Une semaine après l'Aïd, la plupart des bouchers sont encore en congé, par contrainte ou par résignation. Ils sont contraints à baisser les rideaux de leurs boutiques pour une période variant entre 7 et 30 jours. Les bouchers s'attendaient, en effet, à voir leur activité commerciale réduite à néant, après la célébration de l'Aïd El Idha. Et alors que les congélateurs des Tunisiens se trouvent suffisamment chargés de sachets de viande d'agneau, les frigos des bouchers, eux, sont vides, et ce, dans l'attente d'une demande méritant la sollicitation des fournisseurs. Une semaine s'est déjà écoulée. Les bouchers continuent à patienter et à gober, un tant soit peu, ce stand by forcé. Bilel Nouri, boucher, a décidé quand même d'ouvrir sa boutique en ce dimanche 20 octobre, sans pour autant espérer une affluence massive . Il y a à peine quelques jours, il recevait des clients qui le sollicitaient pour un découpage professionnel de la viande (spécial couscous, kadid, grillades et autres). Aujourd'hui, il graisse l'énorme support en bois afin que la couche supérieure ne s'effrite faute d'activité. «Il faut dire que les semaines succédant à l'Aïd constituent le congé annuel par excellence des bouchers. La stagnation du commerce est telle qu'elle s'étale sur pas moins de 15 jours et peut, pour certains, aller jusqu'à deux mois», indique Bilel. Si certains interrompent leurs activités, d'autres profitent de cette période d'accalmie pour apporter quelques retouches à leurs boutiques. C'est le cas de Fayçel Bou Gatfa, boucher à Ras Ettabia. «Entre nettoyage total du matériel et des équipements, maintenance du réfrigérateur, ainsi qu'un bon coup de pinceau pour la boutique, il y a vraiment de quoi fructifier une période de stagnation», souligne-t-il. Pour lui, la crise économique constitue toujours un handicap de taille aussi bien pour le consommateur que pour le commerçant. Si, en temps normal, les ventes ont chuté par rapport aux dernières années, les choses risquent d'être encore plus compliquées durant le « congé des bouchers». Il est à noter que durant cette période post-aïd, la demande se limite à la seule viande bovine ainsi qu'aux saucisses. Ce n'est qu'un mois plus tard que les maîtres de la viande rouge se décideront à réintroduire la viande d'agneau dans leur commerce. Au boulot ! En effet, de nombreux clients n'hésitent pas à s'approvisionner en viande de veau et en saucisses. Question peut-être de changer de goût, ou probablement en raison de l'abstention de certains à s'adonner au rituel du sacrifice pour des raisons économiques ou autres. Oussama Ben Ibrahim travaille comme vendeur dans une boucherie à la cité Ibn-Khaldoun. Il subvient à la demande des clients qu'il qualifie, d'ailleurs, de timide. «Nous ne traitons avec aucun fournisseur, car nous avons nos propres troupeaux. Nous égorgeons donc les animaux pour répondre aux besoins définis de nos clients», indique Oussama. Mais cette assurance n'est pas valable pour tous. D'après Bilel, de nombreux bouchers risquent de faire faillite en cette période de stagnation. «C'est le cas des bouchers qui n'ont pas une clientèle fidèle et qui s'endettent auprès des fournisseurs. S'ils ne parviennent pas à vendre leur marchandise tant qu'elle est encore fraîche, le poids de cette dernière diminue au réfrigérateur, d'où la perte financière», explique-t-il.