L'économie sociale et solidaire (ESS) est un secteur insuffisamment développé en Tunisie. Elle pourrait, pourtant, répondre à des problématiques d'emploi dans les régions Le Réseau tunisien de l'économie sociale (Rtes) a organisé, lundi dernier à Tunis, une journée internationale sur le thème de l'économie sociale et l'emploi. Cette rencontre avait pour but de rassembler ses acteurs en Tunisie et d'évoquer les perspectives de développement de l'ESS. Bien que son existence soit historique, l'économie sociale et solidaire n'est pas suffisamment développée en Tunisie. Le manque de financement et de formation des dirigeants des structures de l'ESS serait la principale raison. En outre, il n'existe pas de système d'information sur l'ESS. Hafedh Laâmouri, ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi, a affirmé, lors de l'allocution d'ouverture de la journée, sa volonté d'aider les associations à jouer le rôle d'acteur économique à part entière. Il souhaite que les structures de l'ESS se développent pour aider les pouvoirs publics à dynamiser l'économie. Actuellement, ces structures dépendent quasi totalement du financement public. "Elles ne participent pas de façon effective à la création d'emplois, contrairement à d'autres pays où on atteint les 20% dans ce domaine. Les interventions des structures de l'ESS ne doivent plus être limitées à des activités mutualistes, il faut qu'elles soient plus agressives et qu'elles cherchent à s'autofinancer". La Belgique accueillera, fin mars, les acteurs tunisiens de l'économie sociale. Ce pays a une expérience confirmée dans l'économie sociale et solidaire développée depuis les années 1970 après une hausse du chômage. Selon Marie-Caroline Collard, directrice générale de Solidarité des alternatives wallonnes, il existe plus de 27.000 organisations de l'économie sociale en Belgique francophone dont plus de 9.500 fournissent de l'emploi à Bruxelles et en Wallonie. Par ailleurs, plus de 180.000 emplois "de qualité" contribuent au renforcement d'une économie bruxelloise et wallonne locale, dynamique, durable et solidaire. Le nombre d'emplois a progressé d'un peu plus de 20% sur les cinq dernières années. Patrick De Beyter, ambassadeur de Belgique, a confirmé l'importance des entreprises sociales et solidaires "dans l'économie et le bien-être des populations. Il faudrait mettre en place les instruments financiers pour la développer". Des opportunités à la clé Selon le Dr Ouled Abdallah Belaïd, président du Rtes, les structures de l'économie sociale en Tunisie connaissent un certain nombre de problèmes. Par exemple, les associations manquent de ressources humaines et financières. Les anciennes associations de microcrédit sont particulièrement concernées par ce problème, car elles ne bénéficient plus du financement de la Banque tunisienne de solidarité depuis l'entrée en vigueur du décret-loi 2011-117 en 2012. «297 associations de développement sont dans l'impasse et 1.200 cadres se sont retrouvés au chômage à cause de cette nouvelle loi. Ces structures donnaient de l'espoir à des personnes à faibles revenus, maintenant ce sont elles qui en recherchent». De plus, le nouveau taux d'intérêt, qui était de 5% sur capital restant dû, n'a toujours pas été fixé, selon le chercheur. Les coopératives, quant à elles, souffrent d'un manque de dirigeants qualifiés. «A cause de leurs pratiques et gestion bureaucratique, les coopératives ont des difficultés à concurrencer les opérateurs privés. Le renforcement de ces structures, par le recrutement des compétences de l'enseignement supérieur, participerait à assurer la stabilité géographique des jeunes ruraux», a-t-il expliqué. Pourtant, l'ESS pourrait offrir de nombreuses opportunités d'emploi et de création de projets dans le domaine du tourisme social et familial par exemple. «La Tunisie a une expérience très riche en matière d'économie sociale et solidaire. Ses composantes peuvent constituer un secteur d'employabilité des jeunes, notamment les diplômés de l'enseignement supérieur. Cependant, la mise en place d'une loi sur l'économie sociale en Tunisie est primordiale», conclut Dr Ouled Abdallah Belaïd.