Au lendemain d'une révolution populaire ayant fait chuter, comme un château de cartes, tout un régime totalitaire et hégémonique qui n'a cessé de présenter l'agent de sécurité en tant qu'ennemi du citoyen, grand rempart à toute forme d'expression et d'opposition, les tentatives de rompre avec le silence des temples de démons se sont, alors, multipliées au point d'exhorter l'appareil sécuritaire à repartir du bon pied pour être, à la fois, au service du citoyen et protecteur de l'ordre public. Une équation qui semble, aujourd'hui, difficile, mais pas impossible, dans la mesure où le système de réforme préconisé par le ministère de tutelle s'inscrit dans une logique de réconciliation citoyen-agent, une relation, jadis, tendue et souvent perturbée. Dans cette optique, le syndicat de base du régiment d'intervention à Naâssen (Ben Arous), en coordination avec le syndicat général des unités d'intervention de la Garde nationale, a voulu marcher dans le sillage de ces initiatives réformatrices afin de redorer son blason et rétablir le contrat de confiance avec le citoyen. Son secrétaire général, M. Issam Oueslati, nous a confié qu'il s'agit là d'un premier pas vers la réforme et l'inauguration d'une nouvelle ère de professionnalisme , du respect mutuel et d'engagement à mener notre pays à bon port. Lors d'une première rencontre de presse, tenue hier après-midi, au sein du club de la Garde nationale à La Soukra, l'image de l'agent de sécurité a été redorée, en reprochant à la machine sécuritaire d'être, depuis longtemps, lourde, violente et répressive. Aujourd'hui, il s'agit de bannir à jamais les mentalités préconisant la force et la loi de la jungle qui régnaient tout au long des années de braise. En ces temps de démocratie embryonnaire, il n'est plus question de revenir en arrière. Dans ce sens, M. Zoubair Aydi, secrétaire général du syndicat général des unités d'intervention de la Garde nationale, a révélé que le corps sécuritaire est plus déterminé qu'auparavant à franchir le cap, mieux disposé qu'il est à rectifier le tir pour renouer avec une nouvelle culture de citoyenneté, avec un nouveau mode d'emploi de l'arsenal juridique et institutionnel, au grand bonheur du citoyen et de l'intérêt suprême du pays. Toutefois, a-t-il ajouté, rétablir la confiance mutuelle citoyen-agent de sécurité est une véritable gageure, faute de moyens et d'outils nécessaires, mais aussi faute de communication et de dialogue interactif. Sans pour autant perdre de vue l'écart qui continuait de se creuser de plus en plus entre l'agent de sécurité en tant que pouvoir exécutif, les médias, le pouvoir judiciaire et le reste de la société civile. Une rupture qui, selon lui, rend difficile la mission de la réforme et de la réconciliation. Invité d'honneur à cette rencontre, M. Abdessattar Ben Moussa, président de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (Ltdh), a donné, dans cet ordre d'idées, une conférence ayant pour thème « l'agent de la sécurité entre la protection de l'ordre et la préservation des droits de l'Homme ». Une alternance d'objectifs qui risque de mettre l'agent entre l'enclume et le marteau dont seule la bonne gouvernance pourrait équilibrer la donne. Et de faire valoir que ce pari sécuritaire ne saurait se réaliser que dans une politique de réforme globale touchant tous les rouages de l'Etat et des institutions. Un vrai chantier que devrait engager l'ensemble de la société, en se basant sur le dialogue et le respect mutuel. Il a déclaré qu'il s'agit là d'un bond en avant au profit du citoyen et de la citoyenneté. «C'est tout comme le premier pas de l'astronaute Armstrong sur la lune», a-t-il comparé. Pour mieux approfondir sa réflexion, M. Ben Moussa a articulé sa communication sur deux axes fondamentaux, à savoir la réforme juridique de l'appareil sécuritaire et le changement des mentalités au niveau comportemental et relationnel. C'est dire qu'il s'agit de faire rayonner l'image du secteur tant dans le texte que dans la pratique. Il s'agit, en fait, de se réorganiser, en faisant preuve de professionnalisme, de neutralité, de transparence et de rejet de tout abus de pouvoir lequel n'engendre enfin que la violence, la tension dans les relations et l'atteinte à la liberté et aux droits de l'Homme. Et d'enchaîner qu'il faudrait désormais rompre avec l'intervention musclée lors des manifestations pacifiques et respecter la déontologie du métier. Et le conférencier de souligner que cette restructuration fondamentale du secteur est en mesure de reconsidérer le rôle de l'agent de sécurité, en tant qu'acteur agissant en matière de développement et de démocratie. Car, selon lui, une réforme radicale et continue devrait se baser sur une nouvelle logique de rapport citoyen-agent, laquelle logique est tributaire d'une formation poussée en termes de connaissances requises et de comportements sur le terrain, tout en renforçant les structures de contrôle et d'encadrement sécuritaires.