Notre fondation est ouverte à tous, sans discrimination aucune et elle défendra les minorités et leurs droits Partant de la pensée et de l'héritage de Habib Bourguiba, une pléiade d'activistes, universitaires, politiques, femmes et hommes d'affaires viennent de créer une fondation portant le nom du premier président de la Tunisie indépendante et moderne : «Fondation Habib-Bourguiba pour la tolérance». Le président du bureau constitutif de cette fondation, Nizar Ayed, avocat de métier, a précisé hier, lors d'une conférence de presse, que c'est une organisation apolitique dont le but principal est de promouvoir la culture de la tolérance et la réconciliation nationale. Il a indiqué que cette fondation s'appuie sur les principes de la Charte des Nations unies, et notamment la déclaration de principes sur la tolérance adoptée par la Conférence générale de l'Unesco le 16 novembre 1995 à Paris. «C'est en réaction à une montée fulgurante de l'intolérance, de la violence et de plusieurs autres aspects de déni de l'autre et une certaine exclusion et discrimination des minorités, que nous, membres fondateurs, avons créé cette fondation. Nous pensons que l'œuvre du président Bourguiba, aussi diversifiée soit-elle, est basée sur la tolérance et la réconciliation nationale, avec un projet sociétal national moderniste. Nous estimons que Bourguiba avait un projet qui dépassait sa personne et ses propres ambitions pour bâtir un Etat moderne sur fond de tolérance et de paix», a-t-il souligné. «Notre fondation ne se met sous l'aile d'aucun parti politique et, pour la pensée du leader Bourguiba, elle était au-dessus de tout parti. C'est devenu, du moins à notre regard, une référence, notamment en ce qui concerne la pensée réformiste en Tunisie. Notre fondation est ouverte à tous. Sans discrimination aucune, et elle défendra les minorités et leurs droits. En cette première étape, nous bénéficions d'aides financières à travers nos relations personnelles. Sur des projets comme celui de la promotion de la culture de la tolérance dans les écoles primaires, nous allons essayer d'impliquer le secteur privé. Nous visons une meilleure coordination avec les instances internationales en la matière, dont notamment l'Unesco», a ajouté Nizar Ayed. Une relecture s'impose Le bureau constitutif de la Fondation Habib Bourguiba pour la tolérance comporte des universitaires, des femmes et des hommes de divers domaines : médias, affaires et autres. Ses membres ne sont que : Nizar Ayed, président, Mohamed Salah Bettaïeb, PDG de la maison d'édition Alif, Hajer Echikh Ahmed, vice-présidente, et Insaf Yahiaoui, toutes les deux journalistes, Leïla Belkhiria, vice-présidente de l'Organisation des femmes chefs d'entreprises, Rabiaâ Nejlaoui, membre de l'Assemblée nationale constituante pour Nida Tounès, Rached Khelifa, universitaire, et Elyahou Trabelsi, homme d'affaires et membre du congrès juif-européen. Autour de ce bureau, constitutif, on a vu plusieurs personnalités nationales présentes, notamment d'anciennes figures du régime Bourguiba et autres personnes qui l'ont côtoyé, à l'instar de Ahmed Ounaïes, ancien diplomate, Rachid Sfar, ancien Premier ministre, Abdelmajid Chaker, Hedi Baccouche, Mohamed Krayem, Noureddine Hached, Tahar Boussema et Faouzi Loumi. «Autour de notre fondation, a précisé Nizar Ayed, nous avons des universitaires, des historiens, des jeunes et des moins jeunes, avec un certain équilibre entre les deux genres». La fondation est en phase de lancement et il y aura plusieurs projets à développer. C'est que, dans un Etat moderne, on doit avoir un engagement de la part de la société civile. L'Etat ne peut tout prendre en charge et la pensée réformiste de Bourguiba a bien explicité cela», a-t-il ajouté. Pour sa part, Rachid Sfar, ancien Premier ministre sous le régime de Bourguiba, plutôt sensible aux questions politiques, a critiqué la classe politique tunisienne qui ne parvient pas à se dégager de la crise actuelle. «La classe politique tunisienne, a-t-il déclaré, aurait dû chercher un consensus et rapprocher davantage les idées». Au lieu de nier ou de rompre avec l'héritage, notamment de Bourguiba, on aurait dû faire une relecture de cet héritage pour bénéficier de ce qui est positif et mettre de côté le négatif. C'est absurde de penser qu'on peut bâtir une société en optant pour la négation du passé et pour la rupture avec l'histoire. Nous sommes dans une période transitoire et de tension. Avec un peu de temps, tout le monde retrouvera son psychique initial et avouera que Bourguiba, avec les militants qui l'ont suivi, était le bâtisseur de l'Etat tunisien moderne. Désormais, il faut éviter les dérapages, notamment en matière de liberté d'expression, d'indépendance de la justice et de développement équitable. Le Dialogue national aurait dû porter sur les mécanismes pour lesquels on devrait opter afin de réaliser les objectifs, et non sur les fondements de l'Etat moderne et les textes à promulguer. Cette dispersion des efforts reflète une très mauvaise image de la Tunisie, qui est menacée de maints dangers. Les solutions pour cette crise sont là. Pourquoi pas une équipe de quatre personnalités nationales...», a enchaîné Rachid Sfar. Reste que notre classe politique doit être consciente du devoir de préserver un climat de tolérance et de paix en dépit des tiraillements. Le champ d'action de cette fondation récemment créée semble bien épineux. Mais, partant avec des références bien définies, les fondateurs semblent outillés pour défendre des idées auxquelles ils croient. Bon travail.