C'est qu'en cette période de l'année, ces deux commerces donnent à constater maints dépassements et infractions aux règles de la concurrence et à la maîtrise des prix ; un phénomène récurrent qui nuit à la transparence des relations commerciales et aux droits du consommateur. Celui-ci a, en effet, le droit de bénéficier de produits sains, conformes aux normes et dont les prix sont conformes aux obligations légales. En effet, et après la période de l'Aïd el idha, placée, pour le domaine de la boucherie, sous le signe du reflux, certains commerçants recourent à l'augmentation des prix, pénalisant ainsi les consommateurs les moins avisés. Selon la direction des recherches économiques, le prix des viandes rouges a atteint 15dt dans certaines boucheries, ce qui n'est pas conforme aux obligations légales. D'un autre côté, et à la veille de la fête de fin d'année, certains pâtissiers préfèrent ne pas afficher les prix des gâteaux pour pouvoir ainsi proposer des prix improvisés, «à la tête du client». D'autant plus qu'il n'indiquent pas, dans la plupart des cas, les ingrédients distinctifs des différents gâteaux. Débordés, suite à une demande exceptionnellement exagérée, certains d'entre eux ne se montrent plus regardants quant à la validité des produits utilisés. Pour faire face à ce genre d'abus et contribuer à la protection du consommateur et à la garantie de la transparence des traitements commerciaux, quelque 21 équipes de contrôle économique se sont mobilisées récemment pour effectuer des visites inopinées dans les boucheries et les pâtisseries, et ce, dans l'objectif de mettre le doigt sur les éventuels dépassements, dénoncer les infractions, convoquer lesdits réfractaires et les sensibiliser quant à l'impératif de se soumettre aux règles commerciales fixées par les lois du pays. Il est 10 heures en ce mardi 29 décembre. Mme Ben Aïssia et M. Ouali ont pris la route vers la banlieue nord de Tunis. Au programme : quatre destinations à contrôler, à savoir La Goulette, Le Kram, Sidi Bou Saïd et La Marsa. Du marché municipal de la Goulette à celui de La Marsa, nous sommes passés par diverses boucheries, de nombreuses pâtisseries, le petit marché municipal de Sidi Bou Saïd... Et à chaque fois, notre passage n'a pas été dépourvu de surprise, de crispations de la part de certains commerçants, d'exclamations à l'initiative des badauds. Mme Ben Aïssia et M. Ouali se séparent à chaque fois, se glissant dans la peau de deux consommateurs. Ils entrent dans la boutique, s'armant de leur sens de l'observation pour détecter les éventuelles infractions. «Notre objectif pour ce qui est de la boucherie, c'est de s'assurer de l'affichage clair et juste des prix. Il est important que l'affichage soit mis directement sur les produits. Un affichage collé au mur ne ferait pas l'affaire», nous précise Mme Ben Aïssia. En face du marché municipal de La Goulette se trouve une boucherie. Ce boucher n'indique pas le prix des viandes qu'il propose, et la contrôleuse se montre intransigeante là-dessus. En entrant dans le marché de La Goulette, et bien que l'équipe soit chargée de contrôler boucheries et pâtisseries, elle n'hésite pas à vérifier le prix des légumes et fruits en tenant compte de la date d'approvisionnement. Surpris, certains commerçants ont fui leur étal. Des prix à leur guise A La Goulette comme à Sidi Bou Saïd et à La Marsa, la plupart des bouchers n'indiquent pas clairement le prix de leur marchandise. Certains affichent les prix légaux et annoncent des prix gonflés. C'est le cas d'un boucher à Sidi Bou Saïd, qui propose le kilo de viande de veau à 14dt au lieu de 12dt. «L'approvisionnement de la viande nous coûte très cher, le commerce stagne et notre gain est dérisoire», argumente le commerçant sur un ton suppliant. A l'attitude défensive de ce commerçant, s'oppose une autre, pleine d'arrogance, celle d'un boucher exerçant à La Marsa, et qui propose sa marchandise à des prix exagérés. «Ce sont des prix tout à fait logiques. La viande nous coûte cher et tout le monde est conscient de cette réalité. D'ailleurs, je ne signerai pas votre convocation», proteste-t-il d'un air défiant. Quels que soient les arguments avancés par les commerçants réfractaires, la position des agents de contrôle reste ferme. «Si je reviens sur ma décision, les commerçants ne me prendront plus au sérieux. D'autant plus que je me place toujours dans la situation des consommateurs, car, avant toute chose, je suis une consommatrice et je ne tolère pas que l'on m'induise en erreur», ajoute Mme Ben Aïssia. Du côté des délices, les infractions économiques se font moins importantes. L'affichage des prix ne fait généralement pas défaut. Toutefois, il est parfois illisible. C'est le cas d'une pâtisserie située à La Goulette et dont les prix des gâteaux sont mis de telle manière qu'ils soient inaperçus. Cette pâtisserie propose également plusieurs variétés de pain dont les prix respectifs ne sont pas indiqués. Nous nous arrêtons, ensuite, pour visiter une autre pâtisserie, située au Kram. En franchissant le seuil de ce lieu, l'on découvre, non sans enthousiasme, des gâteaux, des délices traditionnels et autres confiseries aux prix soigneusement exposés. «Soit. Mais vous n'indique pas, à ce que je vois, le contenu des gâteaux, or c'est très important», fait remarquer Mme Ben Aïssia. Le contrôle économique implique également la vérification de la validité des produits utilisés pour la préparation des gâteaux. Les agents de contrôle insistent beaucoup sur la vérification des dates limites, mais aussi sur l'utilisation d'huile certifiée conforme aux normes. Dans cette pâtisserie, les normes économiques sont respectées à quelque différence près. Cependant, celles relatives à l'hygiène font carrément défaut : des plateaux de cuisson salissimes et rouillés, un matériel noirâtre, des génoises toutes prêtes, stockées pendant une semaine dans un endroit sale, dont le plafond est parsemé de moisissure... «Cela relève surtout du contrôle sanitaire et de celui de l'hygiène», note M. Ouali. Le travail de l'équipe s'est achevé sur un résultat insatisfaisant : la plupart des commerçants contrôlés sont réfractaires. «Nous avons relevé 11 infractions, dont 3 convocations», conclut Mme Ben Aïssia. Et d'ajouter que ces infractions seront présentées au service contentieux de la direction de la concurrence et du contrôle.