Le diplôme protège du chômage, dit-on souvent, alors que les sans-emploi sont majoritairement des diplômés de l'université et de la formation professionnelle. Contradictoire équation, au vrai sens du terme. Pourquoi notre système d'enseignement et d'apprentissage n'a pas su parvenir à saisir l'essence du problème de l'employabilité qui persiste au fil des années? Est-il temps de le réformer pour l'adapter aux exigences du marché? Comment faire pour absorber autant que possible les demandes d'emploi ? Aussi, peut-on sortir des sentiers battus de l'offre professionnelle, dans la perspective d'augmenter les chances à tous les postulants et diversifier les pistes d'insertion et les sources de revenus. En fait, la responsabilité d'embauche n'est plus l'apanage de l'Etat, mais plutôt l'objectif commun de toutes les politiques sectorielles. Autant de questions à aborder pour venir à bout de la question principale : l'emploi constitue-t-il le problème ou la solution ? Toutes les statistiques fournies ont bel et bien montré la variabilité des réponses, tout dépendant de la politique socioéconomique adoptée. Mais ce qui est vraiment tranchant, c'est le caractère prioritaire de l'emploi, à la lumière de l'amplification du chômage, touchant toutes les catégories sociales, dans les quatre coins du pays. Un phénomène social d'envergure nationale qui ne cesse de menacer les fondements de l'économie tunisienne, à l'heure où elle est appelée à retrouver son rythme de croissance situé actuellement à moins de 1%. D'autant plus que le nombre des demandeurs d'emploi pourrait dépasser les 700 mille, si rien ne change d'ici la fin de l'année en cours. Du moins en termes de mesures d'appui et de programmes d'intervention directs. Cela ne saurait se réaliser sans l'implication de toutes les parties concernées et leur détermination à honorer leurs engagements à l'égard des enjeux de l'étape actuelle, à savoir créer davantage d'emplois et améliorer l'employabilité des milliers de diplômés ayant des difficultés d'insertion. Une des plus nobles revendications de la révolution populaire. Et les industriels sont de la partie, compte tenu du large réseau de PME établi dans le pays, avec à son actif 5.839 entreprises dont la moitié est totalement exportatrice. Elles emploient au total quelque 336 mille personnes. Ainsi les hommes d'affaires devraient tout faire pour répondre présent tant par leurs projets d'investissement qu'à travers leurs initiatives de recrutement et d'intégration. Car les régions intérieures, ayant lourdement souffert sous l'emprise de l'ancien régime, étant corrompu et despotique, ont besoin aujourd'hui, plus que jamais, de sortir du vase clos et renaître de leurs cendres. Autrement dit, avoir leur part équitable du budget de l'Etat et bénéficier des attributs du développement local et régional. Surtout quand on sait que le secteur industriel s'attache à gagner au moins les principaux enjeux garantissant plus d'emplois et davantage d'équilibre régional. Il s'agit de l'investissement dans des secteurs prometteurs et innovants, du développement des industries à fort contenu technologique et de la promotion des exportations vers les marchés européens, de manière à dénicher de nouvelles opportunités d'emploi. Idem pour le développement régional équilibré, avec une infrastructure de base adéquate, et l'amélioration du climat de sécurité et de stabilité, condition sine qua non pour attirer de plus en plus d'investisseurs. Et pour cause, la sécurité prime sur le pain, tout comme le dialogue social générateur de consensus et de cohésion. Preuve en est, les grèves successives, les sit-in et les actes de pillage qui ont eu lieu suite aux dérives sécuritaires qu'a connues le pays au cours des huit derniers mois ne font qu'aggraver la situation économique et perturber la courbe de croissance au niveau du PIB, avec un taux de -3%. Ce qui s'est répercuté, selon le ministère de l'Industrie, sur la capacité compétitive de la Tunisie, placée cette année au 40e rang sur l'échelle de Davos, soit une régression de 8 points. En effet, près de 270 entreprises ont été déclarées sinistrées, subissant des dégâts considérables estimés à 173 MD, causant la perte de quelque 11 mille emplois. Quoi qu'il en soit, le secteur public est disposé à recruter plus de 13 mille personnes, alors que les entreprises privées pourraient générer 10.550 postes d'emploi dont 1.450 fournis par le secteur des TIC. A noter, dans ce contexte, que près de 65% de ces opérations seront orientées vers les régions intérieures. Sur cette lancée, les prévisions tablent sur 23.750 nouveaux recrutements directs et indirects effectués dans les secteurs public et privé. Sans oublier les 13.700 contractuels intégrés au sein des sociétés de sous-traitance. S'y ajoute également l'étude stratégique pour l'industrie à l'horizon 2016 qui vise essentiellement à doubler les exportations jusqu'à 30 MD et créer 150 mille emplois dans le secteur privé dont 50 % au profit des diplômés du supérieur. Le mois de l'emploi qui vient de s'achever, sous le signe « gouvernance et développement régional», s'inscrit dans une vaste campagne de sensibilisation pilotée du nord au sud, aux fins de relever les apports de l'économie nationale, tous secteurs confondus, dans l'intégration professionnelle des jeunes demandeurs d'emploi.