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Mémoire d'une armée
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 07 - 2012


Par Kilani Bennasr (*)
Que pourraient être les souvenirs d'une armée, si ce n'est que douleurs, massacres et destruction. A priori c'est ce qu'on pense et c'est ce qui vient à l'esprit de l'être humain civilisé. Mais quand on prend soin d'analyser les cycles de conflits armés, leurs causes et conséquences, on constatera de prime abord que la guerre et les agressivités les plus aigues entre humains, comptent parmi les phénomènes de la vie les plus naturels et que la paix n'a jamais été, et risque fort de n'être jamais une paix durable, sauf en Chine !. Le deuxième constat est du premier car une nation sans armée, c'est comme un trésor non gardé, l'armée est le bouclier de la nation.
Si vis pacem, para bellum (Si tu veux la paix, prépare-toi à la guerre). Le pacifisme obsessionnel à l'image de celui de la France entre les deux guerres, serait à l'origine de sa défaite en 1940. Cet exemple pourrait servir de sujet de réflexion à des compatriotes tunisiens, réputés être un peu trop civilisés, qui penseraient que la Tunisie sans armée ne serait pas amoindrie. Ils vont jusqu'à douter des capacités combatives des Tunisiens ; des doutes incongrus puisque toutes les références en langue arabe, les ouvrages spécialisés et documents français témoignent des qualités héroïques légendaires du soldat tunisien.
Heureusement pour le pays et pour son armée , l'avènement de la révolution du 14 janvier dément leurs prédications défaitistes, et fut l'occasion de consolider les rapports armée-nation.
Toute armée est condamnée à se préparer à la guerre pour que son peuple puisse vivre en paix et liberté et si un concours de circonstances lui impose un conflit armé, elle devrait être prête à se défendre, sans hésitation, en acceptant les risques, et tout faire pour sortir victorieuse, au moins politiquement. «L'objet de la guerre, c'est la paix». (Aristote).
La Bataille de Bizerte
Le 19 juillet 2012, en Tunisie, on a célébré la bataille de Bizerte, plusieurs commentaires et documentaires sont diffusés sur les ondes des radios tunisiennes, chaînes de télévisions ; presque tous les moyens d'information se penchent sur l'analyse de ce conflit armé ponctuel, une partie de la mémoire de l'armée et du soldat tunisien, une histoire délaissée, qu'on avait voulu garder tabou par les anciens systèmes politiques.
Les évènements de cette bataille se sont déroulés sur le réduit du territoire tunisien, appelé « Zone Bizerte Ferry ville (Menzel Bourguiba)» restée sous occupation française jusqu'au 15 décembre 1963. En effet, Charles de Gaulle, pour des raisons hégémonistes liées à l'occupation de l'Algérie, se garda de satisfaire la demande de Bourguiba, venu le rencontrer pour la première fois le 27 février 1961, estimant que la France ne devrait pas tarder d'évacuer la ville de Bizerte et tous les lieux de garnisons ou points sensibles encore sous son contrôle.
Les raisons avancées par Charles de Gaulle, liées à l'intérêt stratégique de Bizerte pour l'Otan sont sans fondement. En effet, à l'époque, l'Angleterre et les Etats-Unis gardent encore des réserves sur les rapports de la France de de Gaulle avec l'organisation atlantique et ses menaces successives de se retirer de cette dernière. Ces deux puissances, même si Bizerte est stratégiquement importante et procure une alerte avancée des attaques soviétiques ; voient d'un mauvais œil la France conserver une puissance relative et un contrôle sur le bassin occidental de la Méditerranée, un message bien compris par le gouvernement tunisien.
Bourguiba soucieux de finaliser l'indépendance de la Tunisie et encouragé par le vaste mouvement de décolonisation du Mouvement des Non-Alignés, décida après l'échec de ses entretiens avec de Gaulle de passer à l'action, les Etats-Unis d'Amérique seraient mis au courant.
Conférence-témoignages du général El Kateb et du colonel Ben Aïssa
Le 19 juillet 2012 , à la Cité des sciences dans la salle Ibn Khaldoun, le général Kateb et le colonel Ben Aïssa, deux conférenciers-témoins et acteurs de la bataille de Bizerte retiennent l'attention de l'auditoire. Un important rassemblement hétéroclite, composé principalement d'officiers en activité, anciens officiers, des invités, des journalistes représentant environ une vingtaine de moyens d'information et un public discret.
Avec leur aisance et leur qualité oratoire propre à l'officier militaire, les deux conférenciers, sûrs d'eux-mêmes, dressent un témoignage méticuleux, neutre mais émotionnel. Lors du récit du combat en zone urbaine et dans la vieille ville de Bizerte, une situation de tristesse envahit la salle quand on constate que parmi les dix jeunes officiers qui figurent sur la photo en noir et blanc sur l'écran, six vétérans d'entre eux sont encore en vie dont les deux conférenciers, trois sont assis fièrement dans les premières rangées de l'amphithéâtre. Le Colonel Hmida El Ferchichi, Alias «Oueld el-mettreyouze» ( fils de la mitrailleuse) qui, invité par l'auditoire à se mettre debout, sera longuement applaudi, ensuite c'est le tour de l'ex-commandant opérationnel de la Ville de Bizerte, le Colonel Boujellabia, visiblement affaibli et très malade, qui, soutenu par sa sœur et un autre ancien militaire pour le relever, s'est réveillé de son inconscience en tournant légèrement sa tête, insinuant son bonheur que tout cet honneur soit pour lui, le Colonel Benzarti s'est réjoui lui aussi de l'applaudissement pour sa personne, le général Ammar Khériji, figure sur la photo mais n'a pu assister pour raison de santé.
Dans la salle, tout le monde souhaite être à leur place tellement on sentait la joie immense qui a envahi ces gentlemen, très touchés par la gratitude qui leur a été réservée, peut-être que c'est la première fois dans leur vie et probablement la dernière pour certains.
Parmi les invités, on peut citer Messieurs Hédi Baccouche, Kamel Morjane, le général G'zara et d'autres officiers, et enfin Monsieur Ahmed El Mestiri, le président du colloque qui, en guise de conclusion, ramène tout le monde vers la modération et la sagesse. Il insista sur l'union des Tunisiens et les appelle a raffermir leur attachement à l'Armée tunisienne et que cette dernière poursuive son chemin car elle est déjà sur la bonne voix.
Enseignements à tirer de la bataille
Toute spéculation sur cette bataille et recherche d'arguments qui sèment le doute sur Bourguiba et sur les préparatifs à cette «petite » guerre ne sont d'aucune utilité et ne font qu'agrandir des petites tâches noires sur la mémoire d'une résistance tunisienne sans ambigüité. En bref, la Tunisie comparée à d'autres pays, peut se prévaloir de son histoire non occultée de la décolonisation et parmi les plus cohérentes.
Bourguiba a bien fait de déclencher cette bataille, mal préparée, pour rehausser le moral des Tunisiens et faire comprendre à la France, bien enfoncée dans le bourbier sans fin algérien, que c'est le peuple qui veut parachever son indépendance ; car imaginant que la Tunisie s'attarde à réagir avec fermeté et attendant que la France se décide, cette dernière serait encore à nos portes comme c'est le cas aujourd'hui pour Djibouti.
Revenant au volet militaire, dans une situation de résistance à un ennemi bien équipé, il n'y a pas lieu de se plaindre ni du manque de moyens, ni des ordres défaillants, ni des pertes subies ; dans cette forme de combat particulier du « faible au fort » l'initiative et l'audace jouent un rôle clé, et c'est presque la situation dans laquelle s'est trouvé le lieutenant Said El Kateb. Tout seul, il décide du moment de l'attaque, inflige des dommages considérables à l'adversaire, fait des prisonniers français et subit évidemment plusieurs pertes parmi sa troupe.
Quant au déroulement des évènements, après la Bataille de Bizerte, la France perd l'espoir, à vrai dire fragile, d'une fin rapide du conflit algérien. Elle n'est plus la puissance dominante dans cette région. En fait, tout est lié à l'évolution de sa guerre face à l'armée de libération nationale d'Algérie, Charles de Gaulle ne pense même pas à la demande de Bourguiba qu'il trouve incohérente puisqu'on continue à offrir refuge aux membres du FLN et aux soldats de l'ALN sur le sol tunisien.
Les évènements montreront plus tard que la guerre de Bizerte, avec un chiffre excessif controversé de pertes en vies humaines, sans compter l'indignation du monde après le massacre de civils tunisiens , n'aura aucun impact sur la décision française et sur les évènements, la France poursuivra calmement son plan stratégique et n'évacue Bizerte que bien après l'indépendance de l'Algérie le 05 juillet 1962.
Pour conclure, cette bataille de Bizerte n'est pas la plus importante dans la mémoire de la Tunisie et du soldat tunisien, il est temps qu'en Tunisie post-révolution on dépoussière notre mémoire « bellum ».
A la mémoire des morts pour la patrie
La France n'a accepté de négocier l'indépendance de la Tunisie qu'après des décennies de lutte armée principalement au sud. Les moujahidines de la guerre de libération se sont confrontés aux forces françaises d'occupation dès que leurs avant-gardes ont foulé le sol tunisien, venant d'Algérie. Les tribus des H'mamma, Frechich, Majer, Ouled Ayar, D'jlass, mènent dés le 25 octobre 1881 une guerre d'usure sans merci contre l'assaillant, qui, malgré sa supériorité numérique et en équipements, tombe dans plusieurs embuscades préparées à Regueb et Gammouda et autres bourgs. Au mois de juin 1881, le héros Ali Ben Khalifa appelé par les français « le vieillard résistant » attaque avec la tribu M'thalith les convois français allant à Sfax, en infligeant des pertes énormes à la force terrestre française appuyée par l'artillerie de marine. Sans marquer de répit, c'est le «héros du sud ouest tunisien», Eddaghbagi, soutenu et encouragé par les frères libyens, qui déclenche ses actions subversives contre les garnisons françaises et leurs convois militaires.
En 1952 après son retour de Palestine, Lazhar Chraiti, «le lion de Djebel Orbata» et son adjoint Sassi Lassoued lancent, avec l'accord de Bourguiba, une véritable lutte armée contre la force d'occupation française, la guérilla bat son plein dans les années 1955 à 1956, d'autres batailles avant celle de Bizerte eurent lieu au sud à Bordj El Khadra et à Remada où tombe le martyr Mosbah Ejjerbou le 26 mai 1958, sans oublier les martyrs du corps de la Garde nationale qui joue un rôle très honorable dans la lutte anticoloniale. La guerre d'indépendance tunisienne est d'une grande utilité aux moujahidines algériens, elle leur fournit toute forme d'aides militaires, logistiques et morales ainsi que conseils et refuges dans leur deuxième patrie la Tunisie.
Par gratitude à ces martyrs et à ceux non cités, à qui nous présentons nos excuses, à eux, à leurs proches et amis, il est temps d'édifier à leur mémoire, dans toutes les villes et patelins concernés, des monuments aux morts où viendront, à l'occasion de la fête des martyrs, s'incliner et lire la Fatiha, les responsables et citoyens n'ayant pas vécu la guerre d'indépendance.


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