PAR KHALED TEBOURBI La culture a fait débat, cette dernière semaine. Ce n'était pas, soit, une des priorités de M. Habib Essid (occupé à se "dépêtrer" ailleurs), mais le sujet a pris, et même très bien pris. Beaucoup de noms circulaient en ville et sur les réseaux sociaux, ‘‘en remplacement" de Mourad Sakli. Cela a dû jouer. Les médias, aussi, se sont particulièrement "saisis" de l'affaire. Exemple de notre consœur de "Nessma" Mariem Belkadhi (moins "expansive", plus agréable à suivre) qui lui consacra, elle, tout un plateau. Ce plateau du mardi 20 sur "Nessma News"a eu le mérite, sinon de résoudre, du moins de toucher les points les plus sensibles de la question. Deux en l'occurrence: -Quel ministre de la Culture? -Et(ou)quelle Culture? Discuter du "profil idéal", de "la personnalité la plus indiquée" aide-t-il à trouver les bonnes réponses? Honnêtement non. Les invités en ont, d'ailleurs, vite convenu. Les compétences culturelles ne manquent pas en Tunisie. Ni n'ont jamais manqué par le passé. En ayant mis sur leur piédestal les grands pionniers –fondateurs (ceux qui eurent la charge et l'initiative de la vision, de la conception et de la mise en route du projet national: Messadi, Klibi, Ben Slama), on peut dire que tous les ministres qui se sont relayés à la tête du département de la Culture, depuis l'Indépendance à nos jours, valaient, plus ou moins, la Fonction. A de rares différences, ce ne furent, en aucun cas, des "intrus". Voire, il y en a eu que l'on a regardé partir avec de réels regrets. Non: ce qui a, régulièrement, systématiquement, manqué à tous ces hauts et bons commis de l'Etat, c'est, moins de leur propre faute qu'à leur "corps défendant", de pouvoir développer une véritable politique de la Culture. Dans le droit fil des pionniers-fondateurs: une politique appuyée sur une vision globale, conçue et mise en place dans une perspective de durée et d'efficacité. Toute la dérive des Arts, à partir du déclin de Bourguiba, de la disparition de Messadi, du retrait de Chedly Klibi, de "l'éviction'' de Béchir Ben Slama, jusqu'aux 23 années de Ben Ali, est à mettre sur le compte de ce choix délibéré(propre aux régimes totalitaires)de vider la Culture de son impact éducatif et de ses ambitions de développement. Tout au long de ces trente années, on a réduit le ministère de la Culture à un département des "loisirs'' et les ministres de la Culture à de simples ‘‘administrateurs du divertissement''. Aucun souci pour les budgets, de plus en plus comprimés. Ni pour les structures, reléguées à des situations de "non-droit". Ni pour l'infrastructure, confrontée aux pires vétustés. Ni pour la formation et l'apprentissage artistiques, comme voués à l'abandon. Tawfiq Ben Brik exagère toujours ses critiques, mais il a quelque raison d'affirmer que "depuis Chebbi, Douagi, et la belle ‘‘poignée'' des 30-40, les muses tunisiennes sont frappées de stérilité, quasiment à l'arrêt!" C'est dire à quel point les noms ne devraient (ni n'auraient jamais dû)servir de référence unique. On a beaucoup parlé, ces derniers jours, du raz-de-marée de C.V. chez M. Habib Essid. Des projets eurent mieux valu. Pour les Arts et la Culture, par exemple, un texte "fondateur" (de nouveau) qui exposerait, par le détail, les termes, et l'approfondissement de quelle politique culturelle nous avons réellement besoin, aujourd'hui. Ces travaux existent, du reste. Anciens et récents. Tout récents même. Mais, visiblement, ignorés. Pour ne pas dire occultés: ce qui n'est pas, forcément, innocent...