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«Ce n'est pas une guerre de terrain qu'il faut mener, c'est une guerre de renseignements...»
Interview de Fayçal Chérif, analyste militaire et stratégique
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 06 - 2013

En quoi l'explosion d'une mine anti chars près d'un village de Kasserine marque-t-elle un tournant dans la stratégie de combat des groupes jihadistes retranchés au mont Chaâmbi? La guerre de montagne serait-elle en train d'évoluer vers une guerre urbaine qui gagnerait les rues de la Tunisie. Nos soldats sont-ils préparés à l'une et à l'autre ? Et puis, qu'y a-t-il derrière le silence, l'opacité et les messages contradictoires qui marquent le dossier de Chaâmbi ?...
Plaidant depuis deux ans pour un corps de renseignements indépendant et un traitement stratégique de la menace terroriste en Tunisie, Fayçal Chérif, enseignant chercheur en histoire et analyste militaire et stratégique, répond à des interrogations qui secouent aujourd'hui l'ensemble des Tunisiens...
Comment expliquez-vous ces bilans mortels qui commencent à s'alourdir au mont Chaâmbi et maintenant en pleine zone d'habitation ? Pensez-vous que ce soit simplement le résultat de la faiblesse des moyens matériels et humains de notre armée ?
Notre armée est certes une armée régulière peu dotée pour ce genre de guerres. Elle agit dans les limites de ses moyens et de ses expertises. Mais là n'est pas le vrai problème ni le seul. Nous ne sommes pas devant une défaillance technique et logistique, nous sommes devant un manque flagrant de disposition et de préparation. Voilà au moins deux ans que les jihadistes ont commencé à se préparer à cette guerre, à mettre au point leurs stratégies et à s'armer pour les mener. Ces groupes font la guerre à l'idée même de l'Etat. Ils ne reconnaissent ni drapeau, ni police, ni armée. Derrière, il y a financement étranger. En revanche, qu'avons-nous fait pour les localiser? Qui sont-ils ? D'où viennent-ils ? Avons-nous seulement tenté une évaluation géostratégique pour protéger nos frontières et notre sécurité nationale ? Rien n'a été préconisé pour affronter cette guerre fort attendue sur le plan géostratégique, avec ce qui s'est passé en Libye, au Mali, en Algérie, en Syrie... Ce qu'il faut ce n'est pas une guerre de terrain improvisée où l'on envoie ses soldats à une mort certaine, mais une guerre de renseignements...
Qu'entendez-vous par guerre de renseignements ? Faut-il ressusciter la police politique et les services de la sûreté de l'Etat ?
Au-delà des intitulés et des prérogatives, ces corps avaient des moyens, des fichiers et des techniques qu'il fallait exploiter. Pour la sécurité de notre pays, nous avons besoin d'un réseau de renseignements qui nous permette d'avoir de l'avance sur les évènements. Je n'ai pas cessé d'appeler à la création d'un corps indépendant, mixte et homogène à l'instar de la CIA qui ne soit placé ni sous la tutelle de la police, ni de l'armée, et qui réunisse une pléiade d'experts et un éventail de corps spécialisés selon la nature des interventions. Personne ne m'a écouté.
Nos ambassades ont également un rôle quotidien à jouer. Une bonne part des renseignements vient des rapports des ambassades. Je me demande aussi à quoi sert l'Institut des études stratégiques travaillant sous la tutelle de la présidence de la République. C'est à ce genre d'institutions qu'il appartient de faire des études prospectives et d'établir des scénarios prévisionnels quant au fléau du terrorisme. Rien de tout cela n'a été fait. Outre l'erreur fatale qui a consisté à libérer tous les anciens prisonniers de Ben Ali y compris ceux impliqués dans des crimes terroristes. Je ne dis pas qu'il ne fallait pas les libérer. Le danger était de les lâcher dans la nature sans contrôle et sans suivi.
Vous soutenez que, contrairement à l'armée, les groupes jihadistes sont parfaitement préparés à cette guerre. Quelle est précisément leur stratégie ?
Leur stratégie est claire. Si on scrute bien le paysage et l'évolution de la situation depuis deux ans, notamment avec le début de la guerre en Libye, on fait ce diagnostic : les proportions importantes qu'ont prises la contrebande et notamment la circulation des armes, le long de nos frontières : 445 km avec la Libye, plus de 900 avec l'algérie dont 200 km de montagnes... Ces groupes ont d'abord commencé par s'armer. Medenine, Kébili, Errouhia, Bir Ali ben Khélifa, Douar Hicher... Autant d'affaires qui nous envoyaient déjà des signaux forts. Au début, ils ont essayé de s'installer dans le sud, mais les terres plates ne leur convenaient pas. Ce sont en partie d'anciens jihadistes de retour d'Afghanistan. Ils y ont passé plus de neuf ans. Ils sont aguerris et parfaitement entraînés à la guerre des montagnes, avec une maîtrise du terrain et une endurance à toute épreuve. Châambi était l'endroit idéal d'autant plus qu'il est à proximité des groupes jihadistes algériens. Voilà plus d'un an qu'ils se sont installés à Chaâmbi. Ce sont des guérillas qui agissent en petit nombre et ne dépendent d'aucune hiérarchie. En conséquence, il est impossible de les décapiter et de les neutraliser entièrement, d'autant qu'ils disposent de réseaux dormants.
Pourquoi ont-ils posé cette mine loin de la montagne, dans une zone habitée et ciblée en même temps des éléments de l'armée ? Est-ce une nouvelle stratégie de combat ?
Rien n'exclut que les jihadistes de Chaâmbi soient organisés en guérillas de montagnes et de villes. L'on a appris aujourd'hui de source militaire, qu'ils disposent de soutien, de logistique et de coordination en milieu urbain et que 37 personnes sont déjà suspectes de les aider. La mine qui a explosé près d'un village habité est une mine antichar qui, avec 40 cm de diamètre, pèse très lourd et ne peut pas être portée par une seule personne. Comment a-t-elle été fabriquée et par qui et moyennant quel savoir-faire ? Ce qui est sûr, c'est que personne n'est descendu de la montagne et que l'opération a été menée en coordination avec les réseaux dormants en milieu urbain. Cela peut être une manœuvre pour créer diversion, plus bas que Chaâmbi. Mais il n'est pas exclu non plus que ces groupes veuillent déplacer la guerre de montagne, du reste circonscrite, vers une guerre des rues autrement moins maîtrisable... Un scénario dont la Tunisie n'a pas les moyens. D'où l'urgence d'un traitement intelligent.


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