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Une rhétorique politique pour des fins géostratégiques et économiques! (Suite et fin)
Opinions - Du «processus de Barcelone» à l'accord du «partenaire privilégié» :
Publié dans La Presse de Tunisie le 19 - 07 - 2013


Par Ezzeddine BEN HMIDA
Dans la première partie de cette contribution, nous nous sommes efforcés d'analyser le contexte économique et politique régional et mondial : en ce sens, nous avons mis en exergue pas moins de trois facteurs qui expliquent l'origine de l'initiative européenne en proposant aux pays du Sud un «accord de partenariat euro-méditerranéen»: le premier facteur clé réside dans la mondialisation croissante des économies et la poussée des accords de régionalisation dans les trente dernières années, ainsi que l'arrivée en puissance de la Chine; le second élément consiste dans l'érosion des accords préférentiels non réciproques dont a bénéficié la majorité des PTM, en particulier les pays du Maghreb; enfin, le troisième facteur s'explique par l'environnement socioéconomique et politique du bassin méditerranéen.
Nous avons également tenté de montrer que les attentes européennes sont principalement d'ordre géostratégique, plus précisément de dimension géopolitique (sécuritaire) et économique. Pour finir, nous avons esquissé quelques éléments de réponse quant aux motivations des pays de la rive Sud de la Méditerranée. Ces motivations sont également géoéconomiques mais aussi politiques : Sur le plan économique, les pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée (PSEM) cherchent une meilleure insertion dans la division internationale des processus productifs (DIPP) en améliorant leur attractivité pour les investissements étrangers ; sur le plan politique, ils attendent une reconnaissance, pour certains, et un soutien pour d'autres.
Nous proposons aujourd'hui d'analyser la cohérence et les retombées de cet accord. Nous verrons qu'il s'agit non seulement d'un projet incohérent au vu des disparités socioéconomiques entre les deux rives, des obstacles politiques et surtout structurels, mais aussi d'un projet dont les retombées potentielles sur l'économie tunisienne sont trop incertaines.
1/ Un projet incohérent... :
a) incitation à une intégration au marché doublée d'entraves aux échanges dans les secteurs sensibles.
La proposition européenne de 2008 et plus récemment celle de l'accord du «partenaire privilégié» visent à terme, comme nous l'avons longuement souligné, la création d'une ZLE, a priori à l'horizon 2020 - 2025. Une ZLE que les européens appellent de tous leurs vœux : rappelons que l'accord de Barcelone (1995) avait fixé déjà au plus tard l'année 2010 pour le démantèlement total des barrières tarifaires et non tarifaires entre les pays signataires. L'accord, qui portait uniquement sur le secteur industriel, est resté presque lettre morte.
Le secteur agricole n'est toujours pas inclus dans les accords. L'EU, sous l'influence évidemment de l'Espagne, la France, l'Italie et la Grèce qui produisent des biens similaires à ceux des PSEM, préfère négocier cette question assez sensible d'une manière bilatérale (avec chaque pays à part). Les services font l'objet d'un traité incomplet. De plus, la libre circulation des facteurs de production ne concerne que les capitaux. Les flux migratoires en provenance des PTM vers l'UE sont soumis à une législation très contraignante et un contrôle extrêmement strict, voire parfois humiliant !
Le projet de création à terme d'une Zleem n'est en réalité pas aussi libéral comme l'indique son intitulé ; il vise avant tout les intérêts de l'Europe. Il s'agit en effet d'une incitation à une intégration au marché doublée d'entraves aux échanges dans les secteurs sensibles. Cet état d'esprit reflète d'ailleurs les rapports politiques et économiques ambiguës qu'entretient, depuis fort longtemps, l'Europe avec ses voisins du Sud et la Turquie.
b) Le bassin méditerranéen : une région, deux niveaux de développement :
Le bassin méditerranéen reflète –ou concentre- parfaitement l'image des rapports Nord-Sud qui régissent encore notre monde moderne : d'un côté, un occident industrialisé et, de l'autre côté, des nations nettement moins développées. La Méditerranée a également servi et sert encore de laboratoire pour les théories économiques du développement et les stratégies d'influence géopolitique auxquelles se sont toujours livrées et se livrent encore les puissances occidentales et l'ex-URSS (dissoute le 23 décembre 1991), aujourd'hui la Russie, mais aussi la Chine et d'autres puissances émergentes comme l'Iran.
Les indicateurs macroéconomiques (PNB/habitant,...) -même si les pays du Nord sont fortement endettés- et socioéconomiques (espérances de vie, pauvreté, etc.) expriment clairement les écarts de niveaux de développement et de vie entre l'UE et la majorité des PSEM (à l'exception d'Israël et aujourd'hui de la Turquie).
c) Obstacles politiques et structurels:
Sans parler des obstacles politiques si l'on en juge par l'attitude de l'Europe des 27 vis-à-vis de la Turquie musulmane ; il est certain que les structures économiques, industrielles, éducatives,... des PSEM sont mal adaptées aux conditions actuelles de la régionalisation et de la mondialisation. En effet, les exportations de ces pays traduisent (à l'exception d'Israël et la Turquie) une spécialisation de type pays en développement (produit énergétiques et miniers, textile-habillement, produits agricoles). La Tunisie et le Maroc disposent cependant de quelques embryons d'une production plus sophistiquée (construction électrique et électronique).
Il convient également de souligner que généralement les systèmes éducatifs des pays arabes sont inappropriés : les structures éducatives supérieures n'ont pas généré de capacités de recherche-Développement (RD) suffisamment importantes pour leur permettre l'acquisition de «compétences propres» et la constitution d'une «base de connaissances».
2/ ... aux retombées incertaines
Les effets potentiels d'une Zleem sur les économies des pays signataires ont été étudiés dès le début du processus de Barcelone sur la base d'une simulation mettant en œuvre des MCEG (Modèles calculables d'équilibre général). Il s'agit de simulation en statistique comparative, avant la libéralisation de l'économie et après, des impacts macroéconomiques (PIB, investissement, commerce extérieur,...) de l'instauration d'une ZLE. La simulation s'effectue sur la base de nombreuses hypothèses articulant le champ sectoriel du libre-échange, l'intensité de la compensation fiscale, les apports de capitaux extérieurs et l'élasticité de l'offre.
Les simulations réalisées ont montré que la Tunisie pouvait, dans le meilleur des cas, gagner sensiblement en termes de « bien-être » (évalué comme un surcroît de revenu) à condition que la réallocation des ressources s'effectue rapidement et efficacement. En ce sens, il faut que la réallocation des facteurs s'oriente vers la production des biens exportables.
L'étude de K. Drusalla Brown, V.A. Deardorff et M.R. Stern avait montré que l'impact de la ZLE sur l'Europe, plus précisément sur la France et l'Italie, avec la Tunisie est médiocre et diffus. Il est évalué à une augmentation de leur PIB d'à peine 0,1%. L'intérêt recherché par l'Europe, dans le cadre de cette accord, est surtout de nature géopolitique : assurer la sécurité et la stabilité dans la région pour préserver ses propres intérêts, mais aussi résister aux forces d'éviction exercées par les Etats-Unis et désormais la Chine qui veulent étendre leur influence sur cette région du monde.
Pour la Tunisie, d'après l'étude réalisée par Institut Tunisien de la Compétitivité et Etudes Quantitatives (ancien Institut des Economies Quantitatives) en 1996, les résultats sont indéniablement faibles : Dans le meilleur des cas, la Tunisie aurait bénéficié d'une modeste croissance de 3,73% de son « bien-être ». Nous disons bien « dans le meilleur des cas », car les Mceg sont des constructions intellectuelles fortement hypothétique : Les différentes simulations sont en statique, ce qui signifie que les comportements intertemporels ne sont pas considérés ; le taux de croissance est fixé entre 6 et 7%, l'augmentation de la TVA devait compenser le déficit budgétaire causé par le désarmement tarifaire, les IDE sont sensés doublés, etc.
Aussi, la réalité géopolitique et géoéconomique montrent la complexité des relations géostratégiques internationales et les difficultés pour les économistes à prédire grâce à un MCEG, une matrice de comptabilité sociale (MCS) – aussi compliquée soit-elle ?-, les évolutions économiques et sociales d'un tel ou tel pays. Mieux encore, Quinze ans après la conclusion de cet accord, la Tunisie n'a-t-elle pas connu une révolution sonnant le glas des régimes tyranniques dans la région ? Le chômage (près de 20% en 2010), la pauvreté, la misère sociale, les privatisations tous azimuts, la déréglementation économique et le désengagement de l'Etat de certains secteurs et œuvres sociales, ..., n'ont-ils pas eu raison du régime de Ben Ali ? Et ceci malgré son appareil répressif et la main de fer avec laquelle il a gouverné le pays pendant plus de 23 ans ! Ce que Jacques Chirac qualifiait le 3 décembre 2003 à Tunis de « miracle tunisien » s'est avéré, à vrai dire, un désastre économique doublé d'un drame politique !
La Tunisie, qui était le premier pays à avoir signé le protocole de création d'une Zleem est aussi le pays qui a donné le coup d'envoi des révolutions arabes ! L'Egypte second pays signataire de ce protocole a connu le même sort le vendredi 11 février 2011, exactement quatre semaines après la chute du Président tunisien le vendredi 14 janvier 2011 ! Que devrions-nous en conclure ?
Le Maroc aussi signataire de ce protocole de création d'une ZLE a failli connaître le même sort si ce n'est le génie politique du Roi Mohamed VI qui a entrepris immédiatement et sans délais, des réformes de fond, tout en organisant en même temps des élections législatives libres et transparentes pour absorber ainsi la grogne de la population exacerbée par la montée des inégalités et l'absence de justice sociale. Pourrais-je oublier la Syrie, autre pays signataire du «Partenariat Euro-méditerranéen» en 1996 ?
Ce qu'il faut retenir
Lors de cette modeste contribution nous nous sommes efforcés de montrer (partie I/II) le contexte économique et politique régional et mondial pour mieux saisir le sens de l'offre européenne et les attentes des PSEM et particulièrement des pays arabes. Si pour les premiers les préoccupations géostratégiques (sécuritaires), géoéconomiques et donc géopolitiques sont presque affichées, pour ne pas dire suffisamment claires ; pour les seconds, c'est-à-dire les pays de la rive sud de la méditerranée, ils espèrent, quant à eux : une meilleure insertion dans la DIPP, séduire davantage les investissements étrangers et, surtout, un soutien politique pour des régimes en éternelle quête de reconnaissance internationale ; même quand ils sont élus démocratiquement, comme Ennahdha, parti ultraconservateur en Tunisie !
Aujourd'hui (Partie II/II), nous avons tenté de montrer l'incohérence de ce projet au vu des disparités socioéconomiques entre les deux rives, des obstacles politiques et surtout structurels mais aussi qu'il s'agit d'un «partenariat» dont les retombées potentielles sur l'économie tunisienne sont trop incertaines pour ne pas dire, par certains aspects, catastrophiques !
Nous pensons qu'il serait nécessaire pour la Tunisie de mieux développer et renforcer ses relations économiques et politiques avec ses voisins du sud et de l'est de la Méditerranée en général et du Maghreb en particulier. Sur le plan économique, il existe entre la Tunisie et le reste des PSEM des complémentarités qui méritent d'être exploitées davantage (énergie, industries légères, biens de consommation durables, agriculture...). En d'autres termes, il faudrait développer les échanges intrabranches entre les PTM à l'image des échanges actuels avec la Turquie, qui importe des composantes électroniques de Tunisie et exporte des téléviseurs aux PSEM et au reste du monde. Pour les pays du Maghreb, l'ouverture réciproque des frontières aurait un double avantage : outre les effets classiques de libéralisation des échanges commerciaux, leur vaste marché serait un atout indéniable pour séduire les investisseurs étrangers.
(Professeur de sciences économiques et sociales-Grenoble)
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Nous citons particulièrement trois études qui ont été réalisées par :
L'Institut tunisien d'économies quantitatives (1996). Depuis, cet institut est rebaptisé «Institut tunisien de la compétitivité et études quantitatives»;
T.F. Rutherford, E.E. Rustrom et D. Tarr pour le compte de la Banque mondiale (mars 1995);
K. Drusalla Brown, V.A. Deardorff et M.R. Stern pour le ministère tunisien de la Coopération internationale et de l'Investissement extérieur (avril 1995).
Pour approfondir ces aspects d'ordre théorique et conceptuel nous renvoyons le lecteur à notre thèse de Doctorat, soutenue en janvier 2000, Université Pierre Mendes France : «Investissements directs étrangers, partenariat euro-méditerranéen et développement au Maghreb : le cas de la Tunisie».


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