• «Le rôle des Etats est primordial pour sortir de la crise mondiale» L'économiste américain et double Prix Nobel Joseph Eugène Stiglitz a donné, hier, au Centre national de la cartographie et de la télédétection à L'Aouina, une conférence sur le thème «La crise économique mondiale, les paris et les solution», et ce, en présence de M. Kamel Morjane, ministre de la Défense nationale. Organisée par l'Institut de défense nationale, cette conférence a réuni des auditeurs de l'institut, ceux de la troisième session de l'Institut de développement des compétences des hauts fonctionnaires de l'ENA et des représentants des institutions financières et économiques tunisiennes. M. Stiglitz s'est félicité, à cette occasion, de la stratégie préventive mise au point par la Tunisie pour conforter l'économie du pays et soutenir le développement. M. Stiglitz a souligné, lors de cette conférence, que la reprise économique serait plutôt lente et qu'on ne pourrait parler de fin de crise qu'à partir de 2012. Il a également exposé lors de cette intervention les causes principales de la crise mondiale et les démarches à envisager pour mieux s'en sortir. Le conférencier a ainsi noté que les Etats devraient jouer un rôle central pour sortir de la crise et s'impliquer clairement dans la gestion de l'après-crise à travers, notamment, un ensemble de mesures. Il a ainsi rappelé que l'Etat est tenu de jouer un double rôle pour prévenir les crises, d'une part, et pour s'en sortir, d'autre part. Selon M. Stiglitz, la crise financière actuelle serait l'une des plus graves qu'aie connues l'humanité. Elle a, en effet, émergé dans le centre du capitalisme mondial, à savoir les Etats-Unis d'Amérique. Dans le même ordre d'idées, le spécialiste distingue deux périodes dans l'histoire économique mondiale, la première s'étale de l'après-Seconde Guerre mondiale jusqu'aux années 1980, la secondes des années 80 jusqu'à aujourd'hui. La première période n'a connu aucune crise économique, la seconde est par contre chargée de crises de ce genre. Une approche comparative des deux périodes permettrait, selon M.Stiglitz, de relever que la différence réside surtout au niveau de la participation des Etats dans la régulation des systèmes bancaires et financiers. La grande liberté accordée aux banques, durant la seconde période identifiée, aurait donc généré une mauvaise gestion des fonds, d'où l'éclatement de la bulle financière. Le Prix Nobel rappelle d'un autre côté que la crise actuelle a eu des incidences négatives autant sur le plan économique que social. Il a insisté sur le rôle que doivent jouer les Etats pour s'en sortir à travers, notamment, la mise en place d'un système de protection contre les crises, la garantie et l'amélioration du développement et la mise en place d'un équilibre économique. Réagir à temps Concernant la convertibilité totale de la monnaie, le conférencier a souligné que cette perspective est à considérer avec prudence. Les Etats devraient ainsi être indépendants au niveau de leur épargne et veiller à être indépendants du marché extérieur. Fait qui n'exclut pas de développer les IDE. Pour ce qui est des pays en voie de développement, une telle perspective serait, selon M. Stiglitz, chargée de risques. Pour y arriver, sans trop de pertes, il a noté que les solutions ne manquent pas, notamment l'imposition de taxes sur les capitaux qui entrent dans le pays. Il a d'un autre côté soulevé qu'aucun rapport direct n'existe entre la croissance d'un pays et la convertibilité de sa monnaie. M. Stiglitz a, en outre, souligné que des risques de bulle pèsent sur les marchés émergents, ajoutant que la question centrale qui se pose, aujourd'hui, est relative au moment opportun d'intervenir, «faut-t-il être sur-réactif ou trop long pour réagir ?». Le Prix Nobel a également indiqué que l'accent gagnerait à être mis sur les stratégies qui favorisent un développement durable, une croissance soutenue et une équité sociale. Il a, enfin, souligné qu'il est primordial, aujourd'hui, de se concentrer sur la stabilité financière et sur l'adoption de politiques efficaces, ajoutant que les pays en développement ont besoin d'un modèle de développement plus équilibré.