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Le multilinguisme est-il polluant ?
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 30 - 11 - 2011


Par Rafik BEN HASSINE
Dans son opinion parue dans La Presse du 28/11/2011, intitulée droit de réponse à Mme Sebaï Lajimi, le Pr A. Dhieb, affirme : «On peut sautiller comme un cabri en parlant de la richesse de notre dialecte, notre dialecte, notre dialecte...». Nous pourrions lui rétorquer « qu'on peut japper comme un roquet en parlant de la pureté de notre langue arabe, langue arabe, langue arabe... ». Mais cela ne ferait pas avancer le schmilblick, comme dirait Pierre Dac. Plus loin dans le même article, cet honorable professeur qualifie, à plusieurs reprises, notre langue tunisienne d'argot. Voici la signification de ce mot dans l'encyclopaedia Universalis « L'argot est la langue spéciale de la pègre ou plus exactement, à l'origine, celle des gueux ou mendiants professionnels, puis celle des voleurs, tricheurs, escrocs de tout genre». Comme vous y allez fort, professeur! Ce n'est guère convenable d'insulter ainsi les Tunisiens, et par-delà, tous les Arabes. Car à ma connaissance, personne n'utilise l'arabe livresque dans sa vie quotidienne, tous les Arabes parlent des idiomes, sauf vous, naturellement. Sartre avait écrit « L'enfer, c'est les autres » ; auquel l'abbé Pierre avait répondu : « Je suis intimement convaincu du contraire. L'enfer, c'est soi-même coupé des autres».
Prenant le même train que R. Ghannouchi, qui considère que maîtriser la langue française aux côtés de la langue arabe, équivaut à une pollution linguistique, le professeur écrit : «Ceux qui défendent l'argot tunisien sont ceux qui maîtrisent le mieux la langue de Lamartine ». Ainsi, il met dans le même sac d'infamie la langue française et la langue tunisienne, la darija. Je suppose donc qu'il n'utilise ni l'une ni l'autre dans ses communications scientifiques ou autres. Nos immigrés en France sont tous en danger, il faut absolument penser à leur interdire d'apprendre le français. Ne plus délivrer de passeport aux francophones. Quant aux touristes français, pollueurs potentiels, ils ont le choix : soit ils apprennent l'arabe classique avant de venir se dorer chez nous, soit ils restent chez eux. Avec les islamistes au pouvoir, l'enseignement des langues étrangères polluantes (français, italien, espagnol, etc.) disparaîtra ; sauf l'anglais, naturellement. Ainsi, nous serions normalisés comme les pays du Golfe (Arabie Saoudite, Qatar, etc.), c'est-à-dire que nous deviendrions des pions US. Quant aux professionnels du tourisme, du garçon de restaurant au directeur d'hôtel, et qui parlent souvent plusieurs langues étrangères, ils sont tellement pollués qu'on peut les considérer comme perdus pour la Oumma.
Pourtant, curieusement, tous les pays développés encouragent l'apprentissage de plusieurs langues étrangères, et ce, dès l'école maternelle. Pourquoi donc ?
Pour y répondre, nous allons prendre l'exemple de deux petits pays européens multilingues : le Luxembourg (0,5 million d'habitants) et la Suisse (8 millions d'habitants). Selon les avis de R. Ghannouchi et du professeur Dhieb, ces pays devraient souffrir d'une pollution linguistique insupportable. Mais la réalité, décrite par les Luxembourgeois et les Suisses, est tout autre et la conclusion de leurs chercheurs sont à l'opposé des avis ci-dessus.
Le multilinguisme luxembourgeois et ses avantages
La reconnaissance de 3 langues au Grand-duché — le luxembourgeois, l'allemand et le français — et leur pratique quotidienne présentent de multiples avantages pour les Luxembourgeois. Au niveau politique, la maîtrise de 2, voire 3 langues européennes majeures — l'allemand, le français et l'anglais — a permis au Luxembourg d'agir concrètement en faveur de la construction européenne et de devenir même un facteur unificateur et progressiste. Au niveau universitaire, le multilinguisme permet aux étudiants luxembourgeois de poursuivre leurs études universitaires dans tous les pays francophones, germanophones ou anglophones. L'anglais est, en effet, enseigné de manière très poussée dans l'enseignement secondaire, en plus d'autres langues telles que, au choix, le latin, l'espagnol ou l'italien. Cette situation linguistique favorise l'adaptation des résidents non luxembourgeois à la vie quotidienne luxembourgeoise, puisqu'ils peuvent également s'exprimer en français ou en allemand. Le multilinguisme représente donc à la fois l'ouverture vers l'extérieur et la volonté d'accueillir l'extérieur au Luxembourg.
Le multilinguisme suisse, un avantage compétitif
L'analyse économique ne tient en général pas compte du rôle des langues. Le multilinguisme suisse est source de richesse, et pas seulement culturelle: cette particularité génère 46 milliards de francs par année, soit 9% du produit intérieur brut (PIB). C'est ce que révèle une étude réalisée par l'Université de Genève.
Il s'agit d'une première: jamais encore on n'avait calculé la valeur économique des compétences linguistiques d'un pays, ont indiqué les chercheurs lors de la présentation de leurs travaux, en octobre 2011, à Berne. C'était l'objectif de leur projet de recherche, «Langues étrangères dans l'activité professionnelle» (Leap).
Les chercheurs rappellent que la Suisse compte quatre langues principales, par ordre d'importance, l'allemand, le français, l'italien et le romanche, parlé par 0,5% de la population suisse. L'anglais, de plus en plus pratiqué dans l'économie, est aussi enseigné de plus en plus tôt dans les écoles du pays, surtout en Suisse alémanique.
Conclusion des chercheurs: le multilinguisme suisse rapporte 46 milliards de francs, soit l'équivalent du PIB tunisien ! (44 milliards de Dollars). «Nous trouvons ici la confirmation que les compétences linguistiques sont un bon investissement pour l'économie vue comme un tout, et pas seulement pour l'individu lui-même ou pour l'Etat», a expliqué François Grin, directeur du projet Leap, à swissinfo.
«Les résultats corroborent les commentaires de certains membres du Conseil fédéral concernant l'attractivité de la place économique suisse, un bon endroit pour faire des affaires, grâce au fait que les habitants parlent plusieurs langues», explique François Grin. Collectivement, les personnes et les organisations suisses travaillent communément avec trois, quatre ou cinq langues, selon le professeur d'économie genevois. Cette capacité contribue à la création de valeur et donne un avantage concurrentiel certain à la Suisse. «La convergence entre les résultats économiques et nos préoccupations culturelles, politiques et sociales à propos du plurilinguisme en Suisse est intéressante, analyse le professeur. Nous devons prendre soin de nos quatre langues nationales, et de l'anglais, tout en développant nos talents pour d'autres langues: la pertinence de ce fait est acquise sur le plan politique et sociologique et nous voyons maintenant qu'elle l'est aussi d'un point de vue économique».
Langue et dialectes arabes
L'arabe moderne (ou littéral) fournit une forme universelle et standard de la langue qui est communément employée dans les journaux, les émissions de radio ou de télévision, dans la poésie et les conversations entre les gens arabophones de dialectes différents. Les Arabes utilisent la langue dialectale dans tous leurs échanges quotidiens, mais quand ils rencontrent une situation linguistique appelant une plus grande formalité, l'arabe moderne est le moyen choisi. L'arabe standard, ou arabe littéral, est plus ou moins le même à travers le monde arabe, tandis qu'il y a de grandes différences entre les nombreux dialectes nationaux. En fait, certaines différences sont si grandes que beaucoup de dialectes sont mutuellement incompréhensibles. Un Syrien ou un Palestinien, par exemple, ne comprend pas le dialecte maghrébin.
L'arabe : une norme en décalage socio-historique
Depuis plus de 14 siècles, malgré tous les efforts d'arabisation, aucun peuple arabe ne parle l'arabe littéral. Chaque pays arabe dispose de son propre idiome, dit « arabe dialectal ». L'arabe littéral reste donc l'apanage des gens cultivés, ou ayant un niveau donné d'études. Un citoyen qui n'a pas étudié l'arabe littéral ne comprend pas, ou peu, l'arabe des médias, parce que cet arabe n'est pas la langue du peuple, quoi qu'en disent nos dirigeants, notre Constitution et nos élites. Ainsi donc, les indépendances des pays du Maghreb, au lieu de sonner l'heure de l'émancipation des langues natives, dont la langue derija, ont minoré ces langues au profit d'une arabisation dont personne ne parvient à déterminer l'ancrage effectif. On a certes produit un espace «arabe moderne» qui se cristallise dans les médias et la littérature. Cependant, cet arabe moderne n'est jamais parvenu à devenir la langue maternelle de quiconque. Une fois franchie la zone de l'écrit, les locuteurs arabes reviennent à leurs langues natives et maternelles.
La langue vernaculaire du Maghreb
L'ensemble de parlers populaires maghrébins est appelé maghribi par les linguistes arabes. Les pièces de théâtre, les «talk-shows» et autres émissions radio diffusées ou télévisées en maghribi sont les plus suivis par le public maghrébin, comparativement aux émissions analogues émises en arabe littéral. D'ailleurs, ce même public préfère les films égyptiens parlant la langue égyptienne plutôt que la langue arabe classique. Celle-ci leur donne un air artificiel et guindé.
Le maghribi est une langue vivante, à la fois très majoritaire dans le corps social et très minorée par les institutions culturelles et étatiques maghrébines. C'est la langue maternelle de plus de 100 millions de locuteurs. Elle est de plus en plus utilisée sur Internet, sans règle et sans standardisation. Les jeunes internautes sont en train de l'imposer dans la communication écrite en utilisant souvent l'alphabet latin, et quelquefois l'alphabet arabe, pourtant mieux adapté. Cette langue dispose d'un vivier lexical riche, issu successivement du berbère, du punique, du latin et de l'arabe. Elle peut constituer un socle commun et unificateur pour tous les Maghrébins sans distinction de classe ou de milieu social. L'unité maghrébine est un objectif autrement plus réaliste et plus profitable qu'une unité arabe chimérique.
L'italien de Dante, l'espagnol de Cervantès et le français de Lamartine étaient en leur temps (avant la Renaissance) des dialectes du latin, des langues de seconde zone, pratiquées par la masse et méprisées par l'élite. La Renaissance européenne, c'était aussi et surtout la naissance officielle et dans les faits de ces langues. Elles ont remplacé le latin, qui était alors (comme l'arabe littéral de nos jours et de toujours) la langue liturgique, celle des lettrés et des élites. Les Européens ne s'en portent pas plus mal. Les locuteurs de ces langues ne parlent pas latin, mais on les désigne (et ils se considèrent) comme étant des peuples latins. De la même manière qu'aucun peuple latin ne parle latin, aucun peuple arabe ne parle l'arabe littéral des livres. Cessons donc de nous mentir à nous-mêmes, et regardons la réalité en face.


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