Par Habib CHEKILI La réponse est évidemment aussi immédiate qu'univoque! Bien sûr, rassembleur ! Cependant, que se passe –t-il dans notre pays ? Les graves turbulences qui ont suivi l'éclatement de la révolution du 14 janvier 2011 ayant chassé l'ex-président Ben Ali n'en finissent pas de perdurer, malgré une amélioration relative de la sécurité. La pacification et l'amélioration des conditions sociales globales que nous avons observées et vécues sous le gouvernement de Béji Caïd Essebsi, qui a permis avec ses équipes et réseaux sociaux de stabiliser le pays et de réussir les premières élections authentiquement démocratiques de notre histoire, n'ont malheureusement pas continué dans le bon sens, après les élections constitutionnelles du 23 octobre 2011. En effet, ce jour-là, le peuple s'est exprimé librement et a donné la majorité au mouvement Ennahdha, exerçant ainsi sa légitime souveraineté que nous respectons tous, à notre grande satisfaction et dans l'impatience de voir alors nos heureux élus constituants s'organiser rapidement et convenablement, pour mettre en place les institutions transitoires et le gouvernement provisoire afin de parachever la stabilisation sociale, poursuivre le redressement économique et entamer la rédaction d'une nouvelle Constitution. Malheureusement, un temps, aussi long que précieux a été gaspillé, après les élections dans des mises au point, tractations, hésitations, curée et précipitation pour se partager les postes du pouvoir. A part ce gaspillage de temps, le citoyen moyen a observé avec déception une certaine tendance à rechercher le pouvoir et à se servir plutôt qu'à servir. Le gouvernement a été finalement constitué. Mais, jusqu'à ce jour, après environ 4 mois, les nombreuses promesses faites par la majorité gouvernante ont été insuffisamment tenues. Que voyons-nous et que vivons-nous aujourd'hui au quotidien ? Le chômage reste un épineux problème, en régulière augmentation. L'économie demeure désespérément stagnante, malgré les efforts de la Banque centrale qui réduit. Les taux d'intérêt, pour soutenir les investissements, en vain. Les prix ne font qu'augmenter, de plus en plus au cours des derniers mois, mettant en danger le pouvoir d'achat des classes moyennes et défavorisées. Les investisseurs restent réservés et prudents, et le tourisme ne redémarre pas pour cause de méfiance, surtout sécuritaire. Donc, tous les secteurs économiques sont en situation de faiblesse, avec menace de longue récession et même de futures difficultés de paiement. Que voyons-nous encore, sur le plan social ? Les grèves, les sit-in, et autres perturbations et contestation n'arrêtent pas ,un peu partout en Tunisie .Nos étudiants, intellectuels, journalistes, professeurs et autres représentant de l'intelligentsia sont fréquemment humiliés, agressés moralement par des injures, menaces et des accusations d'apostasie et physiquement par coups et blessures. Les auteurs de ces agressions sont des bandes incontrôlées de jeunes extrémistes, fanatiques salafistes, que nous n'avions jamais vus auparavant, et qui ont fait leur apparition ,après les élections, de plus en plus téméraires et menaçants. Ces bandes investissent des établissements universitaires ou des réunions de partis d'opposition ou des stations médiatiques et font leur loi, en conquérants, effrayant nos jeunes et perturbant leur travail, et ce, impunément car la police n'intervient pas, faute, semble-t-il, d'instructions de leurs autorités de tutelle, lesquelles restent spectatrices, sans possibilité d'assistance à citoyens en danger. Quelle triste vision d'absence de protection du citoyen ! Par ailleurs, nous observons avec regret les rapports conflictuels du pouvoir avec les syndicats, ainsi qu'avec certains partis d'opposition et organismes de la société civile. Quand l'Ugtt et l'Utica ont voulu engager une collaboration pour répondre aux défis du chômage, certains y ont vu une attitude d'hostilité contre la majorité au pouvoir. Submergée par le poids des problèmes qui se posent au gouvernement, la majorité panique, accuse les uns et les autres de complots, de volonté de blocage, et surtout les journalistes de s'exprimer ,estimant que la liberté d'expression des journalistes risquerait d'éloigner les investisseurs et les touristes, selon certains. Alors, peut-être, faudrait-il leur dire : silence, on tâtonne ! D'autre part, nous avons vu des religieux, fanatiques, véritables gourous barbus, invités dans notre pays pour haranguer les foules et introduire dans notre société des dogmes rétrogrades, de refoulement de la femme, d'excision des fillettes et autres préceptes aussi tarés que rétrogrades, en provenance de sociétés arriérées qui n'ont rien à voir avec notre société ouverte et émancipée, tournée vers l'avenir et le progrès. Nous avons vu également des chaînes de radio et télévision, sous pression, vivant le calvaire de l'agressivité des bandes extrémistes salafistes avec jugement et même emprisonnement pour délit d'opinion, de quoi se demander où et à quelle époque nous sommes. Dans le pays qui a inauguré le Printemps arabe, celui de la liberté, ou ailleurs ? Comme le 14 janvier 2011 paraît loin de nous, actuellement ! Evidemment, avec tout ce gâchis et toutes ces incohérences, incluant des promesses non tenues de juger les coupables du pillage de la Tunisie, le gaspillage de nos ressources et énergies, tels que la non-reconduction de l'instance pour les élections qui a brillamment réussi les élections du 23 Octobre 2011 et permis à Ennahdha de prendre, légitimement, le pouvoir, la mise en place immédiate d'une instance judiciaire crédible et authentiquement représentative du corps judiciaire, pour rétablir la justice, fiable et autonome dont nous rêvons pour conduire notre pays vers le progrès, la permissivité du pouvoir public vis-à-vis des extrémistes, salafistes, qui perturbent l'ordre public et pourrissent la vie de nos jeunes, étudiants , intellectuels , créateurs , artistes, et autres diverses inconséquences, ne peuvent que diviser la société, installer la discorde entre les gens créer des animosités en culpabilisant gratuitement les gens, en les accusant mensongèrement d'être mécréants et autres choses stupides. Avons-nous besoin, surtout maintenant, en plein point critique de notre révolution, de diviser et d'installer la zizanie et la discorde dans notre société ? Diviser pour régner est une pratique qui relève de l'histoire obscure, c'est l'arme des faibles et des incompétents. Personne n'est gagnant dans la division. C'est plutôt l'union qui fait la force. C'est pour cette raison que je m'adresse au parti Ennahdha, qui a réussi à obtenir la majorité aux élections constitutionnelles du 23 octobre 2011, pour dire que la meilleure stratégie est le rassemblement. Unissez nos concitoyens autour des grandes valeurs républicaines et démocratiques, de la justice, du respect de l'autre dans ses idées et croyances, de la culture d'être au service d'autrui, au lieu de se servir, de la préférence de la compétence au népotisme. Il s'agit de développer aux plus hauts niveaux l'esprit de crédibilité, et ce, pour porter sur nos concitoyens un effet d'attirance, de confiance, de proximité, de compréhension, d'amitié, j'allais , même dire, de séduction, et ce, pour susciter l'adhésion autour d'un projet de société, noble qui motiverait et intéresserait tout le monde, en vue de mettre le pays au travail, avec des objectifs clairs et crédibles , pour pousser le train de l'économie de notre pays , tous dans le même sens. Ouvrez la voie à tous les Tunisiens, quelles que soient leurs origines, croyances, particularités ou opinions, avec l'égalité de tous devant la loi et avec les mêmes droits et les mêmes devoirs pour tous, afin de les engager dans le travail et dans la volonté de servir leur pays qui traverse une période difficile et qui a besoin de tous pour assurer son redressement et son autonomie. Séparez-vous des extrémistes, intégristes, salafistes, wahhabites, qui sont étrangers à nos traditions et coutumes pacifistes, qui veulent nous faire reculer, alors que nous voulons avancer, qui veulent nous rattacher, artificiellement, à des sociétés médiévales et obscurantistes, alors que nous voulons aller dans le sens du progrès de la science et de la tolérance, comme les pays évolués et émergents. Ces gens sont dangereux. Ils veulent confisquer le pouvoir et ruiner notre pays. Nous ne les laisserons pas faire ! Combattez-les, immédiatement, même si certains peuvent être dangereux, sinon ils risquent de devenir vos fossoyeurs et notre ruine ! Enfin, vous voulez être un parti prospère et moderne !? Conquérir et exercer le pouvoir, avec modération, modernité, respect de tous, à la manière turque, qui semble vous inspirer et refléter votre modèle ? Pourquoi pas ! Ce vœu est accessible ! Pour l'atteindre, soyez rassembleurs, unificateurs, équitables, démocrates, modernes, pour exercer l'effet d'adhésion qui est la clé de la réussite !