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«L'art est un investissement pour l'identité, la civilisation et la culture»
L'entretien du Lundi — Hichem Rostom
Publié dans La Presse de Tunisie le 13 - 10 - 2014

Le comédien Hichem Rostom sera bientôt à l'affiche aux côtés de Taoufik Bahri dans une pièce de Moncef Dhouib qui dresse un constat amer sur la culture en Tunisie. Une belle occasion pour le rencontrer autour de la question du droit à la culture et au théâtre, ses véritables amours. Entretien.
Vous êtes en pleine préparation d'une nouvelle pièce de théâtre «Dar ethakafa»...
En effet, ça fait plusieurs mois qu'on est sur le projet «Dar ethakafa» (la maison de la culture), pièce écrite par Moncef Dhouib et interprétée par Taoufik Bahri et moi-même. C'est une pièce qui est partie d'une idée que j'ai eue au cours d'un spectacle il y a 3 ans. C'est un comédien qui veut jouer «King Lear» de William Shakespeare en Tunisie, mais ne trouve pas d'espace pour répéter. Il est confronté à un certain nombre de problèmes parce qu'en Tunisie le théâtre classique n'a plus du tout sa place. Je dirais même plus : le théâtre, ce 4e art, est en train de perdre sa place au profit d'autres formes plus en vogue, de l'ordre de l'évènementiel.
Moncef Dhouib a pris cette idée et l'a développée parce qu'il voulait parler justement de l'état du théâtre.
C'est donc une parabole ?
Effectivement, c'est une parabole sur la situation du théâtre et de la culture en Tunisie. On s'est donc mis à travailler sur «Dar ethakafa» qui est un espace mythique en Tunisie, un espace qui a eu son heure de gloire ! Les maisons de la culture avaient favorisé dans les années 70 en Tunisie la décentralisation culturelle. Elles ont obéi à des principes auxquels nous autres artistes et hommes de scène tenions beaucoup, dont la proximité avec le public, la nécessité de faire des débats avec ce public et d'organiser des ateliers dans les écoles et les établissements. Avec Moncef on s'est dit où est passé ce rêve... L'état des lieux nous a montré que ce rêve est tombé en friche, que 273 maisons de la culture en Tunisie sont fermées et que le peu d'activités qui s'y déroulent sont bancales.
C'est un constat amer que chaque homme de culture doit certainement sentir...
Je déplore la situation du théâtre aujourd'hui. Elle m'attriste énormément ! Avec les gens de ma génération, dans les années 60 /70, si nous avons beaucoup travaillé et sacrifié beaucoup de choses précieuses, ce n'est pas pour en arriver là ! Je le dis d'ailleurs dans la pièce : alors que je vois nos amis avec qui j'ai fait des études et qui ont construit des maisons, acheté des voitures, fondé des familles et nous, parce qu'on a sacrifié les meilleures années de notre jeunesse à bâtir une culture décentralisée et un vrai théâtre populaire et pas populiste, nous avons reçu mille coups de fouet sur le dos. C'est une situation grave et qui ne date pas d'hier. Cela fait 20 ans que la situation de la culture et du théâtre en Tunisie est en train de péricliter.
Certains pensent que les gens du métier eux aussi y sont pour quelque chose...
Ce n'est pas du tout la faute des gens du métier, nous sommes des créateurs, des artistes, pas des décideurs. C'est la faute aux responsables politiques qui n'ont jamais voulu nous écouter et nous prendre au sérieux. Ils n'ont jamais voulu placer l'art au-dessus de tout. Ils ont toujours pensé que l'art doit servir à quelque chose. Mais on sait que l'art coûte cher et ne se doit pas d'être rentable. Dans ce sens, il a la même fonction qu'une école dans un village éloigné qui ne rapporte rien mais forme des générations de gens éclairés et qu'on peut soustraire à toutes les bêtises du monde.
Pourtant, le rêve de l'art pour tous était, à un moment donné, bien réel ?
Depuis les années 70 nous avons tenté de construire l'idée de l'art pour tous. L'art de haute voltige et qui est accessible à tous. Mais notre idée n'était pas de descendre au niveau du public mais de mettre Racine, Shakespeare, Corneille, Sophocle à la portée des gens. Tout le travail qu'ont fait Aly Ben Ayed, le théâtre de Gafsa et du Kef a été détruit par la médiocrité des responsables en place. L'Etat tunisien a été novateur et avant-gardiste dans le sens où il a été l'un des premiers Etats arabes à instaurer un ministère de la Culture avec une politique culturelle sérieuse conduite par des ministres comme Chedly Klibi, Mahmoud Messaadi et Habib Boularès. Puis, tout à coup, on a commencé à voir en face de nous des hommes politiques qui ne sont pas intéressés par la culture, qui veulent s'en servir comme vitrine et qui ne pouvaient pas comprendre que l'art et la politique sont deux choses différentes. Je le dis dans la pièce et je le pense : l'artiste doit être engagé politiquement, il ne doit pas être engagé dans un parti.
Avez-vous l'espoir qu'un jour tout ça va changer ?
En parlant d'espoir, je dis simplement que maintenant nous devons faire confiance aux nouvelles générations qu'on doit former. Et par exemple à Ciné Vogue, avec Moncef Dhouib, on a décidé d'ouvrir ces lieux pour abriter une académie d'art afin de former des jeunes et de les initier au théâtre. Ils ne deviendront pas forcément des acteurs mais au moins des spectateurs avisés qui connaissent le théâtre. Vous savez, ce n'est pas nous qui avons baissé les bras, c'est l'élite tunisienne: les médecins, les avocats, les professeurs ne vont plus au théâtre. Les grands acteurs économiques ne nous suivent pas non plus ! Ils nous donnent l'aumône sous forme de sponsoring et c'est tout. Il n'y a pas de sponsoring culturel. Il y a un mécénat d'Etat sous conditions. Le Ciné Vogue, où on présentera cette pièce qui parle de l'état de la culture, est-il en train de vivre la même expérience, dans le sens où Moncef Dhouib a investi tout son argent et travaillé pendant trois ans pour créer cet espace sans bénéficier d'aucune aide.
Pensez-vous que l'avenir est dans l'associatif et les initiatives personnelles ?
J'ai une grande confiance dans le tissu associatif, les initiatives personnelles et dans les jeunes qui veulent changer les choses. Et nous ne sommes que des acteurs du changement, nous ne sommes plus ceux qui doivent encore rabâcher les mêmes idées qui ont foiré. Il ne faut surtout pas perdre de vue le fait que l'art, s'il ne touche pas les gens au fond de leur âme, de leur identité, ne sert à rien ! C'est pour cela que le théâtre est très difficile. Mais on ne doit pas mettre une croix sur tout l'art abstrait parce que le public ne comprend que le figuratif, de la même manière qu'on ne peut pas mettre une croix sur Shakespeare sous prétexte que c'est du vieux et du révolu.
Mais toute entreprise artistique doit être économiquement viable...
L'art n'est pas une activité économique, ce n'est pas une denrée qu'on vend et qu'on achète. C'est un investissement de la société pour sa propre identité, la civilisation et la culture. Un pays sans théâtre, c'est un pays sans âme. Un pays sans musique est un pays sans culture. Un pays sans littérature est un pays analphabète. Et pourtant toutes ces activités ne rapportent pas d'argent.
Entretien conduit par


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