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Y a-t-il une vie après la retraite ?
Personnes âgées
Publié dans La Presse de Tunisie le 26 - 01 - 2015

Si pour les professions libérales, le problème de l'oisiveté ne se pose pas, les fonctionnaires souffrent le calvaire et le martyre. C'est que, pénible et tuant, le terrible sentiment d'inutilité va parfois jusqu'à abréger leur vie avant l'heure
C'est le jour le plus marquant dans la vie active d'un homme. Il est très attendu, mais aussi très redouté. C'est un tournant, le dernier virage. C'est le jour de départ à la retraite. On va dire au revoir, sinon adieu, à ses collègues. On va en finir une fois pour toutes avec le carcan du bureau ou de l'industrie. On va en finir avec les caprices et les remontrances du chef de service. Bref, on ne va plus dépendre de personne. On va enfin pouvoir respirer, oublier les bousculades matinales dans le bus, le métro ou le train. On va faire la grasse matinée, profiter de tout son temps, goûter à la vie. On est libre. Liiiibre !!!
Et bonjour le drame !
Les premiers jours de sa mise à la retraite, on est — presque — heureux. N'avoir rien à faire, ou, plus exactement, n'être plus contraint de faire quoi que ce soit, peut procurer un simulacre de bonheur pendant quelque temps. Mais soudain, l'impasse. Le jour fatidique se dresse tel un ogre, un vrai drame existentiel : ‘‘Que vais-je faire de ma journée ?''. Pénible, mortelle est cette question. Car, à l'évidence, on n'a plus rien à faire. Et c'est le cas général de — presque — tous les fonctionnaires. Passe encore si l'on a un hobby quelconque (lecture, jeu d'échecs, activité sportive...). Mais malheureusement, ce n'est pas vrai : au bout de trente ans d'administration, on perd fatalement le goût de la lecture (sauf les journaux, peut-être), et, à cet âge-là (60 ans), on n'a plus vraiment un physique à supporter quelque activité sportive. Du coup, le sentiment d'inutilité s'installe, gagne son homme, le triture, le meurtrit, le torture. Que faire quand on n'a plus rien à faire ? Il ne reste plus que deux options possibles : la mosquée et le café du coin. Or, à s'acquitter de ses cinq prières à la mosquée, on se rend compte inévitablement qu'on est passé de fait de l'autre côté de la vie : celui des vieux. Dans nos sociétés maghrébines, qui dit vieux, dit : vide et inutilité. Car toutes les prières réunies ne font pas plus d'une heure. Alors, on va au café. Et là encore, c'est un autre drame. Entre vieux, on trouve que rien ne va dans cette vie de chien : «L'Etat ne fait pas son travail comme il faut, la police ne fait rien qui vaille, la municipalité dort d'un sommeil profond, l'administration n'arrête pas de malmener le citoyen avec son éternel ‘‘Reviens demain'', les jeunes sont des diables, les filles d'aujourd'hui fument et boivent même de l'alcool, l'épouse devient de plus en plus stupide et invivable, les journalistes sont de fieffés menteurs et ne disent jamais la vérité, la ville est sale, la télévision n'en finit pas avec ses bourrages de crâne et sa langue de bois... ». On rouspète. On critique tout. On vocifère. On insulte le jour où le pays a vu le jour. On n'est content de rien. De rien !
«De grâce, tais-toi !»
A midi, on rentre à la maison et on passe tout en revue. Et comme par hasard, rien ne va plus, rien ne marche. «Le plancher est sale, il y a plein de poussière sur les meubles, les lampes ou les lustres n'ont pas été nettoyés depuis un siècle, on trouve ses chemises mal repassées, et même le couscous de toutes les semaines est soudain devenu insipide et immangeable... ». Alors, Monsieur donne ses directives à sa femme : les fais ceci et fais cela ne tarissent pas. Jusqu'au moment où la femme hurle : «B'jeh Rabbi Oskot !!» (De grâce, tais-toi).
C'est un malaise. Un profond malaise qui rejaillit sur les propos et les actes. Surtout, on ressent le besoin pressant de dire qu'on est encore là, qu'on a toujours son mot à dire, qu'on n'est pas fini pour autant. Or !... Or, très malheureusement, on est fini. Ça fait mal au cœur de le dire, mais beaucoup de fonctionnaires sont décédés juste trois ou quatre ans après leur mise à la retraite. Car, à la retraite, on ne vit pas, Messieurs. Non, on ne vit pas. On se meurt petit à petit. Pire qu'un cancer, le sentiment d'inutilité ronge son homme de l'intérieur, le mine et le précipite dans sa tombe.
Les rescapés
On va dire que, de façon générale, les hommes ayant une profession libérale (chauffeur de taxi, commerçant, médecin, pharmacien, avocat, prestataire de services, etc.) sont des rescapés. Mais pour une raison toute simple et évidente : ils ne partent pas vraiment à la retraite. Ils continuent d'exercer, même au ralenti, mais c'est toujours ça de gagné. Ils ne connaissent pas l'horreur et le drame de l'oisiveté. A ceux-là, on va ajouter tous les hommes de la plume : l'universitaire et l'instituteur qui peuvent toujours donner des cours privés, l'intellectuel devenu poète ou écrivain, le journaliste qui, s'il n'écrit plus, peut finir ses jours dans un asile psychiatrique, l'artiste-peintre ou le musicien, le cinéaste qui n'arrête pas de mendier à la porte du ministère de le Culture pour faire un film, le comédien ou l'acteur qui peut continuer à jouer en se faufilant dans la peau d'un vieilhomme – puisqu'il l'est lui-même, etc.
Question de culture
Ce malaise donc (celui des fonctionnaires) n'est pas ressenti par l'Européen ou l'Occidental. Sous leurs cieux, c'est une tout autre culture qui consiste, pour l'individu, à être toujours actif, par conséquent utile à la société. Vous connaissez tous cette activité qui fait que le retraité se livre au ramassage des enfants à la sortie de l'école. Les parents ne pouvant toujours s'acquitter de cette tâche, ils peuvent s'y soustraire grâce à ce monsieur volontaire qui l'accomplit avec plaisir et souvent sans contrepartie aucune. Car le plus important pour lui est de se dire utile, sinon indispensable ; c'est un sentiment magique qui fait que l'homme tient toujours à la vie. On peut citer des dizaines d'exemples comme le ramassage des écoliers. Mais on voudrait s'attarder un petit moment sur le cas de M. Gilbert Gailliègue. Français d'Aix-en-Provence, doté d'importantes notions de sociologie et de psychologie, il s'est improvisé, à sa mise à la retraite, père spirituel des...prisonniers. Il fait tous les jours 30 km pour se rendre dans une prison et se réunir avec les détenus en vue de les préparer à leur réinsertion sociale une fois qu'ils auront purgé leur peine. Tout en leur affirmant qu'il y a forcément une vie après la prison, il ne fait que se persuader lui-même qu'il y a une vie après la retraite. D'ailleurs, il a écrit un ouvrage intitulé « La prison des Africains », ses sujets incarcérés étant pour la plupart des Africains. A noter, aussi, que Gilbert le fait bénévolement (on lui paie seulement les frais de déplacement).
En Tunisie, malheureusement, on ne connaît pas cette culture du travail bénévole dont le mérite, pourtant, est qu'on reste toujours actif et en bonne harmonie avec la vie. Pitié, Messieurs ! A notre humble avis, il est plus que souhaitable que les grandes entreprises publiques et même privées fassent quelque chose pour leurs fonctionnaires une fois mis à la retraite. Ne serait-ce qu'un club doté d'une cafeteria, d'une bibliothèque, d'une salle de projection de films, d'une salle de jeux éducatifs (échecs ou autres), d'un animateur très cultivé qui puisse les éclairer sur certains sujets d'ordre politique, économique, social et culturel.
On peut trouver divers moyens pour faire en sorte que les fonctionnaires d'hier tiennent encore à la vie au lieu de sombrer dans la léthargie totale et la déprime.Ce sont vos pères, Messieurs. Ayez pitié d'eux !


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