays exige plus de travail et plus d'implication… que les militants trouvent leurs partis et s'y engagent, que l'Ugtt retrouve son indépendance du politique et que nous, artistes gagnons notre place dans l'action fondatrice et démocratique. Il ne faut pas demander aux partis de penser à la culture; c'est à nous d'imposer un programme de culture nationale sur les partis politiques. La construction du pays n'a pas besoin uniquement de développement régional, reposant sur les choses élémentaires, et alimentaires; les gens ont besoin de culture pour se sentir citoyens.


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