Le meilleur berceau pour un nouveau-né n'est autre que les bras de sa mère. Mais cette situation pourtant naturelle et évidente n'est pas garantie à tous les bébés. Ceux qui naissent hors mariage se trouvent dans 50% des cas abandonnés par leurs mères. Au sevrage prématuré s'ajoute un autre, encore plus cruel, qu'est le sevrage affectif. Pour remédier à ce traumatisme et apporter au bébé la protection et la tendresse dont il a besoin, il existe des unités de vie où l'on recueille, d'une manière provisoire, ces anges. L'unité de vie relevant de l'association Diar el Amal recueille depuis six ans des nouveau-nés abandonnés ou encore ceux dont la situation sociale et économique de la mère empêche cette dernière de garder sa progéniture. «Nous travaillons en coordination avec l'Institut national de protection de l'enfance (INPE). Nous l'informons au fur et à mesure des places disponibles et nous accueillons des bébés en phase d'attente de réglementation de situation civile», indique Mme Rafika Ben Youssef, responsable de l'unité de vie. Actuellement, la capacité d'accueil dans cette unité de vie est de 16 lits. La totalité des bébés recueillis sont nés hors des liens du mariage, ce qui exclut d'emblée l'incapacité proprement économique des parents. Le problème réside surtout dans l'absence et la réticence quant à l'engagement. «Dans certains cas, la mère n'a pas les données civiles permettant de retrouver le père», indique notre interlocutrice. Incapable d'assumer seule la responsabilité d'un enfant, de subvenir à ses besoins et de faire face au regard impitoyable de la société, la mère célibataire recourt aux parties concernées pour solliciter une période de grâce, le temps de régler sa situation par les liens du mariage ou encore par la sensibilisation de son entourage quant à la nécessité de garder l'enfant. D'autres s'arrangent pour trouver une source de revenus à même de subvenir aux besoins du couple mère-enfant. «La période de grâce est accordée par le juge. Elle s'étale sur trois mois à renouveler selon les circonstances. Durant cette période, l'enfant est recueilli dans une unité de vie où il trouve un climat aussi favorable que possible à son épanouissement», indique Mme Ben Youssef. En effet, des nourrices sont actives 24 heures sur 24, apportant aux bébés l'affection dont ils ont besoin. Fatma est nourrice depuis trois ans. Elle s'est investie dans ce noble travail par conviction. «Dans notre famille, nous avons adopté une fille qui représente notre rayon de soleil. Ici, je m'occupe des enfants par amour. Certes, il m'arrive de m'attacher à un enfant plus qu'à un autre. Toutefois, il faut toujours se mettre à l'idée que l'enfant finira par quitter l'unité de vie pour rejoindre sa famille ou une famille adoptive», indique la nourrice. Sihem Amdouni, elle, y travaille depuis quatre ans. Pour elle, il faut aimer cette mission pour pouvoir la réussir. «Ce sont tous des enfants formidables et notre rôle consiste à les doter de l'affection et de la protection dont ils ont besoin», souligne -t-elle. Il y a lieu de noter que si certaines unités de vie se chargent de recevoir les dossiers d'adoption en cas d'abandon confirmé de l'enfant, d'autres tiennent à ce que le bébé soit gardé par sa mère. C'est le cas de l'unité de vie Dar el Sebil à El Mourouj, fraîchement créée par l'Association tunisienne de l'encadrement de la mère et de l'enfant « Sebil». «Dans l'unité de vie Sebil, nous insistons sur l'encadrement de la mère célibataire et nous faisons de notre mieux pour qu'elle garde son enfant. Nous lui apportons ainsi des aides dont elle a besoin ainsi que la possibilité d'une formation à même de lui ouvrir la voie de l'insertion professionnelle et de l'autonomie économique», indique Mme Mounira Kaâbi, responsable de l'unité de vie Sebil. Elle ajoute: «La situation de la mère célibataire est fort délicate. Elle est appelée à faire face au regard de la société et assumer sa faute, ce qui n'est pas facile, notamment dans certaines régions. C'est pourquoi il est de notre devoir de l'aider à régler sa situation et de garder son enfant. D'ailleurs, en cas d'abandon confirmé, nous nous adressons à l'INPE pour qu'il se charge de placer l'enfant dans une famille d'accueil et non d'adoption».