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En son 130e anniversaire, le Musée du Bardo attend des jours meilleurs
Publié dans Leaders le 18 - 05 - 2018

En cette journée du début du mois de mai, la beauté du printemps déploie une très belle luminosité qui engage à la sortie. Il est 15H00. Un petit groupe de touristes étrangers s'arrête devant la porte d'entrée du Musée national du Bardo, intrigué par un panneau de mosaïque très particulier, portant deux inscriptions, l'une en français et l'autre en arabe. Les questions fusent : « C'est quoi le Musée Alaoui ?... Ce serait expliqué dans l'inscription écrite en arabe ? … ».
Des visiteurs désorientés et soumis à rude épreuve
Après avoir accompli les formalités de la billetterie, le groupe de touristes a couru vers la grande mosaïque exposée dans le hall du musée et dont la partie inférieure plonge vers le sous-sol délimité par un garde-corps. Emerveillés par les dimensions et la beauté du pavement, les touristes cherchent le cartel qui présente le chef-d'œuvre. Ils finissent par l'apercevoir au bas de l'objet, au niveau du plancher du sous-sol sans pouvoir en lire le contenu, inaccessible, compte tenu de la grande distance. Habitué à ce genre de blocage, un gardien du musée s'avance, avec assurance, vers le groupe pour assouvir sa curiosité légitime : « Il s'agit de la plus grande mosaïque découverte en Tunisie. Elle présente ‘'Le Triomphe de Neptune''. Découverte à Sousse, elle date du IIe siècle ap. J.-C. Il y a quelques années, elle était exposée dans la Salle de Sousse située au premier étage ».
Dans le passage voûté qui fait accéder à la partite ancienne du musée, le groupe de touristes découvre, dans la pénombre d'une niche, un panneau comprenant un long texte et une illustration relatifs à un itinéraire présenté longuement et intitulé ‘' Magon. Le chemin de la vigne méditerranéenne sur les traces de Magon. Entre la Sicile et la Tunisie''. De nouveau les questions se bousculent : « Il y a un circuit dans le musée ? Où sont les balises qui permettent de le suivre ? Pourquoi, un panneau caché ici et non pas exposé à l'entrée du musée ? Dans quelle salle du musée se trouve la mosaïque représentée sur le panneau ? ».
En accédant au premier étage, à l'entrée de ce qui a été pendant très longtemps la ‘'Salle de Sousse'', un panneau posé par terre annonce une exposition temporaire d'objets archéologiques tunisiens ramenés d'Italie. Le titre est aussi alléchant qu'intriguant : ‘'Antiquités d'Afrique au Musée des Offices. Giovanni Pagni, médecin et archéologue pisan dans la Tunisie du XVIIe siècle''. Les touristes sont, de nouveau, intrigués : « Il faut payer un droit particulier pour accéder à cette exposition ? Pourra-t-on acheter le catalogue de la manifestation ? ».
Les trois arrêts des touristes manquant de renseignements résument à eux seuls l'une des plus grandes tares du Musée du Bardo : la médiocrité de sa signalétique, très souvent du point de vue du mode de l'affichage et parfois du point de vue du contenu. N'est-il pas fréquent de rencontrer, au Musée du Bardo, des visiteurs intéressés, courbés ou accroupis, pour pouvoir lire le cartel d'un pavement de mosaïque ou d'une statue, dont le texte est écrit en caractères très fins et placé tout près du sol ?
Il s'agit pourtant du plus grand musée du pays, mondialement connu pour sa magnifique collection de mosaïques et qui a bénéficié, de 2009 à 2012, d'un grand projet d'extension et de réorganisation fiancé par un prêt de la Banque mondiale dont le montant s'est élevé à plus de 20 millions de dinars. Inauguré le 25 juillet 2012, la réalisation qui était, alors inachevée, l'est encore, six ans après. Les rattrapages vont à un rythme dont la lenteur est déroutante : Ce n'est qu'au cours de ces derniers mois que les boutiques et le café donnant sur une cour extérieure ont été loués à des particuliers ; le local du restaurant aménagé au-dessus de la librairie est toujours fermé ; le site Web de l'Agence de Mise en Valeur du Patrimoine et de Promotion Culturelle (AMVPPC), annonce, ces jours-ci, un appel d'offre concernant la climatisation du … hall d'entrée du musée.
L'art de rater les bonnes occasions
En ce mois de mai 2018, le Musée du Bardo a 130 ans. Comme le rappelle le panneau de mosaïque qui commémore son inauguration et qui a été exhumé, récemment, des réserves de l'établissement pour être accroché devant l'entrée, l'évènement a eu lieu le 7 mai 1888, en présence du monarque Ali Bey, du Ministre Résident Général de France, Justin Massicault et de plusieurs personnalités scientifiques françaises dont René du Coudray de La Blanchère. Ce dernier fut, à partir de 1885, le premier directeur du Service des antiquités, des Beaux-Arts et Monuments historiques de la Régence de Tunis et a œuvré, à ce titre, à la mise sur pied du musée archéologique prévu par un texte de loi datant de 1882. Pour flatter l'orgueil du Bey, les autorités du Protectorat ont consenti à ce que nom fût donné à l'établissement d'où l'appellation ‘'Musée Alaoui'' transformée, au lendemain de l'indépendance du pays, en ‘'Musée national du Bardo''.
Le 130e anniversaire du Musée du Bardo ne méritait-il pas d'être célébré, dans le cadre du ‘'Mois du Patrimoine'' ? Entre autres manifestations de la célébration, les décideurs auraient pu organiser une rencontre scientifique autour de l'histoire des musées de Tunisie, qui reste encore à écrire.
La Journée internationale des Musées (JIM), célébrée chaque année le 18 mai, ne connaîtra, cette année aussi, aucune manifestation au Musée du Bardo. Sous l'égide du Conseil international des Musées (ICOM), la JIM 2018 a pour thème ‘' Musées hyperconnectés. Nouvelles approches, nouveaux publics''. Comme presque toujours, les autorités tunisiennes en charge du Patrimoine préfèrent l'ignorer en tant que telle et en faire la journée de clôture du ‘'Mois du Patrimoine'' célébré, cette année, sous le thème ‘'Les valeurs universelles du patrimoine culturel tunisien ‘'.
Et pourtant ! Combien aurait été salutaire une bonne initiative concernant la connectivité du Musée du Bardo resté, de ce point de vue, dans un état de dénuement complet : ni applications pour smartphones et tablettes, ni bornes interactives, ni même un simple site Web digne du vénérable établissement ! A l'échelle centrale, l'Institut national du Patrimoine (INP) a préféré fêter son soixantième anniversaire, avec un an de retard, en organisant une exposition, dans ses locaux, glorifiant le passé et occultant les défis du présent et les innombrables attentes sociales dont regorgent les organes de presse et les réseaux sociaux. La journée d'étude, organisée la veille de l'inauguration de l'exposition, n'a absolument rien à voir avec le thème du ‘'Mois du patrimoine''. Ce n'est qu'à Sousse et à El Jem que le thème de la JIM 2018 a été respecté, grâce, en partie, à l'apport salutaire de la société civile.
Le thème de la connectivité des musées aurait pu aussi être décliné en rapport avec le méga projet ‘'Itinéraire de Magon'', copieusement financé par l'Union européenne et dont le Musée du Bardo est l'un des point d'ancrage principaux. Initié par la Chambre Syndicale des Producteurs des Boissons Alcoolisés-UTICA, en partenariat avec ANIMED, la société italienne de service culturel, le projet, n'est signalé au Musée du Bardo que par une pancarte qu'il faut dénicher au fond d'une niche mal éclairée. L'Itinéraire de Magon, auquel se sont associés les établissements en charge du patrimoine culturel et quelques autres partenaires tunisiens, a été conçu pour célébrer le patrimoine viticole et vinicole de Tunisie et de Sicile en s'appuyant sur des sites archéologiques, des Musées et des lieux actuels de production. Inauguré, dans sa version finale, il y a quelques mois, il reste inaudible et invisible, particulièrement au Musée du Bardo.
L'exposition d'une vingtaine de pièces archéologiques tunisiennes appartenant au Musée des Offices de Florence depuis la fin du XVIIe siècle est une manifestation exceptionnelle. S'agissant du retour (temporaire) des premières pièces archéologiques tunisiennes exportées en Italie avec l'accord du Bey Mourad II, l'évènement est resté trop peu médiatisé alors que l'exposition a été inaugurée il y a plus de deux mois. Sous d'autres cieux, les expositions de cette valeur sont annoncées par les radios, les chaines de télévision et des affiches dans les rues. Au Musée du Bardo, il faut monter au premier étage pour en faire la découverte.
Quand le mauvais goût s'ajoute à l'incurie !
Le tas de pierre qui date des travaux d'extension et de réorganisation du musée, inaugurés en 2012 constitue, depuis des années, un spectacle affligeant qui traduit à la fois le mépris du patrimoine et des visiteurs. Les amis du musée gardent le bon vieux souvenir des pièces archéologiques installés avec un bon goût sur la pelouse se trouvant à l'arrière du musée…
En face de l'entrée du musée, se trouve la porte qui faisait accéder à la célèbre école militaire du Bardo, créée par Ahmed Ier Bey en 1834 et don l'un des élèves les plus illustres est le grand réformateur Kheireddine Pacha, initiateur, entre autres belles œuvres, d'un … projet de musée archéologique, en 1876 , soit cinq ans avant l'établissement du Protectorat français. Outre sa valeur de lieu de mémoire, la porte, ainsi que ses deux inscriptions et son encadrement magnifique sont des joyaux de l'art monumental tunisien. Depuis quelque temps, son décor en bois, unique en son genre, est en train de tomber en lambeaux.
Pour ajouter à la dégradation de l'environnement, une installation surprenante meuble, depuis quelques semaines, un rond-point situé à la hauteur de l'échangeur qui, de la route régionale 21 (Route X) mène au Musée du Bardo. Il s'agit d'une soi-disant représentation d'un tronçon d'aqueduc précédé d'un tableau qui reproduit la célèbre mosaïque de Dougga où Ulysse est représenté attaché au mât de son navire pour ne pas succomber au chant des Sirènes. D'un ridicule intégral, le tronçon minuscule d'aqueduc ambitionne de rappeler la monumentalité de la conduite d'eau qui serpentait, à l'époque romaine, de Zaghouan à Carthage, en passant par Oued Ellil et sur laquelle les Hafsides ont greffé, à la fin du Moyen Age, un tronçon qui passait par les environs immédiats du Bardo pour rejoindre la Kasbah de Tunis.
Quant à la reproduction de la mosaïque de Dougga sous forme d'une peinture réalisée sur des carreaux blancs de faïence de salle de bain, elle constitue une injure pour le Musée du Bardo, haut lieu mondial de la mosaïque et initiateur, il y a près d'un demi-siècle, d'une excellente formation des restaurateurs et des fabricants de ce genre de décor.
Il est 16H25. Le groupe de touristes étrangers croisé au musée en cette belle et longue journée du mois de mai est surpris par l'extinction des lumières qui annonce la fermeture de l'établissement. Circulez ! Il n'y a plus rien à voir ; il fera noir dans trois heures.
Censé être le Vaisseau-Amiral des musées tunisiens, le Musée national du Bardo est, depuis plusieurs années, à la traîne. Ni les milliards qui y ont été injectés dans les années 2009-2012, ni les publications qui ont cherché, récemment, à le glorifier après la grande épreuve du 18 mars 2015, ni les rares belles initiatives qui y ont été prises tels que le renouvellement des socles des statues de la Salle de Carthage et quelques expositions temporaires, n'ont réussi à le sortir de sa léthargie structurelle. Dépourvu de l'autonomie nécessaire et visiblement desservi par la double tutelle de l'INP et l'AMVPPC, il souffre des limites d'une gouvernance obsolète. Globalement, sa gestion s'apparente plus à l'amateurisme qu'au professionnalisme appuyé sur la formation à bonne école et l'expérience graduée. De ce fait, il risque de végéter encore longtemps et de représenter une relique du début du XXe siècle plutôt qu'un établissement aux normes du XXIe siècle. Cela durera tant que seront négligées la muséographie et la communication qui s'appuient sur la science sûre, la créativité continue et les NTIC assurant … l'hyperconnectivité, les nouvelles approches et les nouveaux publics, célébrés, partout dans le monde, en ce 18 mai 2018.
Houcine Jaïdi


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