Annonçant, hier, la suspension de la participation du Front populaire au dialogue national qui devait se dérouler hier avec la participation des différents partis politiques au siège de l'Utica, le leader et porte-parole du Front, Hamma Hammami, s'est attaqué à Ennahdha qui, d'après lui, retarde le processus démocratique en Tunisie. De même, il a accusé le président de l'Assemblé nationale constituante (ANC) d'aller à l'encontre de la volonté du peuple et de la démocratie, appelant à cette occasion à une grande manifestation de protestation contre le projet de Constitution, et ce, lors de la séance plénière qui sera consacrée à son examen. Lors d'une conférence de presse tenue, hier à Tunis, le porte-parole du Front populaire est revenu sur les grandes lignes du premier conseil du Front tenu les 1er et 2 juin à Sousse, en prélude à son congrès électif. «Nous avons traité les grandes lignes du programme politique, social, économique et environnemental qui seront détaillées par la suite par un ensemble de commissions. De même, nous nous sommes décidés quant à la structuration du Front sur les plans national, régional, local et sectoriel. Dans ce sens, il y aura une haute commission politique constituée au niveau de deux tiers de politiques, alors que des indépendants constitueront le reste. Il y aura des coordinations sectorielles formées notamment de jeunes et de femmes et d'autres régionales et locales, outre celles de l'immigration. Le troisième volet de ce conseil portait sur le comportement politique et la ligne tactique à engager pour cette phase. C'est un débat qui est riche et profond et qui se poursuivra en détail», a enchaîné Hamma Hammami. «Ce premier conseil du Front populaire a été bien réussi sur tous les plans en dépit des différends qui n'ont pu que renforcer l'unité au sein des rangs du Front», a déclaré, pour sa part, le président de ce premier conseil du Front populaire, Mohamed Brahmi. Les différends qu'a évoqués Hammami concernent le dernier volet de ce conseil et notamment la question des coalitions et des participants à la large coalition nationale, à laquelle le Front appelle, comme initiative de salut. C'est que le Front a refusé la participation de la Troïka qu'il qualifie de la cause de tous les maux du pays et de la stagnation du processus démocratique. «La Troïka, a déclaré le porte-parole du Front populaire en relevant la question des élections, est sur la lancée de l'instauration d'une nouvelle dictature en présentant la question de l'identité comme question principale du débat à l'ANC, pour faire diversion du réel sujet de débat qui n'est que les libertés et la démocratie». Il a ajouté : «La vraie bataille est celle des libertés et nous devons la gagner, du moins sur le plan législatif. Pour cela, nous devons réussir une grande mobilisation, notamment pour s'opposer à ce projet de Constitution qui a été élaboré à la guise d'Ennahdha et portant son empreinte. La Constitution doit être celle de tous les Tunisiens. Nous appelons tout le monde à venir protester contre ce projet nahdhaoui de Constitution, qui met en péril les libertés et les acquis du peuple depuis l'indépendance, et ce, lors de son passage à la séance plénière qui lui sera dédiée». Concernant la participation de Nida Tounès à cette coalition nationale, Hammami a affirmé que le Front, en faisant la politique, part de la détermination des axes politiques, dans sa vocation nationale, à entamer et non sur les alliances à lancer. Esquivant la réponse, le leader du Front populaire a indiqué que certains partis commencent à rejoindre l'initiative de la large coalition nationale de salut, à l'image du parti Al Kotb avec qui le Front maintient un dialogue continu. Le Front tire la sonnette d'alarme Hamma Hammami a annoncé que les représentants du Front populaire ont décidé de suspendre leur participation au comité de suivi du dialogue national qui se poursuit au siège de l'Utica. Dans ce sens, il a affirmé qu'après sept rounds de négociations, rien de concret n'a été enregistré, «ou du moins, a-t-il expliqué, aucun accord n'a été trouvé sur l'une des question fondamentales». D'après lui, plusieurs dangers guettent la Tunisie sur les plans politique, sécuritaire, social et économique et laissent présager «une guerre civile» vu l'élargissement de la sphère de la violence depuis le 6 février, date de l'assassinat du martyr Chokri Belaïd. Tout en mettant la responsabilité sur le dos de la Troïka et notamment Ennahdha, il est revenu sur les dangers imminents, dont le terrorisme qui a refait surface dernièrement à Jebal Chaâmbi. «Notre pays est menacé par le terrorisme et l'effondrement économique et social. La récurrence de la violence et d'autres facteurs démontrent qu'il y a une intention de faire avorter la révolution tunisienne, et ce, sous le contrôle des grandes puissances. Le Front populaire tire la sonnette d'alarme face à cette tendance préméditée à faire avorter le processus démocratique et à l'intervention de forces étrangères dans les affaires de notre pays», a ajouté Hammami. Relatant les péripéties de l'action de la coalition nationale de salut à laquelle appelle le Front, il a indiqué qu'elle portera sur la création d'un climat de paix autour de l'action politique en luttant contre la violence, la finalisation de la période transitoire avec des élections neutres et transparentes. De même, il a évoqué la lutte contre la dilapidation des richesses du pays, le refus de tout engagement de la part de la Tunisie dans des conventions qui mettraient le pays dans une certaine situation de dépendance, notamment celles signées avec le Fonds monétaire international. Par ailleurs, le porte-parole du Front populaire s'est indigné de la visite du chef du gouvernement turc en Tunisie qui aura lieu aujourd'hui, tout en appelant les partisans du Front «à aller protester contre la répression que le gouvernement d'Erdogan fait subir à son peuple». Concernant cette action de protestation, il a indiqué que si son parti n'obtient pas l'autorisation de protester pacifiquement, il saura tout de même comment faire parvenir son message de protestation.