Science sans conscience n'est que ruine de l'âme, écrivait François Rabelais dans l'une de ses œuvres. Partant de cette fameuse citation, plusieurs questions se posent aujourd'hui, concernant le domaine de la recherche scientifique en Tunisie, son évolution, ses problèmes et les moyens de l'améliorer. Maintes problématiques ont été relevées, lors du colloque organisé, récemment, par le Pacte des compétences tunisiennes engagées, en collaboration avec l'Association tunisienne des chercheurs universitaires. Se tenant à Mahdia, ce séminaire a constitué tout d'abord une occasion pour rendre hommage à Béchir Turki, ce grand physicien (natif de l'ancienne capitale des Fatimides) qui a contribué au développement de la recherche scientifique en Tunisie. Un aperçu sur la vie de l'homme et de son parcours professionnel a été présenté par l'universitaire et enseignant de langue et littérature anglaises, Wasim Jday, dans une intervention titrée «The life and achievements of Béchir Turki» (la vie et les accomplissements de Béchir Turki). L'intervention du Pr Ahmed Rebaï a porté, quant à elle, sur une analyse de l'état des lieux de la recherche scientifique en Tunisie. Un bilan de 13 ans d'expérience a été dressé, où l'accent a été mis sur les problèmes que connaît actuellement le domaine, tout en proposant les réformes nécessaires pour l'améliorer. «Aujourd'hui, on compte 34 centres de recherche et 146 laboratoires mis au service du chercheur tunisien, mais par manque de moyens ainsi que par le faible budget accordé par le ministère de tutelle, la recherche ne peut pas avancer. A tout cela s'ajoute l'absence d'une vision stratégique — c'est-à-dire un cadre juridique du statut du chercheur — qui constitue un obstacle pour l'épanouissement du secteur», devait signaler A. Rebaï dans son intervention. Pour remédier à ces problèmes, il faut bel et bien une réforme du système qui se baserait, aussi, sur l'encouragement des jeunes et des étudiants, afin de les placer au centre d'un projet global, avec un financement conséquent qui leur permettrait d'intégrer le domaine de la recherche et d'y être efficients. La deuxième journée du colloque a été réservée, pendant la première séance, aux interventions des Drs Riadh Besbes et Olfa Kilani qui ont porté respectivement sur « l'intervention des recherches scientifiques innovantes pour la réforme de notre système académique » et sur « la valorisation industrielle des résultats de recherche ». Elles ont été suivies d'une présentation de l'Association tunisienne de l'avenir des sciences et des technologies (ATAST) qui, depuis sa fondation en 2006, aide et encadre, très tôt, les futurs chercheurs. Par ailleurs, cette association, qui œuvre pour la formation des jeunes, organise des activités et des concours sur le plan national dans le but de motiver l'enfant à cultiver le sens de la création chez lui. De la recherche scientifique à la recherche littéraire Le deuxième volet du colloque a été consacré au thème de la recherche littéraire et philosophique. «Recherches et philosophie» a, ainsi, été le titre de l'intervention de l'enseignant de philosophie Mehdi Ben Haj Mabrouk qui a abordé la problématique en essayant de répondre à l'interrogation «la recherche scientifique est-elle la recherche de la vérité ?». Quant à l'intervention de Aymen Hacen (écrivain et universitaire), elle s'est focalisée sur la notion de recherche scientifique, sa définition et ses spécificités dans le domaine des lettres et des sciences humaines et sociales. La vraie recherche dans le domaine de la littérature, par exemple, serait de s'interroger, de critiquer et de bien analyser une œuvre pour bien comprendre la vision de son créateur. Le colloque s'est achevé avec une dernière intervention du professeur Ahmed Rebaï qui a porté sur le respect de la déontologie dans la recherche scientifique, suivie d'un court-métrage en hommage à la mémoire du professeur Béchir Turki, présenté par les membres du Pacte tunisien, Nawel Dghim et Haïthem Sghaïer.