Lors de la première journée de la rencontre organisée depuis hier par l'observatoire tunisien de la sécurité globale autour du thème «La sécurité globale au Maghreb, enjeux et perspectives», Alaya Allani, expert en mouvances islamistes, a indiqué que la chute de certains régimes autoritaires dans les pays du Printemps arabe a fragilisé la sécurité intérieure et extérieure, d'autant plus que les régimes dictatoriaux donnaient plus une impression de sécurité qu'une réelle sécurité. «La loi antiterroriste a été par exemple pervertie pour devenir un instrument de répression des opposants», explique-t-il. Pour lui, les élections libres ayant porté au pouvoir un parti islamiste n'ont guère amélioré la donne sécuritaire, car, selon lui, ce parti a misé, en s'appropriant les ministères de souveraineté, sur l'affaiblissement des forces de sécurité, la création de nouvelles structures ainsi qu'une tentative de créer des corps parallèles (faisant office de police, comme cela a été d'ailleurs observé en Egypte et en Libye), le tout en favorisant l'émergence de groupes violents qui ne croient pas en la démocratie et dont le seul objet est de gérer et de renforcer le potentiel jihadiste du pays. La sécurité globale, dont l'objectif, selon le colonel-major Ben Nasr, est d'assurer la pérennité de l'Etat, l'indépendance nationale, l'unité nationale, la prospérité économique et la préservation de l'identité culturelle, devra néanmoins être l'affaire de tous et dans le contexte actuel, qui, selon Alaya Allani, rappelle le contexte algérien, le dialogue national est impératif, car il faudra regarder l'avenir et réinsérer les jeunes jihadistes à travers un programme national. M. Jean-Jacques Gleizal, professeur de droit et de science politique à l'université Pierre Mendès-France, démontre que la sécurité globale doit être envisagée en tant que «politique publique pour une gouvernance multi-acteurs», elle ne doit plus être l'apanage d'un appareil sécuritaire généralement au service du pouvoir. Cette politique publique doit se fixer des objectifs selon un référentiel que les acteurs auront à choisir. Le tout sous l'œil vigilant du droit et de la justice. Une telle politique ne peut voir le jour sans que la démocratie ne touche «la profondeur populaire», afin que chacun se sente véritablement responsable de la sécurité de son pays. Pour ce militaire, enfin, «un Etat bâti sur la peur ne saura apporter une réelle sécurité», c'est pour cette raison que penser la sécurité globale, c'est d'abord mettre l'individu-citoyen au centre de toute politique, sans oublier que l'éradication de la pauvreté et la lutte contre la précarité sont un véritable rempart contre toute menace à la sécurité globale. La porosité des frontières reste cependant un important défi à relever pour les Etats du Maghreb qui continuent à croire en la construction d'un espace maghrébin commun.