Notre football s'est transformé en véritable jungle sous l'œil passif et complice des institutions censées le gérer L'image est sans doute cruelle, voire cynique, mais, par ces temps de grande tempête sur notre ballon rond, notre football ressemble de plus en plus au malheureux avion malaisien disparu dans la nature voilà un mois. On sait qu'il y a une compétition qui a décollé, mais on ne sait pas de quelle manière elle va atterrir et s'achever, et surtout, on ne sait pas avec quels dégâts. Ou plutôt si, presque le règne est à la terreur et la loi celle de la jungle. Le tout sur fond de menaces, de faits accomplis et de «banditisme sportif», sous les yeux de tous et avec la complicité d'acteurs pour qui seul importe le résultat final. Celui d'un match et celui du maintien en Ligue 1. Résultats faussés Quels que soient les verdicts de fin de saison, nous savons d'ores et déjà qu'ils n'obéissent pas aux règles et à l'éthique sportives. On continue à jouer et à laisser jouer, alors que les principes fondamentaux du sport sont bafoués. Tout le monde crie au complot alors que tout le monde est partie prenante de ce complot. Par le passé, on vendait, on achetait ou alors on offrait généreusement le gain du match. Dans l'impunité la plus totale. Aujourd'hui, on «terrorise» et on prend de force quand une partie dénonce cela, on brandit le régionalisme pour se défendre contre les attaques et les procès d'intention. Plus aucune réserve, plus aucune pudeur, plus aucun scrupule et plus aucune peur. Plus de sport non plus où la règle est à la victoire ou à la défaite, mais que tout le monde rejette et refuse comme si elle ne faisait pas partie du jeu. Ce phénomène, nous l'avons vu venir comme nous avions assisté, des décennies durant, aux «arrangements» de toutes sortes entre nos clubs. Comme nous avions assisté «terrorisés» (déjà!) et impuissants à l'insoutenable arrogance d'un certain Slim Chiboub qui a pourri notre football. Mais nous pensions tout de même que le «monstre» parti, notre football retrouverait son éthique et sa pureté. Illusions. La faute à qui? En apparence aux différents acteurs de notre football (joueurs, entraîneurs, dirigeants et supporters), mais en réalité, ce sont la fédération et la Ligue qui sont aujourd'hui sur le banc des accusés. Leur silence coupable en dit long sur leur faiblesse, leur impuissance et leur culpabilité directe dans tout ce qui se passe de grave et de dangereux dans notre football. Autres complices, les présidents de nos clubs, collège électoral de cette fédération qui s'accommodent bien de cette gabegie dont ils tirent quelques menus profits. Un déluge permanent Après moi le déluge? Non, c'est «avec moi, d'abord puis, après moi si je ne suis pas élu». Le mal, il faut le chercher dans les élections du bureau fédéral et même bien avant puisque la «mafia de notre football» prend le soin d'abord d'exclure au départ toutes les candidatures gênantes. C'est-à-dire tous ceux qui appartiennent au monde du football et qui peuvent changer la règle du jeu. Promesses, clientélisme, dessous de table et manipulations sont au menu de la campagne électorale. A ce jeu, les gens du football sont perdants d'avance et place aux intrus et aux apprentis-sorciers. Wadii Al Jary et sa bande en sont les parfaits représentants et leurs déboires et ceux occasionnés à notre football sont à la mesure des personnages. Pas contents d'avoir coulé notre équipe nationale, les voilà spectateurs et acteurs coupables de la montée des périls dans notre compétition. Pas un mot sur ce qui s'est passé la saison écoulée à Gafsa, pas un mot sur Métlaoui, pas un mot sur tout ce qui se passe depuis quelques week-ends dans nos stades. Promesses électorales obligent et prochaine campagne électorale oblige. Il a fallu que les journalistes bougent, traînant avec eux quelques arbitres et quelques présidents de clubs. Pas concernés les mecs terrés dans leur tour d'ivoire et derrière des règlements obsolètes. Que les policiers et la Garde nationale se débrouillent, que les journalistes aillent en enfer et que le ministère fasse le boulot qui leur revient. Que l'équipe nationale perde cinq autres places au classement mondial et que les Tunisiens regardent les autres jouer au Brésil. Un voyage par-ci, une place dans une commission de la CAF, de l'Union arabe de football ou, le luxe, dans une commission de la Fifa... par-là. Assurer ses arrières, faire le gros dos, laisser passer l'orage et attaquer les prochaines élections, mettre la main sur la direction technique, nommer un nouveau sélectionneur national, lui présenter un «technicien ami» pour le poste d'adjoint et le tour est joué. Tournez manèges!