Par M'hamed JAIBI Le terrorisme n'est pas proprement tunisien et nécessite donc que toute la communauté internationale lui tienne tête d'une manière solidaire et efficace. Et c'est le sens de la marche républicaine à laquelle a appelé le chef de l'Etat, et qui verra la participation de plusieurs personnalités étrangères de premier plan et des milliers parmi les participants au Forum social mondial qui se tient, pour la deuxième fois consécutive, à Tunis. Un large front international Et le large front international qui se met en place pour combattre la haine, la violence aveugle et la barbarie ne peut remporter de victoire décisive sur le jihadisme takfiriste qui n'épargne plus aucune contrée de par le monde, ne peut se passer d'autant de fronts internes dans tous les pays du monde pour éradiquer ce cancer qui menace la civilisation et le vivre-ensemble. D'où l'appel lancé par Béji Caïd Essebsi à consolider l'unité nationale et l'organisation de la marche républicaine à laquelle sont conviées, outre les invités, toutes les forces politiques, socioprofessionnelles et associatives du pays. La symbolique du musée du Bardo Mais, s'il est vrai que les deux grands partis et les diverses autres formations qui soutiennent le gouvernement très majoritaire de Habib Essid se sont pleinement engagés dans l'organisation de cette marche républicaine internationale sur le musée du Bardo, symbolisant la vaste solidarité qui s'est cristallisée contre le terrorisme, autour de l'attaque odieuse qui a vu se mélanger le sang de victimes de plusieurs pays amis venus s'abreuver d'histoire et de patrimoine millénaire, certains partis se refusent à élargir les rangs de cette manifestation à retentissement universel, de peur de voir se mélanger à la grande masse des citoyens opposés au takfirisme et au terrorisme jihadiste des personnes qui auraient favorisé par leur passivité ou leur complaisance, voire leur sympathie, l'infiltration du terrorisme en Tunisie. La deuxième «prise du Bardo» Une chose est certaine, c'est que les formations qui tiennent ce raisonnement, et essentiellement le Front populaire, sont en mesure de constater les immenses progrès concrétisés dans la lutte contre le projet salafiste et contre l'encerclement jihadiste, depuis le sit-in du Bardo et les gigantesques marches populaires de l'été 2013, ayant succédé à l'assassinat de Mohamed Brahmi, lesquelles ont été, face à la volonté d'hégémonie de la Troïka, une sorte de «prise du Bardo» rimant avec la fameuse «prise de la Bastille» de la révolution française. Une victoire à laquelle a eu son apport incontestable l'attitude patriotique du président de la Constituante, Mustapha Ben Jaâfar. Depuis, le deuxième gouvernement de la Troïka a démissionné et la rédaction de la Constitution a tourné le dos au salafisme et au théocratisme au profit de la République démocratique et de l'Etat civil. La marche républicaine de ce matin ne devrait-elle pas être appréhendée comme une seconde «prise du Bardo», une autre victoire populaire éclatante contre le théocratisme, le takfirisme et le jihadisme ? Dans les rangs du peuple tunisien Le fait qu'Ennahdha ait décidé de rejoindre le mot d'ordre de «l'unité nationale» et de ne pas se porter candidat à la présidentielle, puis d'appuyer le gouvernement mis en place par Nida Tounès est le fruit d'un choix et d'un renoncement. Le renoncement à la stratégie de mainmise hégémonique et de salafisation et le choix d'être dans les rangs de ce peuple tunisien qui a courageusement refusé leur premier projet. Et il ne faut, aujourd'hui, décourager cette option historique de démocratisation et de modernisation de nos islamistes, quelles que soient ses limites objectives, mais contribuer à attirer vers cette expérience pionnière tous ceux qu'il est possible de convertir à la République et à la modernité. En attendant de voir l'évolution de cette expérience conduire aux remises en cause idéologiques et stratégiques qui ne manqueront pas de s'imposer. Le combat contre le terrorisme est une cause nationale et patriotique sacrée. On ne peut en exclure les centaines de milliers de citoyens qui ont voté pour Ennahdha aux dernières législatives, car il a besoin de voir se mettre en place un large front national et populaire proche de l'unanimité. Un front digne de notre jeune démocratie et du soutien international qu‘elle suscite.