Certains producteurs et commerçants profitent du mois de Ramadan qui connaît une augmentation de la consommation pour essayer de gagner plus en utilisant tous les expédients possibles. Un tour dans les marchés de Tunis permet de constater que de nombreux commerçants ne se montrent pas soucieux d'afficher les prix en vue de permettre aux consommateurs d'acheter en fonction de leur budget et de leur choix. De plus, le prix de plusieurs produits – comme les viandes blanches et rouges – ainsi que des légumes et fruits ont évolué à la hausse. Selon Mohamed Ali, employé à la Société tunisienne du sucre (actuellement en grève), «la majorité des produits de consommation sont inabordables. L'Etat doit choisir entre mener une politique de réduction des prix ou augmenter les salaires pour permettre aux citoyens de survivre». ce constat est partagé par d'autres consommateurs qui ne sont plus en mesure de satisfaire tous leurs besoins en produits de consommation. Safa, une mère de famille, estime, en effet, que «les citoyens classés dans la catégorie moyenne trouvent des difficultés aujourd'hui à joindre les deux bouts. Que dire alors des catégories à revenus limités ou modestes ? Les prix doivent être stabilisés avec une intervention vigoureuse de l'Etat». Les pommes de terre sont vendues à 700 et 750 millimes, les piments doux à 1, D500, les raisins à 2,D300, les dattes à 5,D400, le poulet à 4,D800 le kg, la viande ovine à 14,D000... Des pressions sur le marché En réalité, et depuis bien longtemps, l'état n'est plus le seul intervenant dans les prix. Plusieurs parties prenantes s'y ajoutent, à commencer par les producteurs. M. Khélifa Tounekti, directeur général de la concurrence et des enquêtes économiques au ministère du Commerce et du Tourisme, reconnaît que «certains produits ont connu une hausse de prix». C'est le cas, par exemple, des pommes de terre. Le mécanisme de régulation ne semble pas avoir joué correctement son rôle. Le stockage est assuré par le Groupement interprofessionnel des légumes, mais surtout par les privés. Bien que la production soit la même que celle de l'année dernière, les apports sur le marché ont chuté de 30 à 50%. En septembre, c'est le début de la période de soudure (période séparant la fin d'une campagne et le début d'une autre). Elle devrait donner lieu à l'importation de quantités de pommes de terre afin de rétablir l'offre sur le marché. Il est question d'en importer 20.000 tonnes, quantités qui pourraient atteindre les 40.000 tonnes. L'approvisionnement des marchés en piment commence à s'améliorer, vu les apports des agriculteurs des régions intérieures. Ce qui devrait permettre de faire encore baisser les prix au cours des jours à venir. Toutefois, le marché libyen a contribué, de son côté, à exercer des pressions sur le marché des produits agricoles et agroalimentaires. Contrairement aux années précédentes, l'état n'intervient pas pour plafonner les prix. «Mais nous travaillons en concertation avec la profession pour éviter que les prix deviennent hors de portée», souligne notre interlocuteur. Les prix fixés par l'Etat ne concernent que quelques produits de première nécessité, comme le pain, les pâtes, l'huile végétale, le lait... Pour ce qui est des tomates, le retard d'approvisionnement du marché – à cause d'une indisponibilité de la main-d'œuvre pour assurer la récolte – a fait grimper également les prix qui commencent à se stabiliser actuellement à 500 millimes le kg, avec des exceptions, cependant, dans certains marchés. Le dispositif de régulation des produits de volaille a connu, lui aussi, quelques perturbations. Les producteurs auraient opté pour une diminution de la production afin de préserver le niveau des prix. Problème de régulation La diminution sur le marché est estimée à 1.000 tonnes. «Si nous avions choisi le plafonnement du prix pour ce produit, nous aurions pu nous trouver dans une situation de pénurie», prévient M. Tounekti. La régulation se fait entre le ministère de l'Agriculture et la profession, qui peut imposer ses choix dans l'intérêt des producteurs, lesquels ont vu leurs coûts de production augmenter, compte tenu des prix des semences et des intrants. Le programme pour le mois d'août n'a concerné donc que 8.200 tonnes au lieu de 9.000 tonnes. La régulation a toujours posé problème par le passé et les prévisions n'étaient pas toujours proches de la réalité. Un problème structurel et conjoncturel est également posé pour les viandes rouges et notamment la viande bovine – écoulée à 14 et 16 dinars le kg – qui ne satisfait pas la demande locale. Le recours à l'importation demeure donc nécessaire. C'est la société «Ellouhoum» qui assure la régulation par l'importation de la viande réfrigérée. Les privés, qui se sont engagés à vendre la viande importée à 13 dinars le kg, n'ont pas respecté leur engagement et «des mesures dissuasives» seront prises à leur encontre, indique le responsable. Le ministère a mobilisé 320 équipes de contrôle dans toutes les régions, en plus de 22 cellules de contrôle fixes dans les marchés de gros et 41 dans les marchés municipaux pour rappeler à l'ordre les contrevenants qui font grimper les prix sans tenir compte du pouvoir d'achat des consommateurs. Ces derniers disposent d'un numéro vert (80.100.191) pour exprimer leurs réclamations et poser leurs questions. Les 5.521 visites effectuées depuis le mois de Ramadan ont permis de relever 279 infractions relatives, entre autres, à la hausse des prix et au non-affichage des tarifs.