Le Parti des travailleurs, le Snjt, l'Anjj et la Coalition civile pour la défense de la liberté d'expression, un collectif de sept associations, condamnent la recrudescence des agressions systématiques contre les journalistes et appellent à la défense de la liberté d'information et d'expression Les ligues de «protection de la révolution» (LPR) récidivent en poursuivant leurs exactions contre les journalistes. Après avoir agressé violemment trois journalistes, jeudi dernier, devant l'ANC, voilà que ces ligues appellent à un nouveau rassemblement de protestation, vendredi prochain, à 14h00, devant le Théâtre municipal. Certes toujours dans le même but, l'immunisation de la révolution, mais en ajoutant une autre exigence: l'immunisation de l'information et des médias par, entre autres, «le retrait de la carte de presse aux journalistes professionnels de la «honte». Ces derniers sont accusés d'avoir, selon eux, servi et exhorté Ben Ali à se représenter pour 2014». (sic) Les LPR se substituent, ainsi, à la commission nationale d'octroi des cartes de presse et au Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), seuls habilités à délivrer ou à retirer les cartes de presse nationale. Du jamais vu. Mais on aura tout vu en cette période transitoire. Les LPR ont, par ailleurs, publié dimanche dernier la liste des médias qu'ils ont décidé de boycotter, dont notamment la télévision publique «Al Watania», qu'ils continuent d'appeler «Tunis 7», la chaîne de télé «Ettounissia», les radios «Chems-FM» et «Mosaïque-FM», enfin les quotidiens Al Chourouk et Al Maghreb. Il est vrai que les médias et les journalistes sont actuellement victimes de tous les tiraillements politiques, les agressions à leur encontre s'étant multipliées au cours des années 2012 et 2013, sans compter les discours haineux et même des appels au meurtre de la part d'hommes politiques et des LPR. Quoi de plus normal qu'on les traîne devant les tribunaux et les procès à leur encontre se multiplient ou qu'on tente de les empêcher de faire tout simplement leur métier: informer le public. Atteinte à la liberté d'expression Le dernier exemple en date pour bâillonner la liberté d'information et d'expression a pour «héroïne» la vice-présidente de l'ANC, Mehrzia Laâbidi, qui a menacé les cameramen et les techniciens du car de la télévision tunisienne (Al Watania) d'avoir filmé les interventions des constituants qui ont pris la parole en marge de l'intervention de Habib Khedher Ce qui a provoqué la vive réaction de la Constituante Selma Baccar, qui a reproché à la vice-présidente de l'ANC «son ingérence dans le travail des réalisateurs et techniciens de la télévision. C'est une atteinte et un crime à l'encontre de la liberté d'expression», a-t-elle affirmé. Et d'ajouter: «Par ce comportement, vous perpétuez le contrôle qu'exerçait Ben Ali sur les médias à travers le ministère de l'Information». Mais les explications de Mehrzia Laâbidi, qui a nié toute ingérence, n'ont convaincu ni les cameramen, ni les constituants de l'opposition. Bref, si le ministère de l'Intérieur a condamné l'agression des journalistes perpétrée par les LPR, jeudi dernier devant l'ANC, promettant d'assurer, dorénavant, leur protection dans l'accomplissement de leur métier, il il n'en demeure pas moins que les agresseurs des journalistes sont restés jusqu'à aujourd'hui impunis. On verra bien, pour les cas des trois derniers journalistes agressés. Toutefois et encore heureux que la société civile et les partis progressistes qui soutiennent la liberté d'expression et d'information ont toujours condamné les exactions et agressions contre les journalistes. Aussi, le Parti des travailleurs a-t-il publié un communiqué condamnant «les lâches agressions qui visent à empêcher les journalistes de couvrir les événements politiques et syndicaux dans le but d'une mainmise sur l'information et les médias. Alors que plusieurs journalistes sont victimes de poursuites judiciaires, ce qui s'inscrit dans une stratégie et une volonté claires de les faire taire, de les mettre à genoux et de faire accepter les retours en arrière programmés au niveau des acquis de la liberté d'information et d'expression». Le Parti des travailleurs exprime, aussi, son soutien et sa solidarité avec les journalistes pour la défense de leur droit contre les attaques virulentes et les agressions qui les ciblent en faisant porter la responsabilité au pouvoir et en appelant à la dissolution des LPR. Cela pour leur implication dans plusieurs actions violentes. Le parti appelle, également, toutes les forces révolutionnaires, progressistes et démocratiques, entre partis, organisations, associations et personnalités, à se mobiliser aux côtés des journalistes pour défendre la liberté d'information et de communication. Congrès national de lutte contre la violence à l'encontre des journalistes De son côté, l'Association nationale des jeunes journalistes (Anjj), observe que suite aux nombreuses agressions contre les journalistes dont le but n'est autre que de mettre au pas les journalistes et les médias, a appelé à la tenue d'un congrès national de lutte contre la violence perpétrée à l'encontre des journalistes. Tout en exhortant la société civile, les partis politiques, les organisations professionnelles et les trois présidences à contribuer à l'organisation et à la réussite de ce congrès. Considérant que la liberté d'information et d'expression est une responsabilité nationale partagée et un droit humain garanti par toutes les conventions et tous les traités internationaux. La Coalition civile pour la défense de la liberté d'expression exige, elle, «l'arrêt des procès d'opinion et des agressions contre les journalistes et exprime sa profonde indignation et sa vive condamnation de la recrudescence des agressions systématiques contre les journalistes dans l'accomplissement de leur mission, alors que les auteurs de ces agressions et leurs commanditaires bénéficient, étrangement, de l'impunité la plus totale». La Coalition réclame l'application du décret-loi 115 de l'année 2011 relatif à la liberté de la presse, de l'impression et de l'édition conforme aux standards internationaux en matière de liberté d'expression et de restrictions à cette liberté, et qui garantit, dans son article 14, une protection du journaliste et criminalise son agression. Enfin, contacté, Mongi Khadhraoui, secrétaire général du Snjt, a exprimé l'attachement du syndicat à la liberté d'information et d'expression et à la préservation des acquis de la révolution: «Il n'y aura pas de retour en arrière concernant notre liberté d'informer. Toutes les agressions ciblant les journalistes visent à bâillonner la presse et à l'empêcher d'informer l'opinion publique. A la justice et au ministère public de jouer leur rôle en interpellant les agresseurs. Car ce phénomène des agressions contre les journalistes qui se répète de plus en plus cache une réelle volonté de mettre aux ordres les médias et de les diviser entre partisans du pouvoir et opposants au pouvoir. Alors qu'il s'agit au fond d'une question d'indépendance des médias». Le Snjt compte, par ailleurs, initier des actions qu'il juge nécessaires. Enfin et dans le même ordre d'idées, le Centre de Tunis pour la liberté de la presse présentera ce matin à 10h00, à son siège, un ouvrage, sorte de Livre blanc, concernant 23 ans de répression et de manipulation intitulé : «Les journalistes face à la dictature : 23 ans d'oppression et de dissimulation».