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Pythagore ou la symphonie universelle
Figures et concepts
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 06 - 2012

Il serait né sur l'île de Samos, non loin des côtes de l'actuelle Turquie : ce qui en fait un Ionien de naissance, tout comme Thalès, son illustre prédécesseur qui s'est distingué lui aussi dans les domaines des mathématiques, de l'astronomie et de la pensée philosophique. Et comme Thalès encore, qui est son aîné d'une génération, il a beaucoup voyagé. Pour autant qu'on puisse s'en tenir à ce qui nous est rapporté sur sa vie, mais qui suscite des réserves de la part des historiens en raison de la fragilité des témoignages, il aurait passé plusieurs années en Egypte, aurait également fait un assez long séjour à Babylone, avant de revenir sur son île natale. Cependant, la situation politique à Samos l'incite à reprendre rapidement ses pérégrinations, qui le mènent cette fois en direction de l'Ouest : le sud de l'Italie... Sauf que, à partir de là, il est moins le jeune en quête de savoir que l'adulte désireux de construire. C'est, dirions-nous dans notre langage d'aujourd'hui, un porteur de projet... A ceci près que le projet en question va profondément marquer la culture intellectuelle du monde méditerranéen à travers les siècles et qu'on en trouvera des échos assez forts dans le courant de pensée de la Renaissance en Europe ou chez des philosophes modernes comme Leibniz.
Du grand public, Pythagore est connu pour son théorème : «Dans un triangle rectangle, le carré de la longueur de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des longueurs des deux autres côtés. » Ce que le grand public sait moins à ce sujet, et que les historiens ont découvert, c'est que cette formule était connue des mathématiciens en Egypte et en Mésopotamie... L'innovation de Pythagore est seulement d'émanciper la formule de ses applications pratiques, celle des géomètres, et de l'intégrer dans un système théorique indépendant...
Sur les traces d'Orphée
Beaucoup moins nombreux sont ceux qui savent que Pythagore a été aussi un philosophe, dont la pensée a d'ailleurs fortement marqué celle de Platon. C'est en tout cas l'avis d'Aristote qui affirme dans sa Métaphysique: «Après les philosophes dont nous venons de parler, survint Platon, dont la doctrine est en accord le plus souvent avec celle des Pythagoriciens... »
Si les connaissances relatives à la vie de Pythagore sont en général incertaines, se prêtant d'ailleurs à des récits où les divergences sont presque la règle, il est une chose sur laquelle il n'y a pas de désaccord : notre homme n'a laissé aucun écrit et, surtout, il a cultivé le secret. Non pas seulement autour de sa personne et de sa vie, mais aussi autour du contenu de son enseignement. En cela Pythagore pratiquait la philosophie en s'inspirant du modèle des sociétés ésotériques, dont les membres étaient des initiés tenus à la règle du secret: il y aurait eu d'ailleurs toute une hiérarchie au sein de son école, avec une distinction nette entre simples «auditeurs» et «mathématiciens» : ce dernier mot devant être pris dans son sens étymologique de «savant», celui qui a la science démonstrative des choses.
Un tel modèle existait en Grèce à cette époque, mais plutôt dans le domaine religieux... On parlait en particulier des Mystères d'Eleusis et, surtout, des Mystères d'Orphée. L'influence égyptienne est d'autant plus probable ici que les liens entre la Grèce et l'Egypte étaient forts et avaient cette double dimension, commerciale et culturelle, dirions-nous.
Cordes célestes
L'orphisme est un courant religieux qui nous intéresse ici à plus d'un titre, en réalité. Par son organisation interne mais aussi par ce qu'on sait de sa doctrine. Le mythe associé au personnage d'Orphée suggère un lien entre la connaissance de la musique et l'immortalité de l'âme. Rappelons qu'Orphée est celui qui, grâce aux sonorités qu'il est capable de tirer de sa lyre, parvient à séduire jusqu'au dieu des enfers, Hadès : il obtient de lui de pénétrer le monde des morts et d'en ressortir accompagné d'Eurydice, sa bien-aimée, qui avait succombé à la morsure d'un serpent quelques jours auparavant... Il y a là, dans ce récit, comme un pouvoir conféré à la musique qui a des résonnances avec de grands thèmes de la religion de la Grèce ancienne, celui en particulier de ce combat héroïque de l'homme au service de l'ordre cosmique et de son harmonie, et donc contre le chaos des puissances titanesques : combat qui lui ouvre la voie vers l'Olympe et le fait triompher donc de son destin d'être mortel... La musique n'est donc pas ici divertissement, mais combat contre le désordre cosmique. Et la lyre, tout en captant dans ses cordes l'harmonie du monde, célèbre cette dernière par ses vibrations et la relance comme un cri de guerre et de triomphe contre les puissances nocturnes...
Or ce thème du lien entre musique et immortalité de l'âme n'est pas étranger à la pensée de Pythagore, bien au contraire ! C'est même un sujet central. Mais il y a une différence : la musique chez Pythagore est moins affaire de muses qu'affaire de nombres, tout comme l'astronomie. La régularité des mouvements propres aux astres dans le ciel relève d'une harmonie qui n'est pas autre chose qu'une composition de nombres. Et s'il y a une danse des étoiles dans le ciel, alliée elle-même à une «musique des sphères», il y a une partition cachée où le nombre joue un rôle essentiel. En quel sens ? L'image ici est celle de la lyre, dont la corde ne produit pas le même son selon qu'elle est pincée à telle distance ou à telle autre. Il y a un rapport entre la nature particulière du son produit et la longueur de la corde qui vibre... Il faut imaginer maintenant, entre les corps célestes, des cordes invisibles qui expliquent que les uns tournent autour des autres. Ces cordes ne sont pas de même longueur et leurs différences vont donner lieu à une richesse de sons... En quoi cependant cette richesse va-t-elle déboucher sur une consonance harmonieuse ? En l'absence d'un traité de Pythagore qui aurait traversé les siècles, on en est réduits à reconstituer de façon plus ou moins audacieuse, plus ou moins prudente, ce qui serait le fond de la pensée pythagoricienne.
Un monde de personnages
Il y a lieu toutefois de penser que les figures que forment les astres dans l'espace à travers leurs mouvements correspondent à ce qui, pour nous, serait l'aspect seulement visuel d'une composition globale où l'image et le son vont de pair. Autrement dit, l'harmonie des figures dans le spectacle du ciel nous laisse deviner ce qui lui correspond sur le plan sonore... Et de la même manière qu'il n'est pas donné à tout un chacun de distinguer dans le ciel des mouvements harmonieux à travers la navigation des astres, il n'est pas non plus donné à toutes les oreilles de saisir la musique du ciel... Elles doivent se faire plus fines, plus... spirituelles !
Ces considérations, pourtant, ne nous disent toujours pas en quoi les nombres commandent toute la composition. Une autre image est nécessaire à ce stade... Nous savons que les chiffres que nous utilisons ont été conçus dans leur graphisme à partir du nombre d'angles. Dans le chiffre 1, il y a un angle, dans le chiffre 2, il y en a deux, etc. L'usage a comme érodé la marque de ce principe, mais ne l'a pas effacé. En fait, c'est le même «moteur» qui agit dans le monde : à chaque nombre correspond une figure. Nous sommes ici dans le domaine de ce qui a été baptisé «arithmologie» ou, par d'autres, «symbolique des nombres»... Le nombre, en fait, détermine une figure, mais aussi un équilibre interne, une architecture... Et ce qui vaut pour la figure singulière vaut aussi pour la figure que forment les figures quand elles sont mises ensemble. Il y a ainsi, en réalité, une multiplicité de niveaux qui s'imbriquent les uns dans les autres dans un jeu très complexe et qui, en fin de parcours, donnent cette symphonie universelle à laquelle il est donné à l'homme de prendre part, non seulement en tant que spectateur, mais aussi en tant qu'acteur... Tout ce qui se donne à percevoir à l'homme n'est donc que la mise en jeu ou la mise en musique de nombres qui, eux-mêmes, portent le secret de la partition. Et, en ce sens, on peut dire que les choses, sorties de leur contexte scénique, celui de la vaste composition, n'ont qu'une existence de simulacres : leur essence réside dans... le nombre ! Ce sont des personnages, des rôles qui n'ont pas plus d'existence en dehors de la pièce que ces étoiles mortes qui continuent de briller longtemps après leur disparition : illusion d'optique !
Entrer en intelligence avec la symphonie du monde est pour Pythagore le fait d'une démarche initiatique qui, en réalité, a ses ramifications politiques. Il y a en effet la Cité qui favorise une telle initiation et qui accompagne le mouvement d'intelligence et il y a celle qui l'entrave et qui rend plus obscure aux hommes la musique du ciel. Ce qui veut dire que le projet pythagoricien était aussi un projet politique... Donc un projet qui mettait notre homme aux prises avec un monde de violence. Y était-il assez préparé ? Le fait est qu'il y a succombé, brûlé vif dans l'assaut mené contre lui et ses fidèles par des citoyens qui voyaient d'un mauvais œil les changements qui pointaient à l'horizon.


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