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Céréales : nous demandons de revoir les critères du calibrage
Entretien avec : M. Ahmed Hnider Jarallah, président de l'Utap
Publié dans La Presse de Tunisie le 28 - 05 - 2012

• Des quantités de lait déversées dans les oueds ou livrées aux usines de fromage à prix réduits vu le refus des centrales laitières de les accepter
• L'endettement constitue l'un des principaux problèmes des petits agriculteurs
• Plusieurs agriculteurs n'arrivent pas à couvrir les frais de production
• Manque de main-d'œuvre lors des campagnes agricoles dans toutes les régions du pays
Alors que la Tunisie aspire à réaliser son autosuffisance alimentaire – du moins dans certains produits de base – plusieurs secteurs agricoles souffrent aujourd'hui de problèmes structurels et conjoncturels. En effet, plusieurs agriculteurs ne parviennent pas encore à couvrir le coût de production vu l'augmentation des prix des matières premières et des intrants et la chute des prix de vente à la production. En plus, nombre d'agriculteurs – de petite taille notamment – sont endettés ou surendettés et ne parviennent pas à rembourser les crédits contractés.
Malgré ces problèmes, l'approvisionnement du marché se fait d'une façon continue à des prix hors de portée des bourses moyennes. Il a fallu l'intervention des pouvoirs publics pour rationaliser un tant soit peu les prix de vente au public. Mais les agriculteurs estiment qu'ils ne sont pas responsables de ces hausses vertigineuses des prix. Pour preuve, à l'occasion des marchés de vente du producteur au consommateur organisés par l'Office des terres domaniales (OTD) et l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap), les prix proposés sont beaucoup plus bas que ceux pratiqués dans les marchés municipaux.
La Tunisie est encore obligée aujourd'hui d'importer d'importantes quantités de céréales pour satisfaire la demande, dans la mesure où la production nationale est de loin insuffisante. Les importations concernent aussi des quantités de viandes rouges et de fruits pour réguler les prix et diversifier l'offre. Parfois, l'Etat a recours au marché extérieur pour importer des produits connaissant une pénurie comme c'est le cas pour la pomme de terre en période de soudure.
Du chemin reste encore à faire pour assurer le rendement escompté des activités agricoles en s'attaquant aux problèmes structurels afin que les agriculteurs puissent travailler dans les meilleures conditions et réaliser des bénéfices leur permettant de couvrir le coût de production. M. Ahmed Hnider Jarallah, président de l'Utap, a bien voulu répondre à nos questions pour nous donner une idée approfondie sur l'état des lieux du secteur.
Pouvez-vous nous donner une idée sur le déroulement des différentes campagnes agricoles et dans quelles conditions travaillent les agriculteurs ?
Le secteur agricole vit de grands problèmes qui s'expliquent par un endettement de nombreux petits agriculteurs. La valeur totale de ces dettes est de l'ordre de 450 MD, chiffre porté à 1.170 MD si l'on tient compte du taux d'intérêt. Ces dettes concernent 70% des petits agriculteurs. Ce problème a freiné le développement et l'investissement dans le secteur agricole dans la mesure où les agriculteurs ne sont plus en mesure de contracter de nouveaux crédits. Nous demandons de dispenser les agriculteurs du taux d'intérêt et d'échelonner le principal de la dette en examinant au cas par cas les dettes d'une valeur de 10.000 dinars et plus. On compte des personnes qui ont contracté des prêts et qui ne sont pas agriculteurs.
Pour ce qui est du déroulement des campagnes agricoles, il y a lieu de noter que le prix de référence des tomates a fait l'objet de deux interventions en 2008 et en 2010. A la faveur de ces interventions les prix pratiqués étaient respectivement de 95 millimes et 115 millimes le kilogramme pour les tomates destinées à l'industrie. Or ces prix ne couvrent que 28% du coût de la production. Nous proposons, en tant qu'organisation professionnelle des agriculteurs, 150 millimes le kg en tant que prix de référence avec une marge de bénéfice de 10 millimes. Nous sommes au milieu de la campagne et bientôt les unités de transformation vont ouvrir leurs portes. Au cours des dix dernières années, le coût de production a augmenté de 46%.
Pour ce qui est du secteur des céréales, nous demandons de revoir les critères de calibrage du blé pour éviter la diminution des quantités présentées par les producteurs et améliorer leur revenu. Les critères adoptés actuellement et qui sont utilisés depuis des années sont inéquitables et pénalisent les agriculteurs.
Et qu'en est-il du secteur du lait ? Les producteurs ont-ils atteint l'autosuffisance ?
Des problèmes sont également constatés dans le secteur du lait. Actuellement, nous sommes dans une période de haute lactation. Certaines quantités sont jetées dans les oueds ou vendues aux usines de fromage à 200 millimes le litre. C'est que certaines centrales de lait qui disposent de stocks pour faire tourner leurs machines refusent d'accepter les quantités produites et qui ont pourtant nécessité des dépenses importantes. La moyenne de production est de 1.900.000 litres alors que la capacité totale de transformation des huit centrales est d'environ 2.100.000 litres.
Le lait est vendu à 580 millimes le litre alors que le coût des fourrages est passé de 450 dinars la tonne en 2010 à 600 dinars en 2012. Autant dire que le prix ne couvre pas le coût de la production. Ce coût oscille entre 675 et 800 millimes le litre en fonction des modes de production et des régions. Nous proposons 756 millimes le litre, et ce, après une étude élaborée dans ce sens. Il s'agit de garantir au producteur une marge bénéficiaire raisonnable.
On a constaté que des vaches laitières sont dirigées en contrebande vers l'Algérie et la Libye car leurs propriétaires n'en tirent pas un profit acceptable. Avec l'entrée en production de l'usine d'assèchement du lait, des quantités importantes de la production pourraient être absorbées.
Le secteur agricole souffre d'un manque de main-d'œuvre et certaines campagnes agricoles, comme celle des olives, connaissent des difficultés à ce niveau...
C'est vrai que la main-d'œuvre fait défaut dans pratiquement toutes les activités agricoles. Récemment, un reportage a été diffusé à la télévision nationale montrant qu'un agriculteur a été obligé de recruter des travailleurs de la Côte d'Ivoire pour effectuer certains travaux car il n'a pas trouvé de travailleurs tunisiens. Pourtant, la journée est payée à 17d,500. Les chantiers ouverts par les précédents gouvernements ont accaparé tous les jeunes sans emploi dans les régions.
A mon avis, lors des grandes campagnes agricoles, on devrait suspendre ces chantiers pour orienter les jeunes vers le travail agricole. D'autant plus que ces chantiers ne sont pas toujours productifs dans la mesure où les jeunes recrutés ne font aucun travail et ne se soucient que de percevoir leur rémunération. Les agriculteurs sont disposés, en tout cas, à accueillir ces jeunes pour qu'ils participent aux activités agricoles.
Personnellement, j'ai été obligé de changer de stratégie. J'ai voulu axer mes activités sur les arbres fruitiers dont les fruits sont vendus sur pied et ce, parce qu'il n'y a pas assez de travailleurs qui acceptent de s'adonner au travail de la terre.
Vous avez formulé votre refus à l'autorisation préalable de l'exportation de certains produits agricoles vers la Libye...
En effet, je suis contre l'autorisation préalable, mais après des négociations de deux jours avec les représentants du ministère du Commerce et la réunion du Conseil ministériel, il a été décidé de suspendre cette autorisation préalable pour la pastèque, le melon, les abricots et les pêches exportés vers le marché libyen. Les négociations ont porté notamment sur la nécessité de mettre en place de nouvelles méthodes de travail en vue de faciliter les procédures administratives d'exportation des autres fruits vers la Libye. C'est que les fruits sont périssables et ne peuvent pas attendre une longue période avant leur exportation.
Il a été proposé également la mise en place d'un guichet unique regroupant les représentants des ministères de la Santé publique, du Commerce, entre autres, pour fournir les meilleures prestations aux exportateurs.
Les consommateurs ont constaté, au cours des derniers mois, une hausse vertigineuse des prix. Quelles en sont les raisons ?
Ce ne sont pas les agriculteurs qui sont responsables de cette hausse des prix. Pour preuve, lors du marché du producteur au consommateur, organisé par l'Utap les 12 et 13 mai 2012, on a constaté une baisse sensible des prix par rapport aux prix pratiqués sur les marchés. Plusieurs consommateurs sont venus s'approvisionner à prix réduit. A titre d'exemple, les tomates étaient vendues à 1d,400 le kg au lieu de 2d,300 dans les marchés et la pomme de terre à 650 millimes le kg au lieu de 800 millimes.
La contrebande, le manque de transparence des circuits de distribution et les intermédiaires semblent participer à cette hausse des prix. En tout cas, nous comptons organiser une nouvelle fois le marché du producteur au consommateur les 21 et 22 juin prochain au siège de notre organisation professionnelle et ce, pour permettre aux consommateurs de s'approvisionner en différents produits agricoles à des prix abordables.
Comment peut-on réaliser l'autosuffisance alimentaire au cours des prochaines années ?
L'autosuffisance alimentaire ne peut être réalisée qu'en respectant certaines conditions, à commencer par la conjugaison des efforts de toutes les parties prenantes. La concertation entre la profession et le ministère du Commerce doit prévaloir pour s'entendre sur les étapes à franchir ensemble. Il n'est pas normal de demander à un agriculteur dont le coût de production n'est pas couvert d'augmenter la production pour réaliser l'autosuffisance alimentaire. D'où la nécessité d'effectuer des réformes structurelles permettant aux agriculteurs d'avoir une marge bénéficiaire acceptable.
Pour ce qui est des céréales, à titre d'exemple, la production varie entre 15, 25 et 30 quintaux à l'hectare, alors que d'autres pays ont atteint les 120 quintaux à la faveur de nouvelles méthodes de production. En France, les producteurs ont créé le club de 100 quintaux à l'hectare. L'autosuffisance alimentaire est donc une responsabilité collective qui exige, cependant, de garantir les droits des agriculteurs.
Je voudrais formuler, à cette occasion, mon amertume pour le comportement de certains membres de l'Assemblée nationale constituante à l'égard de l'agriculture qui ne semble pas être leur premier souci. En effet, le dossier agricole est relégué au second plan dans la mesure où le seuil des compensations proposées n'a été que de 50 MD, alors que les taux d'intérêt des arriérés dus aux agriculteurs sont, à eux seuls, d'environ 800 MD.
Vous avez occupé des responsabilités au sein de l'Utap ou d'autres organisations avant d'arriver à ce poste de responsabilité ?
Maîtrisard en droit, je n'ai jamais voulu travailler au sein de l'administration. Le travail de la terre me tente plus. Et j'ai fait partie du syndicat relevant de notre organisation professionnelle depuis 1982 avant de présider le bureau local à Sbeïtla en 1988, et en 1990 j'étais parmi les membres du Conseil central de l'Utap. J'étais membre au bureau exécutif et j'ai toujours pris position sur certaines questions, acceptant d'affronter les anciens présidents, à savoir Abdelbaki Bacha et Mabrouk Bahri. Etant agriculteur, je dispose de 150 ha d'arbres fruitiers en irrigué et 40 ha de céréales également en irrigué. Je suis contre toutes les formes de violence, et je préfère résoudre les problèmes, quelle que soit leur acuité, par le dialogue.
Le conseil central avait organisé une réunion extraordinaire et l'ancien bureau a été dissous. Un conseil regroupant 23 anciens membres et 23 nouveaux a été constitué. Les élections du 9 février ont permis d'élire le président, le vice-président et le trésorier. Des affaires ont été intentées en justice par certains dissidents, mais le tribunal nous a acquittés. Le 15 mars, le président a été confirmé dans ses fonctions lors de la réunion du Conseil central.
Je saisis cette occasion pour annoncer ma décision de ne présenter ma candidature à aucun poste de responsabilité pour la prochaine période. J'ai voulu présider aux destinées de notre organisation professionnelle après la révolution car c'est une période historique et mémorable qui m'honore, mais je continuerai à travailler pour le bien des agriculteurs. Il s'agit, maintenant, de parvenir à organiser le congrès national de l'Utap, précédé à partir du 17 décembre 2012 du renouvellement des unions locales puis des unions régionales, tout en continuant à appliquer notre travail ordinaire.


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