Ils étaient, hier, selon les organisateurs, près de 15.000 citoyens, militants et activistes de la société à avoir répondu «à l'appel de la patrie» et à investir la salle omnisports de Monastir pour venir écouter Béji Caïd Essebsi, exposer son approche des événements qui secouent la Tunisie depuis quelques semaines et s'abreuver de ses conseils et de sa démarche quant à la meilleure stratégie à mettre en œuvre en cette période particulière par laquelle passe la Tunisie. Qu'attendent-ils de ce grand rassemblement qui rappelle un peu l'époque où les meetings destouriens créaient l'événement et mobilisaient les Tunisiens et les Tunisiennes par milliers ? Considèrent-ils que Béji Caïd Essebsi est l'homme de l'étape ? Estiment-ils que les destouriens ont toujours une place à occuper au sein du paysage politique national post-révolution ? La Presse a porté ces interrogations à nombre de participants au grand meeting de Monastir, lesquels ont convenu que «cette grande rencontre aurait dû intervenir bien avant, et que le retour des destouriens authentiques ne peut signifier que le retour des Tunisiens à la raison, au dialogue et à la tolérance». L'unité nationale, rien que l'unité nationale Pour Mohamed Salah Saâdi, retraité de la Société nationale de distribution du pétrole (Sndp), il s'agit d'un «rassemblement qui sonne le retour à la raison dans le sens de la construction bourguibienne de l'unité nationale. Et c'est le mot qui a été le plus utilisé par Bourguiba. Aujourd'hui, nous avons plus que jamais besoin d'unité nationale. Il ne s'agit nullement de la pensée unique mais bien de la cohésion entre des citoyens dignes de ce nom». «Je suis convaincu, ajoute-t-il , qu'il y a un déficit de personnalités politiques qui ont le charisme nécessaire pour unir les Tunisiens. Si El Béji a la sagesse qu'il faut et il l'a montré à un moment où nous avions eu peur de voir notre révolution déraper. Il nous a sortis d'une crise qui menaçait de faire entrer la Tunisie dans l'impasse». Quant à Abdelaziz Jaïdi, secrétaire général adjoint de l'Union des travailleurs tunisiens, qui participe en tant qu'invité de l'Association nationale de la pensée bourguibienne, organisatrice de la rencontre, il souligne : «Si El Béji Caïd Essebsi est une personnalité nationale qui n'a plus besoin d'être présentée ou évaluée. Je suis venu participer à la rencontre d'aujourd'hui en attendant beaucoup de l'initiative lancée par Caïd Essebsi». Que pense-t-il de la devise «L'appel de la patrie», sous laquelle est placée la rencontre d'hier ? Le responsable syndical pense que «ce slogan est remarquable car il rassemble les Tunisiens et ne les divise pas. Nous sommes présents à Monastir en tant qu'organisation nationale qui observe et suit attentivement l'évolution de la vie politique nationale». Un discours rassurant sur l'avenir Sonia Ouerdani, présidente de l'association «Femmes tunisiennes touche pas à mes droits» révèle être venue au meeting de Monastir «avec les membres de ma famille pour exprimer notre refus du spectre de la dictature qui menace de retourner et notre rejet de toute forme d'intégrisme. La rencontre d'aujourd'hui aurait dû se tenir bien avant». Comment réagit-elle à l'initiative de Caïd Essebsi ? «Si El Béji, précise-t-elle, nous intéresse avec ses idées et son parcours militant. Ses paroles nous rassurent et son ambition ainsi que son rêve pour la Tunisie nous mobilisent. Il me donne personnellement le signal qu'il y a des gens qui défendent la Tunisie contre tous ceux qui cherchent à lui nuire. Si El Béji nous rappelle notre identité et notre tunisianité. Le choix de Monastir pour abriter une rencontre d'une telle symbolique nous rappelle Bourguiba, le père de tous, le défenseur de la femme tunisienne et le concepteur de la modernité tunisienne». De son côté, le jeune secrétaire général du syndicat de base de Nouvel Air, Anis Larbi (UTT), pense que «les destouriens ont encore leur place au sein du paysage politique national et les Tunisiens ont toujours besoin de leur expérience, de leur expertise et de leur savoir-faire en cette période où l'on a besoin de cette expérience qui manque cruellement de nos jours à ceux qui nous gouvernent et qui nous réservent quotidiennement une surprise, malheureusement fâcheuse». Ecrivain et militant pour la liberté et la dignité, Hassouna Mosbahi nous livre, avec sa passion et son enthousiasme coutumiers, ses impressions : «Je sens que la République est menacée. Je sens qu'il y a des gens qui sèment la discorde. Je sens que les ennemis de la démocratie vont tout dominer. Je suis venu pour assister à cette belle fête qui symbolise la Tunisie que j'ai toujours aimée et rêvée. La Tunisie plurielle, moderne et ouverte à toutes les cultures du monde refusant la culture de la désertification et de la souffrance. J'étais parmi les premiers à avoir salué Si El Béji lorsqu'il a été nommé au poste de Premier ministre. Il a su, avec l'intelligence et la grandeur des hommes d'Etat valeureux, redonner à la Tunisie ses valeurs de tolérance, d'ouverture et de dignité». Quant au retour sur la scène politique des destouriens, Hassouna Mosbahi est on ne peut plus clair et concis : «J'ai toujours dit et redit que le vide politique ne profite qu'aux ennemis de la Tunisie. Malgré les graves fautes qu'ils ont commises, les destouriens ont le droit d'exister politiquement. Leur rôle déterminant lors de la lutte pour l'indépendance et lors de l'édification de l'Etat moderne ne peut, eu aucune manière, être occulté».