Le président de l'Instance supérieure indépendante pour les élections a estimé que le rapport de la Cour des comptes, qu'il a qualifié de dangereux, vise la limitation de l'indépendance de la prochaine Isie pour des considérations électoralistes. Partant du caractère spécifique du travail de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), Kamel Jendoubi, président de cette même instance, est revenu, hier, lors d'une conférence de presse, sur le rapport de la Cour des comptes relatif aux opérations financières de l'Isie. Jendoubi a souligné que les anomalies et les défaillances qui auraient été commises lors de la première expérience en matière d'organisation et de gestion des élections sont inhérentes au cadre de travail spécifique et aux nombreux problèmes qui ont entravé le travail de l'Isie. Un travail qu'il a jugé de très respectable tout en valorisant les résultats réalisés alors que la justesse des délais n'a pas permis de travailler selon les modalités de gestion administrativement reconnues. C'est que la nature de cette mission, a-t-il expliqué, nécessite une réactivité extrême pour installer toute une plateforme administrative qui n'existait pas auparavant. «Si des défaillances et des anomalies ont eu lieu, seraient-elles intentionnelles? Je ne crois pas. Nous avions fait part au gouvernement précédent de toutes les défaillances possibles mais on n'a pas eu de réponse. S'il y avait eu une prise en considération de nos communications il n'y aurait pas eu d'anomalies dont certaines concernent le travail de la Cour des comptes, notamment sa méthode de contrôle des finances. Le rapport de la Cour présente des vices de forme et, d'ailleurs, il ne revêt aucun caractère officiel. Ce rapport dangereux innocente, cependant, l'Isie en confirmant les difficultés auxquelles elle a fait face, et il lui a fait perdre sa crédibilité», a-t-il ajouté. Jendoubi a accusé l'ancien gouvernement de Hamadi Jebali et des constituants d'être derrière la fuite d'un document confidentiel de l'Isie qui a servi de moyen de pression et sur l'Instance et sur la Cour des comptes et par-delà d'alibi pour le rapport de la Cour. Il a affirmé qu'une plainte a été formulée par l'Isie contre cette fuite, mais elle est restée sans suite. Il a, dans ce même contexte, affirmé que ce rapport a été préparé bien avant la fin des travaux de contrôle qui étaient effectués après le parachèvement des élections, et ce, selon les points de vue de l'ancien gouvernement pour induire en erreur l'opinion publique. D'après lui, des pressions sont faites sur l'Isie et la Cour des comptes pour des considérations électoralistes et que la prochaine Isie sera dépourvue de son indépendance... Une mission et des enjeux spécifiques, des dépenses raisonnables Concernant le travail de contrôle de la Cour des comptes, le président de l'Isie a affirmé qu'elle aurait dû travailler selon un plan méthodique et avec un esprit participatif avec l'Instance en amont de l'opération de contrôle pour délimiter les domaines et les outils de ce contrôle. Un contrôle qui doit, selon lui, tenir compte des conditions de travail de l'Instance qui avait une nature «urgente et exceptionnelle» notamment pour ce qui est des travaux relatifs aux préparatifs des élections, l'installation des bureaux de vote, la formation des agents et bien d'autres volets. «D'ailleurs, la contrainte du temps nous a obligés, à maintes reprises, de prendre des décisions notamment en matière d'achat dans des délais très serrés. Les procédures de gestion n'ont pas été conformes, certes, à celles de la gestion administrative avec les règles routinières. Et c'est de là que le cadre juridique régissant l'Isie a prévu une certaine flexibilité au niveau de la gestion vu les spécificités des méthodes et des outils à engager dans ce genre de travail. Il y avait une obligation de résultat et des enjeux à réaliser ces élections avec un date précise, celle du 23 octobre. Pour ce qui est des dépenses, elles sont raisonnables, d'ailleurs elles n'ont pas dépassé les 0,2 % du budget de l'Etat et avec une charge de l'ordre de six dinars par électeur ce qui est très minime par rapport à ce qu'on dépense ailleurs dans de telles opérations", a-t-il expliqué. Pour ce qui est des accusations de mauvaise gestion, il a affirmé qu'elles sont infondées. Concernant le cumul de salaires, il a affirmé que les membres de la commission centrale ou d'autres membres ont touché leurs salaires de leurs administrations d'origine ainsi qu'une prime de l'ordre de 40 % par rapport à leurs salaires, rien de plus, et ce, en coordination avec le Premier ministère qui a désigné les agents et compétences demandés par l'Isie. Pour l'accusation concernant les emplois fictifs, il a indiqué que certains agents ont préféré se retirer après avoir suivi la formation qui a duré trois mois, et qu'il fallait les rémunérer à raison de 40 dinars par mois. D'autre part, il a expliqué les dettes estimées à plus de 7 millions de dinars en affirmant que c'est l'Isie qui a voulu valoriser le travail de l'armée nationale en lui demandant de facturer certains services qui ont été évalués à 3,5 millions de dinars. Il en est de même pour le 1 million de dinars de dette envers la télévision nationale. Par ailleurs, Jendoubi a affirmé que, selon le décret n° 27 de l'année 2011, seulement les tâches relatives à l'élaboration des élections ont pris fin, alors que l'existence de l'instance juridique demeurera jusqu'à l'avènement d'une nouvelle commission centrale et prendra fin avec la passation. «Mes collègues et moi nous sommes restés depuis décembre 2011 pour finir notre travail et ce à titre de bévolat». La suite de ce dossier aura lieu dès l'officialisation du rapport de la Cour des comptes et son passage devant l'Assemblée nationale constituante...